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Le Pré-aux-Clercs

Titel: Le Pré-aux-Clercs Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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garçon ! Il est plus troublé certes qu’il n’a bien voulu en convenir… Après ce que je viens de lui dire, il est certain que je ne le reverrai jamais… Eh bien, quoi, n’est-ce pas ce que j’ai voulu ?… Vais-je éprouver du chagrin pour une chose qu’il ne dépendait que de moi d’éviter ? »
    Elle secoua la tête d’un air résolu, frappa le sol de son pied mutin. Une larme étincelante comme un pur diamant jaillit de ses longs cils et vint lentement s’évaporer au feu de ses joues… Mais elle souriait bravement tandis qu’elle disait en elle-même :
    « Eh bien, non ! les choses sont bien ainsi. Ce que j’ai fait, il fallait le faire… et si c’était à refaire, je recommencerais. Je suis bien sûre maintenant, si le hasard nous met de nouveau en face à face, qu’il n’osera jamais effleurer ce sujet… que jamais plus l’idée ne lui viendra de me faire des propositions que j’ai bien cru un instant qu’il allait me faire. Qu’il demeure à tout jamais un indifférent pour moi. J’aime encore mieux cela que d’avoir à le mépriser… Allons, n’y pensons plus. »

XII – ET CE QUI SE PASSA SOUS LE MÊME ORME DE SAINT-GERVAIS
    À ce moment, une voix menaçante gronda derrière elle :
    « Je t’y prends enfin ! »
    Elle se retourna vivement, comme si quelque bête venimeuse venait de la mordre au talon. Et elle se trouva face à face avec Rospignac.
    Le pied droit posé sur le banc de pierre, le buste penché en avant, le coude sur le genou, le poing gauche sur la hanche, le baron la fixait insolemment, avec un rictus inquiétant. Il était livide. La colère, une colère froide, effrayante, le faisait trembler comme une feuille au vent, contractait ses traits, striait ses yeux gris clair. Et ce visage de trop joli garçon dont il était si fier, convulsé par la rage, apparaissait alors sinistre et repoussant comme un masque de cauchemar.
    Un inappréciable instant, ils se regardèrent tous les deux droit dans les yeux. Et, à la vue de ce masque épouvantable, elle sentit un frisson de terreur la saisir à la nuque.
    D’une voix que la fureur jalouse rendait bégayante, il ajouta :
    « On entend des choses vraiment intéressantes sous l’orme de Saint-Gervais. »
    Redressée dans une attitude de souverain mépris, elle cingla :
    « J’ai toujours pensé qu’il y avait du sbire, de l’espion en vous… Je vois que je ne m’étais pas trompée. »
    Elle détourna dédaigneusement le dos et fit deux pas dans la direction de la rue du Monceau.
    Ce fut tout ce qu’elle put faire. Il se porta vivement en avant, allongea le bras et abattit sa main sur son épaule. Et sous l’étreinte de fer de cette main fine et blanche, elle se trouva clouée sur place. En même temps, il grinçait :
    « Minute, la belle, j’ai à te causer, moi !
    – Lâche !…
    – Lâche, sbire, espion, assassin, tout ce que tu voudras et peu m’importent les injures… Je tiens et, que tu le veuilles ou non, tu m’entendras. Tudieu ! tu n’as peur de rien, toi !… Il te faut deux amants à la fois !… Et quels amants ! La fine fleur de la noblesse : un comte et un vicomte, peste !… Il est vrai que celui-là n’est pas ton amant… non, tu vises plus haut ! C’est le mariage qu’il te faut avec celui-là… Car tu sais, j’étais là, derrière vous, on est espion ou ne l’est pas, que diable ! Et je n’ai pas perdu un mot de cet entretien si tendre… et si intéressé. Ah ! Tu peux te vanter d’être une fine comédienne, toi !… C’est merveille vraiment de t’entendre parler de ta dignité de coureuses des rues… une dignité à qui il faut un titre de comtesse, diable ! C’est quelque chose, et tu me parais priser ta marchandise à un assez haut prix… Et ce sermon sur la constance et la fidélité !… Jusque par-delà la tombe, surtout, m’a beaucoup plu. Ma parole, c’est à crever de rire !… Et ce grand niais de Ferrière qui écoute cela… et de quel air, le sot, l’imbécile !… Sais-tu qu’il est assez bête pour t’épouser !… Eh bien, mais, et ton bien-aimé comte de Louvre, qu’en feras-tu, en ce cas ?… Tu le garderas pour amant… pardieu ! C’est tout indiqué !… »
    Vainement elle s’était débattue, avait essayé de lui imposer le silence. L’ignoble flot d’injures s’arrêta de lui-même : il était à bout de souffle. Elle en profita pour lancer :
    « Laissez-moi !… Laissez-moi, ou

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