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Le Prisonnier de Trafalgar

Le Prisonnier de Trafalgar

Titel: Le Prisonnier de Trafalgar Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Escarpit
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héroïque de la Belle de Lormont.  
    —  Je suis content pour eux, dit-il. C’étaient de vrais marins.  
    Quant à lui, il avait participé à la bataille du cap Saint-Vincent en 1797, puis à celle d’Aboukir en 1798. La plus grande partie de sa carrière s’était déroulée en Méditerranée. Il avait été blessé deux fois légèrement et un certain nombre de prises heureuses lui avaient assuré une honnête aisance.  
    — Cela dit, sans minimiser mon mérite personnel, je ne me cache pas que je dois ma promotion rapide à l’influence de mon oncle, Sir Hew Dalrymple, qui vient de prendre le commandement à Gibraltar. Et toi ? Tu ne vas tout de même pas aller pourrir dans les pontons ?  
    — A moins que tu ne me fasses pendre, je ne vois pas ce que je pourrais faire d’autre.  
    — Je suppose qu’il est inutile que je te propose de t’enrôler dans la marine anglaise. Je ferais rapidement de toi un premier maître.  
    Hazembat tira sa cocarde de dessous sa chemise.  
    — Tu te souviens ?  
    — Je me souviens de la fille qui t’a remis cette cocarde au cou, à Pointe-à-Pitre, quand tu m’as tiré des griffes de cet affreux tyranneau jacobin qui voulait m’arrêter. Tu l’as revue ?  
    — Oui. Elle est morte en se battant pour la liberté de la Guadeloupe.  
    — Ce n’est pas nous, les Anglais, qui avons attenté à cette liberté. C’est votre Bonaparte.  
    — Malheureusement, il a conservé ce drapeau contre lequel je ne pourrai jamais me battre.  
    — Je te comprends, mais tu me mets dans un cruel embarras. J’avais décidé de confirmer la décision du vieux Bentley de vous pendre, toi et ton compère. Les dépôts de ravitaillement que nous avons établis le long des côtes françaises et italiennes doivent rester un secret absolu. Une évasion ferait tout découvrir par la police de Boney et, alors, je ne donne pas cher de la peau des Français qui collaborent avec nous.  
    — Ce sont des traîtres.  
    — Peut-être, mais ne crois pas que tous les Anglais désirent voir revenir les Bourbons et leur monarchie absolue sur le trône de France et que tous les Français qui les aident sont des contre-révolutionnaires. Tu as reconnu l’officier qui me sert d’interprète ?  
    — Son visage me dit quelque chose.  
    — Il était enseigne sur la Belle de Lormont et il se faisait appeler Ducasse.  
    — Je me souviens. C’était un émigré, comme Béthencourt.  
    — Il était marquis avant la Révolution, mais il a renoncé à son titre et il partage plutôt les idées de La Fayette.  
    — Qu’est-ce qu’il est devenu, celui-là ?  
    — Il est en France, mais il ne s’est pas rallié à Bonaparte. Il est partisan d’une monarchie parlementaire à l’anglaise ou d’une république à l’américaine. Tu veux que j’appelle Ducasse ? Il te reconnaîtra.  
    — J’aime mieux pas. Il porte un uniforme anglais.  
    — Tête de mule ! Qu’est-ce que je vais faire de toi ?  
    — Pends-moi.  
    — Il n’en est pas question. Tu m’as sauvé la vie quand je suis tombé du mât d’artimon, tu te souviens ? Ecoute, je vais faire pendre l’autre et laisser entendre que tu m’as fourni des renseignements très importants.  
    D’un bond, Hazembat se leva, renversant le verre qui se brisa.  
    — Non ! C’est moi qui ai eu l’idée de l’évasion. Si quelqu’un doit être pendu, c’est moi !  
    — Alors, il n’y a qu’une solution : le fouet pour tous les deux.  
    — Le fouet si tu veux.  
    — Je ne pourrai pas vous en tirer à moins de deux douzaines chacun.  
    — Va pour deux douzaines. Et ensuite, si j’y survis, laisse-moi repartir sur le Charon.  
    Sven était blême. Un instant, Hazembat le vit qui reprenait son masque de commandant impassible et implacable, mais il devinait, en dessous, la torture et le désespoir. Spontanément, il lui prit les mains.  
    — Sven, il ne faut pas que tu t’en veuilles ! Même si tu dois m’arracher le dos, notre amitié n’en souffrira pas. Souviens-toi de ce que tu m’as dit en me quittant à Baltimore : c’est la guerre et elle ne durera pas toujours.  
    Ils s’étreignirent silencieusement. Le visage de Sven était baigné de larmes et, pour la première fois de sa vie, Hazembat se sentit lui-même pleurer.  
    L’accolade ne dura qu’un instant. Hazembat recula d’un pas, se mit au garde-à-vous, salua et dit :  
    —  Ready for

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