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Le règne du chaos

Le règne du chaos

Titel: Le règne du chaos Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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compagnie.
    — L’avez-vous tué, Ausel ? m’enquis-je, accusatrice.
    Il se retourna, les paupières mi-closes.
    — Mathilde, pour l’amour de Dieu, pourquoi aurais-je occis cet homme ? Il est vrai que j’étais avec vous. Je suis parti avant vous et vous ai attendu ici.
    — Et le meurtrier ?
    — Je ne sais, répondit Ausel. Je suis descendu vers le sud pour retrouver Demontaigu. Je vous ai suivi dans Pig Sty Alley et au Pot-au-feu. Vous ne m’avez point vu, mais moi, si, précisa-t-il en souriant.
    — J’ai aperçu Furnival, le malandrin, dis-je à voix basse. Je me suis posé des questions. Pourquoi êtes-vous ici, Ausel ?
    — Pour rejoindre mon frère.
    Je désignai le Pèlerin.
    — Nous ne pouvons plus rien pour lui. Son âme appartient à Dieu et son corps à la terre. Ausel, je vous connais depuis quatre ans. Jurez-moi que vous n’avez point pris part à l’assaut de Tynemouth pour capturer la reine.
    — Sur les Évangiles ! Appelez-en à saint Michel, le prévôt du ciel, à tous ses anges, les baillis de la porte divine, et je prêterai serment. J’ignorais tout. Nous n’avons rien fait. Nous n’avions pour but que d’abattre Alexandre de Lisbonne et les Noctales, mais, par amitié, je vous confierai ceci : nous sommes à présent membres de la cour de Bruce et son pouvoir s’est accru. Si Édouard tarde à réagir, la Couronne anglaise perdra l’Écosse et toutes ses possessions là-bas. Progressez avec circonspection, Mathilde… Les Beaumont… Bon, je suis sûr que vous connaissez leur tempérament. Ils ne se soucient que d’eux-mêmes.
    Il se rapprocha, l’air dur et sévère.
    — Des rumeurs courent dans le camp écossais que toutes sortes de trahisons grouillent à la Cour anglaise, comme un nid de serpents. Il est certain qu’Édouard d’Angleterre a demandé l’aide de Bruce, mais d’autres histoires se répandent telle une fumée infecte. On prétend qu’il importait peu que la reine soit captive.
    Il s’interrompit et me fixa, le visage spectral dans la faible lumière.
    — Ou tuée ? murmurai-je.
    Ausel acquiesça.
    — Bruce aurait-il trempé là dedans ? C’est un noble. Il fut jadis membre de la Cour anglaise ; c’est un chevalier.
    — Mathilde, dans les Marches du Nord, le père du roi a mis le pays à feu et à sang. Il a occis les frères de Bruce. Il a pris les femmes apparentées à Bruce et les a mises en cage avant de les pendre aux murailles du château. Bruce a changé. C’est une guerre à mort. Il a eu des scrupules, pourtant, s’il n’est pas allé jusqu’au meurtre, ce n’est point au nom de sentiments chevaleresques mais à cause du pouvoir de la France. Il attend et observe. Lui et ses hommes d’Église prient pour que Gaveston ne soit onc exilé. Ils espèrent que la guerre civile va éclater ici afin que Bruce puisse reprendre son dû. La plus grande partie de l’Écosse est perdue pour Édouard. Si l’agitation continuait en Angleterre, Bruce serait roi.
    Il désigna le Pèlerin du doigt.
    — J’ignore qui c’est et pourquoi il a de l’importance pour vous à cette heure tardive. Je vous ai dit que je vous avais suivis depuis la taverne. J’étais devant. Je veillai à l’ombre du mur du prieuré. Je vous ai vus surgir dans la lumière. Cet homme a été frappé, mais Dieu seul sait où se trouvait l’archer.
    — Et maintenant ?
    Ausel tendit la main.
    — Le ciel le sait, Mathilde. Je ne crois pas que je reverrai votre visage. C’est ma dernière expédition en Angleterre. Je m’entretiendrai avec messire Demontaigu demain matin, puis je rejoindrai mes frères.
    Je lui serrai la main. C’était un tueur, mais aussi un homme de parole. J’étais persuadée qu’il n’était pour rien dans le trépas du Pèlerin. Ausel se fondit dans les ténèbres. Bertrand et moi allâmes à la porte du Golgotha. Nous frappâmes à la poterne. Quelques minutes plus tard, un groupe de frères lais aux yeux ensommeillés sortirent avec un brancard. Ils y couchèrent le Pèlerin et le conduisirent au dépositaire. Nous leur emboîtâmes le pas. Demontaigu m’escorta jusqu’à ma chambre et m’embrassa avec douceur sur le front en posant un doigt sur mes lèvres.
    — Pas maintenant, Mathilde. Ne parlons pas. Je dois voir Ausel et vous devez dormir.

CHAPITRE VII
~
Le roi et Gaveston furent séparés ;
le Gascon demeura à Scarborough…
    Et je dormis bel et bien. J’étais si lasse que je m’étais

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