Le prix de l'indépendance
libérai. Le tenant comme une petite batte de base-ball, je pris mon élan et l’abattis de toutes mes forces sur la tête de l’homme dont j’avais entaillé le visage. Le cabillot rebondit sur son crâne avec un son creux et il partit à la renverse, allant percuter le mât.
A ce stade, le timonier décida qu’il en avait assez. Abandonnant sa barre, il s’extirpa de son poste de travail et se dirigea vers moi tel un singe enragé, agitant ses longs bras et montrant les dents. J’essayai de le frapper avec le cabillot mais je perdis ma prise et il m’échappa des mains, roulant sur le pont tandis que le timonier se jetait sur moi.
Il était petit et mince mais son poids m’emporta et nous nous écrasâmes contre le bastingage. L’impact me coupa le souffle et une douleur vive me vrilla les reins. Je tentai de me laisser glisser sous lui mais il m’accompagna dans ma descente, cherchant ma gorge. Je me débattis de mon mieux, le frappant à la tête, les os de son crâne me faisant mal aux mains.
Je n’entendais plus rien que des jurons essoufflés qui pouvaient être les siens comme les miens, puis il parvint à percer mes défenses et ses mains se refermèrent sur mon cou, ses pouces s’enfonçant profondément sous ma mâchoire inférieure.
La douleur était insoutenable. J’essayai de lui envoyer un coup de genou mais mes jambes étaient empêtrées dans mes jupes et coincées sous les siennes. Ma vision s’assombrit ; de petits éclairs d’or jaillissaient dans les ténèbres, de minuscules feux d’artifice annonciateurs de mort. Quelqu’un poussait des gémissements plaintifs et je me rendis vaguement compte quec’était moi. L’étau sur mon cou se resserra encore, les éclats de lumière s’estompèrent, cédant la place au noir absolu.
Je me réveillai avec le sentiment confus d’être à la fois terrifiée et doucement bercée. Ma gorge me faisait mal. Je tentai de déglutir et m’étranglai.
— Tout va bien, Sassenach .
La voix de Jamie provenait de quelque part dans la pénombre. Où étais-je ? Puis sa main pressa mon avant-bras.
— Si… tu… le… dis, croassai-je.
L’effort me fit larmoyer. Je toussai puis fis une nouvelle tentative :
— Que… ?
— Bois un peu, a nighean .
Une grande main souleva doucement ma nuque et je sentis le goulot d’une gourde contre mes lèvres. Avaler était douloureux mais peu m’importait. Ma bouche et ma gorge étaient desséchées et remplies d’un goût de sel.
Mes yeux commençaient à s’accoutumer à l’obscurité. Je distinguai la silhouette de Jamie, voûtée sous un plafond bas, ainsi que des chevrons… non, des poutres. Il y avait une forte odeur de goudron et de sentine. Un bateau. Bien sûr ! Nous étions sur un bateau. Mais lequel ?
— Où… ? murmurai-je.
— Je n’en ai pas la moindre idée, répondit-il d’un ton irrité. Les hommes du Teal manœuvrent les voiles… enfin, je l’espère… et Ian a un pistolet appuyé sur la tempe d’un membre de la marine royale qui dirige le gouvernail même si, pour autant que je sache, il pourrait nous conduire droit vers le large.
— Je… voulais… dire… quel… navire.
Cependant, à sa remarque il était clair que nous étions sur le cotre de la marine.
— Ah, ils ont dit qu’il s’appelait le Pitt 8 .
— Quel nom bien choisi !
Je regardai dans la pénombre trouble autour de moi et mon cœur fit un bond en apercevant une sorte d’énorme paquet capitonné flottant dans l’air à quelques pas de Jamie. Je me redressai brusquement, ou du moins tentai de le faire, me rendant compte au dernier instant que je me trouvais dans un hamac.
Avec un cri d’alarme, Jamie me retint par la taille avant que je ne tombe tête la première. Je me raccrochai à lui, comprenant que ce que j’avais pris pour un immense cocon était un homme saucissonné et bâillonné dans un autre hamac suspendu aux poutres. Son visage était écrasé contre les mailles et il me fixait d’un regard assassin.
— Putain de bordel de… haletai-je.
— Tu veux te reposer un peu, Sassenach , ou tu préfères que je t’aide à te lever ?
Jamie paraissait nerveux.
— Je ne veux pas laisser Ian seul trop longtemps.
— Non, aide-moi à descendre de là.
Non contente de tanguer, la cabine tournoyait autour de moi et je dus me tenir à Jamie un moment, les yeux fermés, en attendant que mon gyroscope interne reprenne le dessus.
— Le capitaine Roberts ? demandai-je. Le Teal
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