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Le Peuple et le Roi

Le Peuple et le Roi

Titel: Le Peuple et le Roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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fureur ?… Que sont quelques gouttes de sang que la populace
a fait couler dans la révolution actuelle pour recouvrer sa liberté… auprès des
torrents qu’en a fait répandre la coupable ambition d’un Louis XIV ? »
    Il ajoute :
    « La philosophie a préparé, commenté, favorisé, la
révolution actuelle, cela est incontestable. Mais des écrits ne suffisent pas. Il
faut des actions. C’est donc aux émeutes que nous devons tout… »
    Il se moque des « cœurs sensibles qui ne voient que l’infortune
de quelques individus victimes d’une émeute passagère » et qui oublient « la
foule opprimée, massacrée pendant des siècles entiers ».
    Il veut « verser de l’eau-forte dans les blessures »,
« afin de réveiller le peuple contre ceux qui lui donnent de l’opium ».
    Et la loi martiale ne peut avoir été proposée que par « un
ennemi du bien public… ».
     
    Cette apologie de l’émeute choque, scandalise, inquiète
Bailly, certains districts de la Commune de Paris.
    Bailly fait saisir les presses sur lesquelles on imprime L’Ami
du peuple. Marat est même arrêté, mais relâché presque aussitôt sur
intervention de La Fayette.
    C’est que les oppositions politiques se sont exacerbées, et
les ambitions des uns et des autres avivées, parce que chacun comprend qu’on
est entré dans une nouvelle période. Il s’agit d’organiser le nouveau régime et
non plus de se contenter de la Déclaration des droits de l’homme, et des
articles principaux d’une Constitution.
    Et sur chaque question évoquée à l’Assemblée, les opinions
des députés divergent.
     
    On craint Mirabeau. On sait qu’il a rencontré La Fayette. Qu’il
voudrait être ministre, conseiller le roi, la reine, ou devenir le mentor de
Monsieur, comte de Provence, frère du roi.
    L’Assemblée vote une disposition selon laquelle un député ne
peut être ministre, façon d’écarter Mirabeau !
    Et Marie-Antoinette dit, hautaine, au comte de La Marck qui
lui propose une fois de plus un « plan » de Mirabeau pour sauver la
famille royale en préparant leur fuite :
    « Nous ne serons jamais assez malheureux, je pense, pour
être réduits à la pénible extrémité de recourir à Mirabeau ! »
    Autre débat, quand l’Assemblée décide que ne pourront voter
que les citoyens actifs qui paient une contribution directe et ont plus
de vingt-cinq ans, et ne sont pas domestiques… Quant aux autres, les passifs , ils sont exclus du vote.
    « Il n’y a certainement de vrais citoyens que les
propriétaires », dit un constituant.
    Le suffrage sera à plusieurs degrés et ne pourront être élus
à l’Assemblée que ceux qui paient une contribution de un marc d’argent.
    Robespierre s’insurge : « Cela revient à déclarer,
dit-il, que l’homme qui a cent mille livres de rente est cent mille fois plus
citoyen que l’homme qui n’a rien ! »
    On l’accuse de susciter le désordre, et même d’être, affirme
la presse royaliste – L’Ami du roi, Les Actes des apôtres –, le neveu du…
régicide Damiens !
     
    Nouvelle opposition lors du vote sur la proposition de l’évêque
d’Autun, Talleyrand, de la mise à la disposition de la nation des biens du
clergé – l’État prenant à sa charge le salaire des membres du clergé : nouvelles
fractures dans le pays.
    Le haut clergé s’arc-boute, refuse de laisser déposséder l’Église
de ses biens.
    « Vénérables cultivateurs, écrit l’évêque de Tréguier, si
aujourd’hui on envahit les propriétés des premiers ordres de l’État, qui vous
garantit les vôtres pour l’avenir ? »
    Mais l’État a besoin d’argent : les biens de l’Église
devenus biens nationaux serviront à gager les assignats – bons du
Trésor – avec lesquels l’État paiera ses dettes.
     
    Le royaume est ainsi bouleversé de fond en comble en
quelques mois.
    Les parlements, les provinces disparaissent. On crée les
départements, administrés par un Conseil général élu, et de même, chaque ville,
bourg, paroisse, soit quarante mille communautés d’habitants, aura une
municipalité.
     
    Louis a l’impression que le sol de son royaume se dérobe
sous ses pas.
    Une nation surgit, différente, violente, rétive, enthousiaste
aussi, faite d’assemblées multiples qui débattent, discutent, contestent, s’attroupent,
et la loi martiale n’y fait rien.
    Il observe, écoute. Il s’enferme en lui-même devant ces
bouleversements,

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