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Le piège

Le piège

Titel: Le piège Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Emmanuel Bove
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juste un instant à vous donner. Bridet raconta l’histoire
de la pauvre femme. Elle s’était approchée. Elle disait sans arrêt à Bridet. « Merci,
Monsieur, merci, Monsieur... » Le secrétaire partit en levant les bras en
signe d’impuissance, mais sans dire non.
    Une heure plus tard, Bridet était introduit
dans le bureau du commissaire central. Celui-ci avait déjà les papiers de
Bridet devant lui.
    — Je vois que vous êtes journaliste. À
quels journaux collaboriez-vous ?
    — Au journal Le Journal et au Figaro .
    —  Le Journal est à Lyon en ce
moment, n’est-ce pas ?
    — Oui, Monsieur.
    — Est-ce que vous en faites toujours
partie ?
    — Non, Monsieur.
    — Pourquoi ?
    — Parce que ça ne m’intéresse pas de
travailler dans les conditions actuelles.
    — Pourtant, le Figaro ...
    Le commissaire garda le silence. Il leva
les yeux. À ce moment, le regard des deux hommes se rencontra. Bridet eut alors
l’impression que le commissaire l’approuvait.
    — Vous savez pourquoi vous êtes ici,
continua-t-il.
    — Non, dit Bridet.
    — Votre nom ne figurait pas sur le
livre de police de l’hôtel.
    Le commissaire eut un léger sourire qui
laissait entendre qu’il trouvait lui-même cette raison peu convaincante.
    — Qu’est-ce que vous voulez, les
inspecteurs sont bien obligés de faire ce qu’on leur dit, continua le
commissaire. Moi aussi, d’ailleurs. Voici vos papiers. Je vais donner l’ordre
qu’on vous libère.
    — Je vous remercie, dit Bridet.
    De nouveau, le regard des deux hommes se
rencontra. Cette fois, Bridet n’eut plus aucun doute. Il avait affaire à un
Français. Il sentit entre le commissaire et lui une sorte de complicité
secrète.
    — Je vous remercie, répéta-t-il.
    — Oh ! ne me remerciez pas. C’est
tout naturel. Nous nous comprenons, n’est-ce pas ? Vous n’avez qu’à
retourner dans la salle. On va vous prévenir.
    Le commissaire se leva, tendit la main un
peu négligemment, sans doute pour ne pas trop se compromettre car, après tout,
il pouvait se tromper sur le compte de Bridet et, en reconduisant celui-ci, dit
aux deux agents qui avaient assisté à l’entretien : « M. Bridet va
être relâché tout à l’heure. »
    Il y avait moins de monde dans la salle.
Bridet s’assit sur un banc. Il attendait depuis une vingtaine de minutes
lorsque le secrétaire à qui il avait parlé tout à l’heure de la pauvre femme,
parut sur le seuil de la porte. Faisant semblant de ne pas voir Bridet, il
appela : « M. Bridet, s’il vous plaît ! »
    Bridet se leva.
    — M. le commissaire me charge de vous
dire, continua le secrétaire, qu’il vient de recevoir à l’instant l’ordre de la
Direction générale de la Police nationale de vous libérer immédiatement et de
vous faire des excuses. Je vous les fais, de la part de M. le commissaire et je
vous annonce que vous êtes libre...
    Une bouffée de chaleur monta à la tête de
Bridet. Il resta un instant interdit. Se ressaisissant enfin, il dit : « Je
vous remercie, je vous remercie... mais est-ce que je ne pourrais pas voir M.
le commissaire ? »
    — Je le regrette, dit sèchement le
secrétaire, mais M. le commissaire n’a pas le temps de vous recevoir.
     

5
    En quittant le commissariat central, Bridet
prit la rue de la Charité. Yolande avait été vraiment maladroite. En
téléphonant à Vichy, en dérangeant des personnages importants – ou du
moins qui se croyaient importants – elle avait certainement donné une
impression d’affolement. Ils devaient s’imaginer que quelque chose de beaucoup
plus grave qu’une simple vérification d’identité s’était produit. Yolande avait
mis son mari dans une situation ridicule. Il lui avait pourtant bien dit de ne
point bouger. Enfin, elle avait cru bien faire et il ne pouvait lui en vouloir.
    Il arriva peu après à l’hôtel. Cet hôtel s’appelait
l’hôtel d’Angleterre. Un fanatique vichyssois n’avait pu le supporter. Une
nuit, il avait lancé des pierres sur la marquise et des morceaux de verre
bleuis à cause des alertes traînaient encore par terre.
    Yolande était sortie. Elle devait faire d’autres
démarches. Le coup de téléphone de Vichy n’avait peut-être pas été efficace. « C’est
extraordinaire, pensa Bridet, ce que les femmes aiment les histoires. »
    Il aperçut le propriétaire. Il craignit que
celui-ci ne lui fît une observation, qu’il ne le rendît responsable des ennuis
que la

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