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Le règne des lions

Le règne des lions

Titel: Le règne des lions Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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suffisamment de doute, porta la main aux liens qui retenaient son mantel de nuit.
    — Déshabille-toi, ordonna-t-elle par-dessus son épaule. Debout.
    Un gémissement autant de soulagement que de contentement arracha Rosamund à son angoisse et à son lit, tandis que les épaules d’Aliénor se découvraient. Elle s’écarta de côté, offrant au regard de l’espion non pas le sien, mais l’effeuillage impudent de la maîtresse royale. Sans se douter un seul instant des manigances de sa reine, Rosamund se retrouva nue, la peau dardée de frissons que le feu moins ardent dans la cheminée ouvrait aux froidures des vieilles pierres reprises d’hiver. Elle n’osait bouger, la poitrine soulevée d’un souffle irrégulier. Aliénor revint dans le champ de vision de Salisbury. Dévêtue à son tour, elle lui offrit au jugé la cambrure de ses reins chevauchés de boucles soyeuses, puis, en se tournant de quart, la lourdeur somptueuse de ses seins. Elle tendit la main vers Rosamund qui s’empressa aussitôt de la rejoindre au mitan de la pièce. Refusant pourtant toute étreinte, Aliénor la contraignit à demeurer droite tandis qu’elle dessinait des arabesques sur sa peau frémissante, s’attardant sur le galbe de la poitrine hautaine ou le pubis foisonnant. Rosamund vacillait sur ses jambes entrouvertes, mordait sa lèvre inférieure pour étouffer ses gémissements, mais, les bras le long du corps, n’osait le moindre geste qui eût pu interrompre le tracé de sa reine. Aliénor s’en lassa vite. Elle fureta dans ce corps impatient, assez pour le cambrer légèrement en arrière dans l’arrondi de son bras, assez pour lui arracher une ébauche de jouissance, assez pour que Salisbury en salive derrière la porte. Puis, retirant ses doigts de l’entrejambe humide, elle obligea la belle, pantelante, à se redresser.
    — Il suffira pour ce jourd’hui.
    Elle la vit blanchir. Déposa un baiser léger sur ses lèvres. Demain, demain elle lui dirait qu’elle avait cessé de goûter sa vengeance. Demain. Elle la planta là, au bord des larmes, le corps ardent, mais trop pleutre somme toute pour lui arracher ce plaisir refusé. Finalement, c’était cela dont Aliénor s’était lassée le plus vite. De sa passivité. Désormais, elle le savait, Henri se fatiguerait de même. Il lui suffisait d’être patiente. Indifférente à sa détresse visible bien qu’inexprimée, Aliénor repassa dans l’ombre. A la fois pour se revêtir et pour laisser à Salisbury le soin de juger dans quel état la maîtresse du roi se trouvait. Rosamund n’eut pas un mot, pas une supplique, rien. Elle demeura là où Aliénor l’avait laissée, espérant peut-être que sa cruauté de l’instant faisait partie du jeu, qu’elle allait revenir, l’arracher à sa torture. Les bras ballants, elle semblait un animal pris à un piège et qui, craignant de s’arracher un membre, refuse tout mouvement. Aliénor reparut dans l’entrebâillement de la porte. Vêtue, un sourire cynique aux lèvres destiné au comte. Pourtant, comme elle s’y attendait, elle ne le trouva pas derrière l’huis lorsqu’elle l’ouvrit. Il avait eu la décence de s’éloigner. Pas bien loin, jugea-t-elle en entendant son pas se suspendre dans le corridor désert, empesé d’obscurité. Elle passa le seuil sans un regard en arrière, indifférente au sanglot contenu de Rosamund. Elle le tua en rabattant le loquet. Elle avait mieux à faire. Sans hésiter, dans cette nuit propice aux conspirateurs privés de lanterne, elle se dirigea vers ce renfoncement à quatre ou cinq toises de là. Son cœur battait à lui écarteler la poitrine, ses jambes frémissaient d’une ardeur de pouliche. Salisbury n’avait pas repris sa marche. Il l’attendait. Mieux. Il l’espérait. Elle ne fit qu’un pas près de lui, laissant croire qu’elle le voulait dépasser. Il la retint par le bras, l’attira avec cette violence des trahisons les plus injustifiées et la noua à lui avant de la retourner pour la plaquer dos au mur, à droite d’une fenêtre aux volets intérieurs rabattus, dans le drapé d’un rideau. Elle n’eut qu’un gémissement, étouffé.
    — Il vous a fallu bien du temps pour compren…
    La fin de sa phrase mourut sur ses lèvres, écrasées. Elle s’en fouetta d’un sang juvénile. Les ouvrit pour embrasser à pleine bouche celles de cet homme repoussé dans ses derniers retranchements. Il trahissait son roi. Pour la première fois. Mais

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