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Le Prince Que Voilà

Le Prince Que Voilà

Titel: Le Prince Que Voilà Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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de dire toute la vérité de l’affaire à
mes compagnons bateliers du quai au Foin et me donnant cinq écus pour les
régaler en son nom et au nom de notre souverain naturel et légitime, le Roi
Henri III, priant Dieu et la Benoîte Vierge qu’ils nous gardassent tous en
leur sainte garde. »
    Oyant cela, le batelier se jeta à
mes pieds et, me baisant les mains, me quit un bon milliasse de pardons et
m’assura qu’il serait à l’avenir si reconnaissant et affectionné à ma personne
que je n’aurais jamais, lui vivant, à me repentir de ma bénignité. Disant cela,
d’un bout à l’autre de son énorme corps, il tremblait comme feuille de peuplier
à la bise, lui qui l’instant d’avant s’était offert à la pointe de Miroul sans
battre un cil en sa fruste vaillance.
    — Mérigot, je m’en vais
présentement dans mes terres, dis-je, mais à mon retour, je te ferai quérir par
mon Miroul, lequel est mon secrétaire (Miroul rougit de bonheur à m’ouïr lui
donner ce titre) afin que tu me dises ce qu’il en est de ta vie. Que si
cependant mon méchant cousin te vient relancer quai au Foin…
    — Je le foutrai cul par-dessus
tête en Seine, dit Mérigot en brandissant les poings.
    — Sans toutefois le noyer,
dis-je. Signe là, Mérigot, si tu sais écrire.
    — Mon nom du moins, dit Mérigot
qui en sua de grosses gouttes, la plume d’oie pesant plus lourd en sa patte
qu’un aviron de frêne.
    Miroul, après avoir éteint la mèche
de l’arquebuse (laquelle, si elle eût brûlé en la rue, eût pu donner quelque
humeur ou frayeur à notre voisinage) s’en saisit, et Giacomi prit, à saillir de
l’Aiguillerie, la bride du cheval, et mes deux compagnons portant à eux deux
toute la picorée de cette grande bataille, je laissai partir mon prisonnier
sans armes ni bagues, mais fort content d’avoir gardé son cou de la hart, ou
les tripes de son gros corps des navrures de nos épées.
    En mon logis, dès que j’eus couru
donner une forte brassée à Angelina et à mes beaux enfants, je laissai Giacomi
s’entretenir avec Madame mon épouse de sa sœur jumelle et des espérances
qu’elle avait en lui réveillées et m’enfermai avec Miroul dans le petit cabinet
d’en bas – celui-là même où j’avais reçu Mosca – pour poursuivre mes
écritures.
    — Miroul, dis-je, m’appuyant à
la table en face de lui, puisque te voilà mon secrétaire, il te faut écrire la
lettre que je te vais dicter.
    — Ha Moussu ! dit-il,
l’orthographe va y perdre prou. La mienne n’est pas tant bonne que la vôtre.
    — Mais la tienne est meilleure
que celle de la Reine-mère. Écris, Miroul, sans tant languir. Et de prime,
l’adresse !
     
    à Madame de La Vasselière
    Hôtel de Montpensier
    Paris.
     
    — Tiens donc, dit Miroul.
Est-ce celle que je crois ?
    — Ou dont tu as se peut ouï le
nom dans la chapelle, l’oreille collée à ce rideau ?
    — Nosse velint omnes,
mercedem solvere nemo [35] dit Miroul qui aimait se remparer de
citations en ses moments d’embarras. Ainsi de moi, avec votre permission,
Monsieur.
    — Permission accordée. Écris,
Miroul.
     
    « Madame,
    « Encore que vous m’ayez à
Mâcon dagué un valet, j’ai bien voulu passer barguin avec vous et tant promis,
tant tenu, je vous ai rendue à la liberté dont vous usâtes incontinent pour me
rober un cheval de cinq cents écus au nez de mon autre valet…»
    — Au nez de mon secrétaire dit
Miroul.
    — « Au nez de mon
secrétaire. Et ce jour redoublant vos outrages, vous attentâtes de me faire
arquebuser par un guillaume, lequel, par bonne heure pour moi, aguignait trop
ses devants et pas assez ses arrières. Ce qui fait qu’il fut pris. Mes gens le
voulaient dépêcher…»
    — Moussu, que pensez-vous
de : « Mon secrétaire, en son ire, le voulait dépêcher » ?
    — Si tu veux. « Mais je ne
consentis point à sa volonté, n’ayant pas le cœur de verser le sang d’un
chrétien, et d’un autre côtel, ne le voulant point remettre ès poing du prévôt,
à qui il eût pu jaser de tel ou tel, et se peut d’un majordome de votre maison.
Je l’ai donc renvoyé à ses bateaux. Cependant, Madame, je garde sa monture en
compensation du cheval qu’on me roba à Mâcon…»
    — Voilà qui est chié
chanté ! dit Miroul.
    — « Et je conserve son
arquebuse pour l’amour de vous. » À la ligne « J’ose dire, Madame,
que j’eusse trouvé piquant d’être occis par vos soins le

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