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Le Peuple et le Roi

Le Peuple et le Roi

Titel: Le Peuple et le Roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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bourgeoisie
ne quittera pas les armes que la Constitution ne soit faite. »
     
    Louis, en cette fin de mardi 14 juillet, n’imagine pas la
gravité de ce qui vient de se produire à Paris.
    Il est cependant si préoccupé, qu’il n’a pas chassé. Et il a
écrit à la date du 14 juillet, sur le carnet où il note ses exploits
cynégétiques, le mot « Rien ».
    Au même instant à Paris, le libraire Ruault écrit :
    « La journée de mardi a tué le pouvoir du roi. Le voilà
à la merci du peuple pour avoir suivi les perfides conseils de sa femme et de
son frère Charles d’Artois. Ce début de grande révolution annonce des suites
incalculables pour les plus prévoyants. »
     
    Louis veut croire qu’il ne s’agit que de l’une de ces
émeutes parisiennes, de ces frondes que les rois ont toujours su écraser, ou
désarmer.
    Et cependant l’inquiétude le ronge, et il la fuit, en se
contentant de répondre à une délégation de l’Assemblée qui veut lui faire part
de ce qu’elle vient d’apprendre des événements parisiens :
    « J’ai donné l’ordre que mes troupes qui sont au
Champ-de-Mars se retirassent. »
    Puis il bâille, s’enfonce dans ce sommeil où tout se dissout.
     
    Mais à l’aube du mercredi 15 juillet, le grand maître de la
Garde-Robe le réveille, et chaque mot que prononce le duc de La
Rochefoucauld-Liancourt arrache douloureusement Louis XVI à la somnolence
protectrice.
    La Bastille est tombée. On a promené des têtes au bout des
piques en poussant des cris de cannibales.
    « C’est une révolte », balbutie Louis XVI d’une
voix sourde.
    « Non, Sire, c’est une révolution. »
    Louis a l’impression qu’il ne pourra jamais soulever son
corps.
    Il se redresse lentement.
    Il doit bouger, agir.
    Il faut se rendre à l’Assemblée, répéter qu’on a pris la
décision d’éloigner les troupes de Paris et de Versailles.
    « Je compte sur l’amour et la fidélité de mes sujets, dit
Louis. Je ne suis qu’un avec ma nation, c’est moi qui me fie à vous. Aidez-moi
dans cette circonstance à assurer le salut de l’État… Je ne me refuserai jamais
à vous entendre et la communication entre l’Assemblée et moi sera toujours
libre… »
    Il se retire en compagnie de ses frères, rentre à pied au
château, accompagné par les députés des trois ordres.
    La foule accourt, crie : « Vive le roi ! »
    Louis se rassure, malgré les avertissements de la reine, du
comte d’Artois. Il faut, disent-ils, effacer par une victoire et un châtiment
exemplaire la révolte de Paris, la prise de la Bastille, la tuerie sauvage qui
a suivi.
    Il faut imposer partout dans le royaume l’autorité du roi.
     
    Le soir de ce mercredi 15 juillet, Louis écoute le récit de
la réception faite par Paris à la députation de l’Assemblée nationale qui s’y
est rendue dans l’après-midi.
    Plus de cent mille Parisiens, souvent armés, l’ont
accueillie. On a crié « Vive la nation ! Vive les députés ! »
mais aussi « Vive le roi ! ». Le marquis de La Fayette, président
de la députation, a déclaré : « Le roi était trompé, il ne l’est plus.
Il est venu aujourd’hui au milieu de nous, sans troupes, sans armes, sans cet
appareil inutile aux bons rois. »
    Le comte de Lally-Tollendal a ajouté :
    « Ce bon, ce vertueux roi, on l’avait environné de
terreurs. Mais il a dit qu’il se fiait à nous, c’est-à-dire à vous… »
    « Tout doit être oublié, a conclu le comte de
Clermont-Tonnerre. Il n’y a pas de pardon à demander où il n’y a pas de
coupable… Le peuple français hait les agents du despotisme mais il adore son
roi… »
    Les acclamations ont déferlé en hautes vagues.
    On a proclamé le marquis de La Fayette commandant la milice
parisienne, cette « garde nationale », et Bailly, désigné prévôt des
marchands, a préféré le titre de maire qui lui a été accordé par acclamation.
    L’archevêque de Paris a conduit la députation à Notre-Dame, où
l’on a chanté un Te Deum .
    La cathédrale était pleine.
    À la sortie, le peuple a crié qu’il voulait le rappel de
Necker. Les députés ont approuvé, affirmé que le vœu du peuple serait exaucé.
     
    Louis sait, le jeudi 16 juillet, qu’il va devoir décider. À
l’Assemblée nationale, qui vient de se réunir, le comte Lally-Tollendal a dit
sous les acclamations :
    « Ce vœu bien prononcé nous l’avons entendu hier à
Paris. Nous l’avons entendu

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