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Le prince des ténèbres

Le prince des ténèbres

Titel: Le prince des ténèbres Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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taverne, quel hors-la-loi un peu sensé viendrait se réfugier dans un bois entouré d’un côté par un palais royal et de l’autre par un prieuré plein de grandes dames ? Sans parler du bourg et des fermes ! Il y a des tas de forêts plus profondes où se cacher !
    Corbett embrassa du regard la clairière où régnait un étrange silence.
    — Si seulement les feuilles de ces arbres pouvaient se transformer en langues, chuchota-t-il, quels récits ne feraient-elles pas !
    Un frisson saisit Ranulf.
    — Un endroit où se reposer, murmura Corbett, mais peut-être pas où mourir.
    — Je ne sais pas, avança son serviteur en blêmissant. J’ai connu un vieux marin, natif de Gravesend, autrefois. Il m’a raconté que lors d’un de ses voyages, il était passé près d’une île flottante, habitée par une foule de forgerons démoniaques qui martelaient et forgeaient les âmes damnées des assassins.
    Il hocha la tête.
    — Je pense que cet endroit s’y prête mieux que n’importe quelle île.
    Il dévisagea Corbett.
    — Je n’aime pas cela du tout, mon maître. Ça pue la mort !
    — Alors, ami portier, déclara Corbett, il ne nous reste qu’à rentrer.
    Ils regagnèrent le sentier et Corbett renvoya l’homme. Puis lui et Ranulf, plus calme à présent, s’assirent sur un tronc d’arbre à l’orée de la forêt.
    — Qu’avons-nous ? marmonna Corbett dès que le portier fut hors de portée de voix. Deux voyageurs attirés dans un guet-apens et assassinés dans cette clairière par des bandits ?
    Il hocha la tête, sceptique.
    — C’est le portier qui a raison. L’explication de Dame Catherine ne tient pas. Aucun brigand n’oserait rôder si près d’un palais royal et d’un important prieuré.
    Ranulf rota bruyamment et s’excusa, ajoutant :
    — Je suis d’accord. En outre, aucun hors-la-loi ne dépouillerait des cadavres aussi méticuleusement : les bijoux et l’argent, oui, les chevaux et les harnais peut-être, mais pas de la façon décrite par le portier. Et nul bandit, conclut-il, ne prendrait la peine de dissimuler les corps. Il s’emparerait de son bien mal acquis et s’enfuirait tout de suite.
    Corbett se frotta le menton.
    — L’affaire devient de plus en plus énigmatique. Pourquoi les tuer, Ranulf ? Pourquoi ne pas se contenter de les dévaliser et de décamper ? L’assassin a pris leurs biens, leurs chevaux, puis les a jetés nus dans la morasse, mais, contrairement à ce qu’il escomptait, les corps n’ont pas complètement disparu. C’est presque, réfléchit Corbett à haute voix, comme s’il avait voulu cacher l’identité de ses victimes.
    Le clerc se mordilla les lèvres.
    — Il y a d’autres points obscurs. Les deux voyageurs étaient apparemment des étrangers au pays. En ce cas, comment connaissaient-ils l’existence de cette sente menant à la clairière, là où il y a de l’eau pour se rafraîchir ? Et qui aurait assez de force pour venir à bout d’un jeune homme ainsi que d’une damoiselle que l’on peut supposer en bonne santé ?
    — Qu’en déduisez-vous, Messire ?
    — Eh bien, que c’est par traîtrise qu’on les a attirés dans ce piège mortel. On les a amenés dans cette clairière pour les y massacrer. Et pourquoi, dit Corbett avec un brusque ricanement, se sont-ils contentés de tendre leur gorge au meurtrier ?
    Il se tourna vers Ranulf.
    — Tu y comprends quelque chose, toi ?
    — Non, je me pose les mêmes questions. Qui étaient-ils ? Où allaient-ils ? Pas au prieuré, puisqu’on ne les attendait pas.
    Ranulf souffla bruyamment.
    — Et comme vous le dites, mon maître, comment les a-t-on entraînés dans ce traquenard et pourquoi se sont-ils si facilement laissé tuer ?
    Corbett bondit sur ses pieds et balaya d’un revers de main la mousse accrochée à ses vêtements.
    — Une énigme au coeur d’une autre énigme ! murmura-t-il. Mais je t’assure, Ranulf, que, bien que n’ayant aucun début de preuve, je suis convaincu que leur mort est liée à l’assassinat de Lady Aliénor Belmont.
    Ranulf fixait toujours le sol.
    — Messire ?
    — Oui ?
    — Dame Catherine et le portier ont dit que ces cadavres avaient été retrouvés dans le bois situé entre le prieuré et le palais. Le meurtrier pourrait-il habiter l’un ou l’autre ?
    Corbett fit un geste évasif.
    — Ce serait difficile à prouver. Comme l’a dit le portier, les cadavres pouvaient être là depuis des jours, voire

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