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Le prix de l'indépendance

Titel: Le prix de l'indépendance Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Diana Gabaldon
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silence paisible.
    — Qu’il repose en paix, dis-je avec un peu de retard.
    Jamie sourit et posa une main sur la mienne, répétant en gaélique :
    — Fois shìorruidh thoir dha . Ce ne doit pas être facile pour un roi de se retrouver devant Dieu et de devoir justifier sonexistence… Tu imagines ? Devoir répondre de tous les êtres dont tu avais la charge ?
    — Parce que tu crois qu’il s’en souciait ?
    L’idée m’intriguait et me mettait légèrement mal à l’aise. Je n’avais pas connu Louis intimement, mis à part pour ce moment particulier qui, au fond, avait été moins intime qu’une poignée de main. Nos regards ne s’étaient même pas croisés. Toutefois, il ne m’avait pas paru particulièrement préoccupé par le bien-être de ses sujets.
    — Un homme peut-il vraiment être tenu responsable pour tout un royaume et non uniquement pour ses propres vétilles ?
    Il y réfléchit sérieusement, les doigts raides de sa main droite pianotant sur le bord du garde-corps.
    — Oui, répondit-il finalement. Tu es bien responsable de ta famille, non ? Imagine que tu aies maltraité tes enfants, que tu les aies abandonnés ou laissés mourir de faim… Cela pèserait lourd contre toi car tu en as reçu la charge. Quand tu es né roi, tu as la responsabilité de tes sujets. Si tu les traites mal, alors…
    — D’accord, mais il faut bien tirer la ligne quelque part, protestai-je. Suppose que tu aies bien traité une personne et mal une autre ? Suppose que les besoins de ceux dont tu as la charge soient contradictoires ? Que réponds-tu à ça ?
    Il sourit.
    — Je réponds que je suis bien content de ne pas être Dieu et de ne pas avoir à juger ce genre de choses.
    Je restai silencieuse un moment, imaginant Louis en présence de Dieu et tentant de lui expliquer ces dix minutes avec moi. J’étais sûre qu’il estimait avoir été dans son droit – les rois, après tout, étaient rois – mais d’un autre côté le septième et le dixième commandement étaient clairs sur ce sujet et aucune clause n’exemptait la royauté.
    Je demandai tout à coup :
    — Si tu étais au paradis, assistant à son jugement, tu lui pardonnerais ? Moi, oui.
    — A qui ? A Louis ?
    J’acquiesçai. Il plissa le front et se passa lentement l’index sur l’arête du nez.
    — Oui, je lui pardonnerais aussi, répondit-il enfin, mais pas avant qu’il ait souffert un peu. Un petit coup de fourche dans le cul ne lui ferait pas de mal.
    Je me mis à rire mais, avant que j’aie pu ajouter quelque chose, nous fûmes interrompus par le cri « Une voile ! Ohé ! » au-dessus de nos têtes. Alors que nous étions seuls sur le pont l’instant précédent, une armée de marins jaillit de toutes les écoutilles tels des charançons se jetant sur un biscuit, certains grimpant dans les gréements pour voir ce qui se passait.
    Je scrutai l’horizon mais ne vis rien. Ian, qui avait grimpé dans la mâture avec les autres, se laissa tomber sur le pont à côté de nous. Il semblait excité.
    — Un navire petit mais armé, expliqua-t-il à Jamie. Il bat pavillon britannique.
    Le capitaine Roberts était apparu à ma gauche et regardait dans son télescope, l’air sombre.
    — C’est un cotre de la marine, annonça-t-il. Merde !
    Jamie porta inconsciemment la main à sa ceinture, cherchant son coutelas, et regarda par-dessus l’épaule du capitaine, plissant les yeux contre le vent. Je pouvais maintenant distinguer la voile qui grossissait rapidement à tribord.
    — On ne peut pas le semer, capitaine ?
    Le second venait de se joindre à notre groupe, observant le bateau en approche. Il y avait bien des canons à bord – j’en comptai six – et des hommes derrière.
    Le capitaine réfléchit, pliant et dépliant machinalement son télescope, puis il leva les yeux vers la mâture, évaluant nos chances de distancer l’autre navire en mettant toutes voiles dehors. Le grand mât était fissuré ; il avait prévu de le remplacer à New Haven.
    — Non, répondit-il enfin. La pression sur le mât serait trop forte ; il ne tiendra pas.
    Il replia son télescope d’un coup sec, le rangea dans sa poche, et conclut :
    — Il va falloir y aller au culot.
    Je me demandai quel pourcentage de sa cargaison était constitué de contrebande. Son visage taciturne ne trahissait rien mais on percevait un certain malaise parmi les marins,un malaise qui s’accentua à mesure que l’autre navire se préparait à accoster, hélant le

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