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Le piège

Le piège

Titel: Le piège Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Emmanuel Bove
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d’eux, ils rentrèrent à l’hôtel.
    — Il faudrait peut-être dire que tu
couches avec moi, remarqua Yolande. En principe, on doit le faire. La police
est tout le temps là.
    — Oh ! je commence à en avoir
assez, dit Bridet, de tous ces contrôles et de toutes ces vérifications. Elle
fera ce qu’elle voudra, cette police. Moi, je monte me coucher, un point, c’est
tout.
    Bridet dormit mal, le lit étant trop petit
pour deux. À quatre heures du matin, il se leva, mit son pardessus, s’enveloppa
les jambes dans un manteau de sa femme, et s’assit dans le fauteuil. Il
somnolait lorsque, soudain, il entendit des coups frappés à la chambre voisine.
Le jour devait commencer à se lever car une légère clarté filtrait à travers
les volets, à moins que ce ne fût la lune. Il regarda sa montre. Il était cinq
heures vingt. Maintenant, il entendait des bruits de voix et un remue-ménage dans
la chambre voisine. « Toujours ces éternels voyageurs », pensa-t-il.
Mais au même moment, on frappa trois ou quatre coups de suite à sa porte. « Où
es-tu ? » demanda Yolande qui s’était réveillée en sursaut. « Je
suis là. — C’est toi qui as frappé ? — Non. »
    Il alluma l’électricité. On frappa de
nouveau.
    — Ouvrez, ouvrez, police, entendit-il.
    — Police ? demanda Bridet sans
savoir ce qu’il disait.
    — Ouvrez. Police.
    Bridet obéit. Deux hommes se tenaient dans
le couloir. Ils parlaient à un troisième personnage qui lisait un papier un peu
plus loin. À droite, dans le fond du couloir, on entendait d’autres bruits. Il
s’agissait visiblement d’une descente de police et Bridet eut tout de suite le
sentiment rassurant que ce n’était pas à lui personnellement qu’on en voulait.
En effet, il avait beau avoir ouvert, on ne s’intéressait pas encore à lui.
    — Dites à madame de s’habiller, fit un
policier en apercevant Yolande dans le lit.
    — Tu as la liste ? demanda le
deuxième policier à celui qui lisait.
    — Tout de suite, répondit celui-ci.
    — Quelle chambre est-ce ? s’enquit
celui qui avait prié Yolande de s’habiller, en cherchant le numéro sur la
porte.
    — 72, dit Bridet.
    — Je ne comprends plus, dit le
policier. Alors, on passe de 68 à 72. Où sont les chambres intermédiaires ?
    — Au fond du couloir, dit Yolande en s’habillant.
    Un quatrième et un cinquième policier
apparurent, venant justement du fond du couloir.
    — C’est un labyrinthe cet hôtel, dit l’un
d’eux. Est-ce que de ce côté, c’est fait ?
    — Oui, à part le type du 64 qui ne
retrouve pas ses papiers.
    — Qu’est-ce que c’est que ce type-là ?
    — Ça a l’air d’un étranger. Ce doit
être un juif.
    — Il faut l’embarquer.
    Bridet alla prendre son portefeuille dans
son veston et en tira sa carte d’identité et sa fiche de démobilisation.
    — Tenez, dit-il aux policiers qui
venaient d’entrer dans la chambre.
    — Mais quelle chambre est-ce ?
redemanda le policier sans même prendre les papiers.
    — 72.
    — Ah ! mais alors, dit le
policier, qu’est-ce que vous faites là ?
    — C’est la chambre d’une seule
personne, une dame, dit le deuxième policier en regardant sa liste. Qui est Mme
Bridet ?
    — C’est moi, dit Yolande.
    — Moi, je suis le mari, dit Bridet. Je
suis arrivé de Vichy hier soir. Ne sachant pas où coucher, j’ai couché chez ma
femme.
    — Vous n’avez pas rempli de fiche.
    — Je n’ai pas pensé que c’était
nécessaire, dit Bridet, puisque nous avons le même nom.
    — Montrez vos papiers.
    Le policier les examina longuement, puis il
appela son collègue et les lui passa. Ce dernier les examina à son tour.
    — Vous vous appelez Joseph Bridet ?
    — Oui.
    — Tu as le carnet ? demanda le
policier à son collègue. Passe-le-moi. Il feuilleta longuement ce carnet, puis
le referma sans rien dire.
    — Vous êtes le mari de Madame ?
    — Oui.
    — Votre carte d’identité n’a pas de numéro.
    — Je le sais bien. Mais ce n’est pas
de ma faute.
    — Et cette fiche de démobilisation, qu’est-ce
que c’est ?
    — Tu as déjà vu des fiches comme ça,
Robert ?
    — C’est une fiche de démobilisation. C’est
ce qu’on nous a donné à tous, après l’armistice, pour prouver que nous avions
été démobilisés régulièrement, puisqu’on tenait tellement à faire les choses
régulièrement.
    — Tu as vu cette fiche ? dit le
policier à son

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