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Le prix de l'indépendance

Titel: Le prix de l'indépendance Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Diana Gabaldon
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route vers la porte de la citadelle. Le capitaine semblait plongé dans ses souvenirs et affichait une expression mi-amusée mi-méprisante. Au bout de quelques instants, il reprit :
    — Arnold aurait pu réussir. Il aurait pu prendre la ville. Sir Guy n’avait pratiquement pas de troupes. Si Arnold était arrivé au moment prévu, équipé de la poudre et des munitions nécessaires… l’histoire aurait été différente. Mais il n’a pas choisi l’homme qu’il fallait pour demander son chemin.
    — Que voulez-vous dire ?
    Randall-Isaacs parut soudain méfiant puis sembla se dire « Quelle importance ? ». Il était de bonne humeur, réjoui par la perspective d’un dîner chaud, d’un lit douillet et de draps propres après des semaines de campement dans des forêts sombres.
    — Il ne pouvait arriver par voie de terre, expliqua-t-il. Cherchant un moyen d’acheminer une armée et son équipement par bateaux, il se mit en quête d’un homme ayant déjà entrepris ce voyage dangereux et connaissant les rivières. Il en trouva un… Samuel Goodwin.
    Randall-Isaacs secoua la tête comme abasourdi par une telle naïveté.
    — Il ne lui est jamais venu à l’esprit que Goodwin pouvait être loyaliste. Goodwin est venu me trouver et m’a demandé ce qu’il devait faire. Alors je le lui ai dit. Il a donné ses cartes à Arnold, après les avoir soigneusement redessinées.
    Des cartes qui avaient porté leurs fruits. En modifiant les distances, en effaçant les repères, en indiquant des passages inexistants et en fournissant des cartes inventées de toutes pièces, M. Goodwin réussit à entraîner Arnold et son armée au plus profond d’une nature sauvage, les obligeant à porter leurs embarcations et leur équipement par voie de terre pendant des jours, les retardant jusqu’à ce que l’hiver les rattrape avant qu’ils ne parviennent enfin en vue de la ville de Québec.
    Randall-Isaacs se mit à rire ; un rire où William perçut pourtant une pointe de regret.
    — J’ai été stupéfié quand j’ai appris qu’il avait fini par arriver à bon port. Pour ne rien arranger, il avait été escroqué par les charpentiers qui avaient bâti ses navires. Je pense que c’était plus de l’incompétence de leur part qu’une volonté politique, quoique, de nos jours, les deux soient souvent indissociables. Les coques étaient en bois vert et mal ajustées. Plus de la moitié des embarcations se sont désintégrées et ont coulé quelques jours après avoir été mises à l’eau.
    Après une pause méditative, il ajouta :
    — Cela a dû être un enfer.
    Puis il se redressa sur sa selle.
    — Pourtant, ils l’ont suivi. Tous ses hommes. Seule une compagnie a fait demi-tour. Affamés, à moitié nus, transis de froid… ils l’ont suivi.
    Il lança un regard à William et lui demanda avec un sourire :
    — Vous pensez que vos hommes vous suivront, lieutenant ? Dans de telles conditions ?
    — J’espère avoir suffisamment de bon sens pour ne pas les entraîner dans un tel cauchemar. Qu’est-il arrivé à Arnold ? A-t-il été capturé ?
    — Non, répondit Randall-Isaacs, songeur.
    Il agita une main pour faire signe aux gardes de la porte de la citadelle, puis répéta :
    — Non, il n’a pas été fait prisonnier. Quant à ce qu’il mijote aujourd’hui, Dieu seul le sait. Dieu ou sir Guy. J’espère que ce dernier pourra nous le dire.

24
    Joyeux Noël !
    Londres, 24 décembre 1776
    La plupart des maquerelles prospères étaient corpulentes. Peut-être était-ce pour compenser les privations de leurs jeunes années, à moins que ce ne soit une armure contre le risque d’un retour aux échelons inférieurs de leur métier mais, de l’expérience de lord John, presque toutes étaient bien en chair.
    Sauf Nessie. Il distinguait sa silhouette maigrelette à travers la fine mousseline de sa chemise tandis qu’elle enfilait son peignoir japonais devant la cheminée (il l’avait tirée du lit sans le vouloir). Elle n’avait pas pris un gramme depuis leur rencontre. Elle avait alors quatorze ans, selon elle (il soupçonnait plutôt qu’elle n’en avait que onze).
    Elle devait avoir la trentaine aujourd’hui. Elle paraissait toujours avoir quatorze ans.
    Cela le fit sourire et elle lui sourit en retour tout en nouant sa cordelière. Du coup, elle parut plus vieille. Il lui manquait quelques dents et les restantes étaient noircies à la base. Si elle ne grossissait pas, cela n’était dû qu’à sa

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