Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le poursuivant d'amour

Le poursuivant d'amour

Titel: Le poursuivant d'amour Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
Vom Netzwerk:
rehausser une carnation blafarde. Il venait de lui reprocher ses mots trop épicés ? Eh bien, les onguents destinés à l’embellir relevaient la fadeur de sa peau d’un condiment trop épais. Sciemment et involontairement, elle avait, ce matin, un faux-visage de plus.
    – Je fois révérence à la baronne de Montaigny.
    Tandis qu’il exprimait cet éloge d’une ironie froide qu’il ne l’avait souhaitée, Tristan sentit son cœur s’enfler d’un sentiment qu’elle ne lui avait jamais inspiré : la pitié. Tout compte fait, il la préférait nue, la face nette et les yeux vrais. Oriabel détestait ces espèces d’apprêts ; il avait droit, ce jour d’hui, à l’apothéose.
    Sa geôlière s’assit, caressa ses cheveux. Il y eut entre eux un moment d’une harmonie et d’une exquisité parfaites.
    – Quel dommage, mon grand garçon, que tu ne puisses me foutre… Il te faut attendre quatre jours.
    Le geste bref qui souligna ce regret suffit pour fortifier chez Tristan la conviction qu’il était sollicité à outrance pour gonfler d’un héritier le ventre de femme qui pouvait être bréhaigne – sans quoi, eût déjà mis au monde un fils ou une fille, et même davantage. En pareil cas, étant donné son âge, il est temps qu’elle fût engrossée, bien que l’idée d’être père d’un enfant conçu avec elle lui parût incongrue.
    – Tu voulais sortir au-delà de ces murs. Tu vas être exaucé. Hier soir, avant qu’elle ne parte après nous avoir servis, j’ai demandé à Ydoine de faire préparer les chevaux… Panazol les mène en ce moment dans la cour.
    Effectivement, l’un d’eux hennissait et sabotait. Un cheval dur, sans doute, et qui se regimbait sous le mors.
    « J’en viendrai à bout… tout comme de ma liberté. Tout me semble affaire de patience et, pour Mathilde de duplicité. »
    *
    Assise sur une sambue (427) d’ivoire ciselé, ornée d’incrustations d’or, Mathilde montait d’un seul côté de sa haquenée blanche, les jambes repliées sur le flanc senestre de l’animal, sans souci que sa robe fut retroussée plus haut qu’il n’était décent, même dans l’ombre clairsemée des grands arbres.
    Tristan n’osait trop regarder ces jambes nues, laiteuses, aux pieds chaussés d’escarpins de cuir noir, de crainte d’être interrogé sur ce qu’il fallait bien appeler leur noblesse. Elles étaient longues, solides et lisses puisque Mathilde en arrachait les poils à la cire. Ses genoux aux soyeux renflements avaient la pureté de l’albâtre. Seul un grain de beauté gros comme un hanneton déparait l’intérieur de la cuisse dextre. S’il y passait sa main, Mathilde exhalait une plainte. On eût dit qu’elle craignait qu’il le lui arrachât. Il refusait d’obtempérer quand elle gémissait « Mordille-le, j’en aurai plaisir. » En fait, elle le portait comme un secret ornement. Il advenait, quand elle se lassait d’autres tâtonnements, qu’elle le caressât elle-même.
    – Tu regardes quoi ? dit-elle, le visage penché, le menton collé à l’épaule. Mes jambes ou la lormerie 59 d’Aiglentine ?
    – Toutes à la fois… Ce sont là parures princières.
    – Serait-ce que je commence à t’amourer 60  ?
    Tristan s’inclina pour éviter de heurter du front une branche, transformant ainsi en approbation un simple mouvement de prudence. Mathilde se méprit et sourit amplement. Droite et même cambrée, elle soutenait du mors Aiglentine et si la jument blanche humait l’air printanier à pleins naseaux, elle semblait l’imiter, levant le nez très haut pour s’emplir profondément les narines.
    Ils allaient l’amble, côte à côte, alors que Tristan eût aimé partir au grand galop sur son roncin noir de forte taille, vers les forêts du ponant dont il avait entrevu, du donjon de Montaigny, les sombres crêpelures.
    – Comment s’appelle ce cheval ?
    – Malaquin, parce qu’il est pareil à un roi d’Afrique.
    –  C’est le soudan d’un livre que j’ai lu : Milles et Amys.
    –  Je ne sais pas lire… ou si peu. Tu m’apprendras ? Autant il eût aimé initier Oriabel à la lecture, autant l’apprendre à Mathilde lui paraissait un surcroît de servitude.
    – Bien sûr, dit-il.
    – Je m’assiérai sur tes genoux. Il vit la scène et soupira. Puis, avec moins de courroux qu’il n’en éprouvait :
    – Ton Panazol m’a donné Malaquin parce qu’il est sournois et rétif. J’ai bien fait de le

Weitere Kostenlose Bücher