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Le Pont de Buena Vista

Le Pont de Buena Vista

Titel: Le Pont de Buena Vista Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Maurice Denuzière
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verres de gin et à risquer la vérole en passant leur temps chez les prostituées. Mais ne faites pas travailler des gens de Buena Vista, même si Lamia vous en propose : je n'ai pas confiance.
     
    – Où trouverez-vous toute la ferraille et le matériel dont vous aurez besoin ? demanda le major, pratique.
     
    – Sans doute aux États-Unis. Car, sur l'île, vous ne disposez ni de fer ni de machines capables de le travailler, monsieur. Le mieux serait de faire fabriquer tous les éléments du pont dans les ateliers qui travaillent pour les chemins de fer, à Pittsburgh, peut-être chez Keystone Bridges Works, où l'on sait faire les fameuses poutres dites bowstrings , de l'ingénieur Whipple. Ensuite, nous ferions transporter tous les éléments finis à Soledad par un de vos bateaux. Il nous resterait à les assembler sur place, conclut Charles.
     
    – Je suis actionnaire de Keystone, qui fait pour nos compagnies des rails de chemin de fer. Je vous donnerai une lettre de recommandation. C'est ça, faites-lui fabriquer votre pont. Allez vous installer à Smoky City , la ville la plus enfumée, la plus puante, la plus salement industrielle de l'Union ! Restez-y le temps nécessaire pour mener à bien votre travail et corrompre vos poumons. Quand Rodney sera revenu des Carolines avec ma fille, il vous conduira là où vous jugerez bon d'aller avec le Centaur . C'est un brick-goélette rapide et sûr. Vous arrangerez tout ça avec le major. Et ne regardez pas à la dépense. Sachez que je pourrais m'offrir le pont suspendu que John Roebling est en train de construire sur le Niagara ! Alors, hein, pas d'économies : du meilleur, du solide, du beau. Que ce soit le plus beau pont en fer du monde, monsieur Desteyrac ! conclut chaleureusement Simon Cornfield en quittant son fauteuil avec effort, mais en toute dignité.
     

    Au lendemain de cette conversation rassurante, Charles se rendit en fin de matinée chez le major Carver pour récupérer les plans et dessins confiés la veille. Il trouva Edward, dont le flegme lui avait jusque-là paru difficile à entamer, en proie à une vive agitation. Le fait qu'il accueillît Desteyrac en l'appelant par son prénom prouvait sa nervosité.
     
    – Charles, je suis très inquiet. On a volé un de mes pistolets, dit-il sans autre entrée en matière.
     
    Il désignait sur un guéridon une boîte ouverte qui contenait un colt Navy à barillet. Le logement gainé de feutre vert d'un second pistolet était vide.
     
    – Cette paire de pistolets, dits revolvers à cinq coups de calibre 36, m'a été offerte, l'an dernier, par Samuel Colt lui-même après que j'eus obtenu de lord Simon qu'il prît une participation dans la Colt Arms Manufacturing Company de Hartford, dans le Connecticut.
     
    – On vous a volé une arme pareille ! dit Charles, incrédule, en admirant la fine gravure figurant sur le barillet.
     
    – Oui. Et Poko n'a rien vu, rien entendu. J'ai trouvé la boîte ainsi. Le voleur ne s'est même pas soucié de la remettre dans l'armoire.
     
    – Un homme pressé, sans doute…
     
    – Ce qui me préoccupe le plus, c'est que mon seul visiteur, d'ailleurs inattendu, fut, il y a moins d'une heure, Malcolm Murray, dit Carver.
     
    – Murray ! Vous pensez qu'il a pu s'emparer de l'arme ?
     
    – Pourquoi non ? Vous savez qu'il ne supporte pas sa boiterie. Il m'a fort surpris en venant me demander à une heure un peu trop matinale si son père avait répondu à ma lettre. J'avais, comme vous savez, pris l'initiative de suggérer à Richard Murray de rappeler son fils en Angleterre, précisa Carver.
     
    – Et le père de Murray n'a pas répondu ?
     
    – Si, hélas ! Mais je n'ai pas révélé la teneur de sa réponse à Malcolm. Vu son état d'esprit, j'ai préféré temporiser. Car Murray ne souhaite pas, avant longtemps, le retour de son fils en Angleterre. Il me conseille même de lui trouver une épouse américaine. Aucune Anglaise, écrit-il, ne voudra pour mari d'un infirme débauché !
     
    – Quel drôle de père ! Mais, même ignorant cela, Malcolm est très capable, entretenant son désespoir par le gin, de mettre fin à ses jours, dit Charles, gagné par l'inquiétude.
     
    – Mais où le trouver ?
     
    – Il est parti en boitant du côté de Cornfield Manor, indiqua Poko.
     
    – Mettons-nous à sa recherche, proposa Desteyrac.
     
    – Attention, monsieur, sir Malcolm Murray est armé, fit observer le

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