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Le prince des ténèbres

Le prince des ténèbres

Titel: Le prince des ténèbres Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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Godstowe ?
    — Je l’ignore ! répliqua Couville. Soyez logique, Hugh ! Le seul fait qu’on l’y ait découvert ne signifie nullement qu’il ait un rapport avec les crimes sur lesquels vous enquêtez.
    — Mais il doit pourtant y en avoir un ! se récria Corbett à voix basse.
    Son interlocuteur lui posa la main sur l’épaule.
    — Hugh, Dieu seul sait d’où provient ce collier. Après la défaite de Montfort, les biens confisqués aux rebelles ont inondé les étals des marchés.
    Corbett se frotta le visage d’un air las.
    — Dites-moi, Nigel, une jeune femme et son compagnon sont retrouvés, sauvagement assassinés, dans une clairière de l’Oxfordshire. Rien ne permet de les identifier. Personne ne vient réclamer les corps. Personne n’envoie de lettres ni n’entreprend de recherches. Ils sont victimes d’un crime atroce et pourtant leur mort n’engendre que le silence.
    Couville haussa les épaules.
    — Promenez-vous dans les ruelles de Londres, Hugh ! Vous y trouverez les cadavres de nombreux pauvres dont nul ne se soucie.
    — Mais justement ! Ceux-là étaient des gens nantis, bien nourris, accoutumés au luxe. D’où venaient-ils ?
    — D’au-delà des mers, sans doute ! suggéra Couville avec un petit sourire.
    L’oeil fixé sur son vieux mentor, Corbett réfléchit. Oui, c’était bien là l’explication ! Le père Reynard n’avait-il pas remarqué leur teint mat ? Des étrangers, alors ?
    — Si c’était des étrangers, exposa-t-il lentement, il leur a fallu obtenir une autorisation royale pour pénétrer en Angleterre. Serait-il difficile de retrouver ce document ?
    — Oh, oui ! D’abord, des centaines d’étrangers viennent en Angleterre tous les mois. Ensuite, en admettant qu’on leur ait délivré une autorisation, on ne m’en a pas forcément adressé la copie.
    Corbett se gratta la tête d’un air penaud.
    — Ce que j’ai découvert n’éclaire guère ma lanterne.
    Il ramassa sa cape qu’il avait laissée tomber à terre.
    — Mais trêve de plaisanteries ! Je suis dépositaire des secrets du roi, comme vous ne l’ignorez pas, et je reconnais que vous ne recevez pas les copies des lettres que j’envoie, ni celles des comptes rendus que me font parvenir mes espions.
    Il agrafa sa cape.
    — Parfois je suis fier de jouir de la confiance de notre souverain, mais je dois admettre qu’il a l’esprit rusé et retors. Il m’a confié un jour que si sa main droite savait ce que faisait la gauche, il n’hésiterait pas à la trancher !
    — Que voulez-vous savoir, Hugh ?
    — Je connais tous les agents du roi, qu’ils travaillent à la cour de Castille ou au Saint-Siège. Mais y a-t-il quelqu’un d’autre ?
    Couville eut un geste d’impuissance.
    — Vous êtes orgueilleux, Hugh, et l’orgueil paralyse le bon usage de la logique. Vous savez bien qu’il existe des agents qui dépendent directement du roi. Le comte de Surrey, par exemple. Et d’autres, certainement.
    — Nigel, toutes les dépenses de la cassette royale vous sont communiquées. Avez-vous jamais noté un nom particulier ?
    Couville écarquilla les yeux, en mimant la stupéfaction.
    — Un autre Corbett ? Bien sûr que non !
    Il reprit son sérieux :
    — Un nom a retenu mon attention, pourtant : un certain Courcy à qui l’on envoyait des gages…
    — Qui est-ce ?
    — Je l’ignore. Tout ce que j’ai vu, ce sont des références de temps à autre, des fonds expédiés «  pro secretis expensis in negotio régis » .
    — Pour dépenses secrètes au service du roi, traduisit Corbett, furieux devant la duplicité de son souverain et maître.
    Il prit la main de son vieil ami.
    — Je vous remercie, Nigel. Viendrez-vous à Leighton un de ces jours ?
    Couville lui sourit :
    — Pour voir Maeve, bien sûr !
    Corbett retrouva ses serviteurs qui, ayant quitté l’échoppe pour la taverne la plus proche, arboraient un air de béate satisfaction après des heures de beuverie. Ils le fustigèrent du regard lorsque, fort de sa sobriété, il leur ordonna sèchement de laisser là leur bière et de rejoindre King’s Steps sous la pluie battante, pour entreprendre un autre voyage pénible sur la Tamise. Lorsqu’ils atteignirent le pont de Londres, Maltote et Ranulf avaient déjà rendu tripes et boyaux et durent passer la moitié du trajet à subir les quolibets impitoyables des passeurs goguenards.
    Les trois hommes débarquèrent et ne quittèrent

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