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Le Pré-aux-Clercs

Titel: Le Pré-aux-Clercs Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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n’était pas possible. Ces yeux si limpides ne pouvaient pas mentir. D’ailleurs, la loyauté éclatait sur tous les traits de cet adorable visage. Il eût fallu être aveugle pour ne pas le voir. Et Dieu merci, il avait de bons yeux. Il se sentit l’âme noyée de bonheur et il lui fallut faire un grand effort pour ne pas laisser éclater la joie puissante que lui causait cet aveu. Et d’une voix qui tremblait.
    « Un jour ou l’autre, dit-il, l’amour viendra frapper à la porte de votre cœur.
    – Je l’espère bien, fit-elle en riant. Et comme mon cœur n’est pas un cœur de marbre, la porte s’ouvrira toute grande.
    – Et, dit-il, en masquant sous un air dégagé l’appréhension que lui causait cette perspective, du même coup s’ouvrira pour l’heureux favorisé, la porte de ce logis dans lequel jamais un homme n’a pénétré.
    – Mon Dieu, oui !… Vous ne voudriez pas que je fusse si cruelle que de le laisser dehors ! »
    Elle vit la contraction douloureuse de ses traits. Elle ajouta, de son petit air sérieux :
    « Seulement, la porte du logis ne s’ouvrira pas avant que certaine formalité à laquelle je tiens essentiellement – j’ai de ces idées-là, moi – ne soit accomplie.
    – Quelle formalité ? fit-il machinalement.
    – Peu de chose : une visite au curé de ma paroisse, qui nous unira chrétiennement, l’heureux favorisé, pour parler le même langage que vous, et moi. Pour tout dire, monsieur, la porte du logis ne s’ouvrira que devant mon époux. »
    Il y eut un silence entre eux. Chacun d’eux poursuivait son rêve. Ce fut Ferrière qui rompit le silence :
    « Ainsi, dit-il, en redressant la tête, celui qui voudra vous parler d’amour, quel qu’il soit, devra tout d’abord passer à votre doigt l’anneau des fiançailles ? »
    Elle vit que son attitude s’était modifiée : il ne badinait plus maintenant, il était très sérieux. Elle se fit aussi sérieuse que lui pour répondre :
    « Oui. »
    Et elle s’expliqua :
    « Vous m’avez dit tout à l’heure que j’avais des idées étranges. Et c’est vrai. Parmi ces idées en voici une notamment : je me demande, monsieur, pourquoi une fille de rien, comme moi, n’aurait pas sa dignité qu’elle place au-dessus de tout… tout comme une grande dame a son honneur ?
    – Mais, fit-il vivement, je ne trouve pas cette idée-là étrange. Je la trouve honorable, tout simplement. »
    Elle approuva d’un léger signe de tête, et reprit :
    « C’est parce que j’ai le respect de moi-même que j’ai décidé que nul ne pourra sans mentir, se flatter d’avoir été l’amant de Fiorinda… Et je tiens toujours ce que je me suis promis à moi-même.
    – Le mariage !… l’indissoluble union !… »
    Ferrière avait murmuré ces mots d’une voix à peine perceptible. Elle les entendit. De toute évidence, il avait parlé pour lui-même, poursuivant un débat intérieur. Elle le comprit. Et néanmoins elle voulut répondre. Elle se leva et de sa voix harmonieuse :
    « Si le don de son cœur est sincère, il me semble qu’il doit être éternel. Je n’admets pas qu’on reprenne ce qu’on a librement donné. Je pense que dès lors l’union doit être éternelle aussi. C’est pourquoi j’invoque le mariage. Pour moi, amour veut dire constance immuable, fidélité jusque par-delà la tombe. Si j’aime un jour, c’est ainsi que j’aimerai… et c’est ainsi que j’entends être aimée.
    – Et s’il vous arrive d’être trahie ? » fit-il, en se levant, lui aussi.
    Elle pâlit et ferma les yeux.
    « Je mourrai », dit-elle simplement.
    Il se courba très bas et d’une voix douce comme une caresse :
    « Vous venez de me dire des choses auxquelles je n’avais jamais songé, je l’avoue… Des choses auxquelles je ne réponds pas, pour l’instant, parce que je me sens trop troublé… Plus tard, peut-être, je vous dirai… Je m’éloigne, madame et je ne sais si je vous reverrai jamais… mais ce que je sais bien, ce que je vous supplie de croire, c’est que j’emporte la conviction que nulle femme au monde n’est plus digne de respect que vous. »
    Il se courba une dernière fois et partit d’un pas allongé, droit devant lui, sans savoir certainement par où il passait ni où il allait.
    Elle le regarda s’éloigner, l’air pensif, accablée par une pesante tristesse qui venait de fondre brusquement sur elle. Et elle songeait :
    « Pauvre

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