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Le prix de l'indépendance

Titel: Le prix de l'indépendance Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Diana Gabaldon
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bière fraîchement brassée dans le garde-manger et Bobby était allé chercher notre fût de whisky de secours caché dans la grange. Je soulevai la main de Jamie et déposai un baiser sur ses doigts froids. L’hébétude provoquée par le drame commençait à s’estomper, peu à peu dissipée par les pulsations vitales derrière nous. La cabane était un îlot vibrant de vie flottant dans la nuit noir et blanc.
    Jamie sembla avoir lu dans mes pensées.
    — « Aucun homme n’est une île, un tout complet en soi », récita-t-il doucement.
    — Oui, c’est déjà nettement plus approprié, dis-je un peu cyniquement. Un peu trop, même.
    — Que veux-tu dire ?
    — « N’envoie jamais demander pour qui sonne le glas : c’est pour toi qu’il sonne. » Je ne peux pas entendre « Aucun homme n’est une île » sans penser à la fin de la citation.
    — Mmphm. Tu connais le texte dans son intégralité ?
    Sans attendre ma réponse, il se pencha en avant, remua les braises avec une brindille et poursuivit :
    — Ce n’est pas vraiment un poème. En tout cas, son auteur ne l’entendait pas comme ça.
    — Ah bon ? Qu’a-t-il voulu écrire, alors ?
    — C’est une méditation… à mi-chemin entre un sermon et une prière. John Donne l’a écrite dans ses Méditations en temps de crise . On peut difficilement faire plus à propos, n’est-ce pas ?
    — En effet, pour ce qui est de la crise, nous nageons en plein dedans. Que dit-il d’autre dans sa méditation ?
    — Hmm…
    Il me serra contre lui et posa sa tête contre la mienne.
    — Laisse-moi essayer de me souvenir. Je ne me rappelle pas de tout mais certains passages m’ont marqué.
    Je l’entendais respirer lentement, se concentrer.
    — « Toute l’humanité n’est que d’un seul auteur et tient en un volume. Lorsqu’un homme meurt, on n’arrache pas un chapitre du livre mais on le traduit dans un langage meilleur ;et tous les chapitres doivent être ainsi traduits. » Viennent ensuite des passages dont je ne me souviens plus mais il y en a un que j’aime particulièrement : « Le glas sonne pour celui qui l’entend ainsi… et bien qu’il ne retentisse que par intermittence, dès cette minute où il a sonné pour lui, il est uni à Dieu. »
    Je m’accordai quelques instants de réflexion avant de conclure :
    — Hmm… effectivement, c’est moins poétique mais plus… chargé d’espoir ?
    Je le sentis sourire.
    — Oui, je l’ai toujours pensé ainsi.
    — D’où le tiens-tu ?
    — John Grey m’avait prêté un recueil d’écrits de Donne quand j’étais prisonnier à Helwater. Ce texte y figurait.
    — C’est un homme si cultivé.
    Je ressentais toujours une pointe de dépit au souvenir de cette partie, non négligeable, de la vie de Jamie que John Grey avait partagée et pas moi. Mais, malgré tout, j’étais heureuse qu’il ait eu un ami durant ces épreuves. Je me demandai soudain combien de fois il avait entendu le glas sonner ?
    Je pris la flasque et avalai une gorgée de whisky pour me dénouer la gorge. Des odeurs d’oignons frits et de viande en train de mijoter se glissaient sous la porte et un gargouillis inconvenant s’échappa de mon estomac. Jamie ne parut pas le remarquer. Il fixait un point au loin vers l’ouest où la masse de la montagne était cachée par les nuages.
    — Les petits MacLeod ont dit qu’en descendant, ils avaient de la neige jusqu’aux hanches. S’il est tombé une trentaine de centimètres de neige fraîche ici, cela signifie qu’il en est tombé près d’un mètre dans les hauts cols. Nous n’irons nulle part avant le dégel de printemps, Sassenach .
    Il baissa les yeux vers les deux cadavres en ajoutant :
    — Cela nous laisse amplement le temps de leur graver des stèles décentes.
    — Tu as donc toujours l’intention de rentrer en Ecosse ?
    Il me l’avait annoncé juste après l’incendie de la Grande Maison mais n’en avait pas reparlé depuis. J’ignorais s’il s’agissait d’un projet mûrement réfléchi ou d’une réaction spontanée à ce que nous venions de vivre.
    — Oui. On ne peut pas rester ici, répondit-il avec une note de regret dans la voix. Dès le retour des beaux jours, l’arrière-pays sera de nouveau en ébullition. Nous avons déjà senti l’odeur de roussi de trop près, Sassenach . Je ne tiens pas à finir rôti comme un cochon.
    Il avait raison. Nous pouvions construire une autre maison mais il était peu probable que nous puissions y vivre en

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