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Le règne du chaos

Le règne du chaos

Titel: Le règne du chaos Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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occupions des autres possessions de Middleton. Nous ne découvrîmes rien d’intéressant.
    — La terreur lui a fait perdre l’esprit, remarqua Dunheved en reposant le livre.
    Il se tourna vers le crucifix et se signa.
    — Pourquoi, pourquoi a-t-il été occis de cette façon ? s’étonna Bertrand.
    Installé sur un tabouret, il me fixa.
    — Et les autres ? Pourquoi pas un coup de poignard à la faveur de la nuit ou une flèche lâchée dans l’ombre ?
    — Affaire d’artifice, commentai-je en m’asseyant sur le lit. Nous voici enfermés dans ce sinistre château. Middleton, qui priait avec ostentation pour être protégé, a été tué dans la chapelle. C’est à présent un lieu où le sang a coulé : il n’est plus consacré ; son harmonie et sa paix ont volé en éclats. On ne peut y célébrer de messe avant qu’un évêque l’ait béni à nouveau. Une mort illicite dans un endroit saint ; la garnison n’a maintenant plus vraiment d’endroit pour assister à l’office. Si c’est un meurtre, ce que je crois, des énigmes plus sérieuses se posent. Comment ? De toute évidence il n’existe que deux entrées dans la chapelle : l’huis de la sacristie, bien fermé et scellé par le temps, et le portail, clos de l’intérieur.
    Je soupirai.
    — Par conséquent, comment un assassin a-t-il pu tuer un jeune homme inquiet et nerveux, en le pendant à cette poutre comme un quartier de viande ? Et de nouveau ce message railleur à propos des aigles.
    — Pourtant Middleton n’a pas été poussé par-dessus les remparts.
    — Non, mais du haut d’une échelle, un nœud coulant autour du cou, relevai-je. N’oubliez pas que Middleton, ainsi que Rosselin, étaient devenus très méfiants à l’égard des hauteurs, tours et créneaux. Middleton s’en tenait bien loin.
    — Vous voyez donc dans son trépas une attaque subtile ? demanda le dominicain.
    — En effet ! Ce meurtre et le découragement qu’il provoque s’infiltreront dans ces murs comme une fumée délétère. Même ici – le cadavre de Middleton le clame sans conteste –, le grand seigneur Gaveston n’est point en sécurité. Même ici, dans cette solide forteresse, la mort peut frapper comme un tueur caché, arc bandé et flèche encochée. Middleton, malgré toutes ses médailles, ses insignes, ses prières, ne pouvait échapper à son destin. Et qu’était-il ? De se balancer au bout d’une corde, tel un corbeau qu’un fermier place sur sa clôture pour éloigner les autres maraudeurs.
    — Mais pourquoi Middleton ? intervint Bertrand. Il est certain que l’assassin est adroit, astucieux, retors.
    — Donc ? m’enquis-je.
    — Gaveston n’a pas une seule fois été agressé ou menacé de quelque façon que ce soit, précisa-t-il en baissant la voix. Pourquoi ? Pourquoi occire les écuyers mais pas le grand seigneur ?
    — Je vous l’ait dit : pour faire naître l’inquiétude.
    Les mots d’Isabelle sur le meurtrier qui se débarrassait d’abord des gardes me revinrent à l’esprit.
    — Son temps viendra peut-être, ajoutai-je.
    — Gaveston en personne ne pourrait-il être le criminel ? murmura Dunheved.
    — Pour quelles raisons ?
    — Dieu seul le sait.
    Un sourire fendit le sévère visage lisse du dominicain. Malgré tous ses efforts, il avait du mal à cacher son aversion pour le favori royal.
    — Subtil mais artificieux, concédai-je. Ce que j’ai dit à Gaveston était juste : il se précipite à droite et à gauche. Il y a mort d’homme à chaque fois. Restons-nous jamais assez longtemps quelque part pour fouiller le sol, rechercher les indices ? Que nenni ; et c’est vrai ici. Nous ne savons rien, sauf que Middleton redoutait une mort soudaine, qui, à son grand dam, s’est rabattue telle une trappe sur lui…
    Nous n’avions pas grand-chose à ajouter. Nous quittâmes la chambre et nous séparâmes. La question de Bertrand me troublait encore. Pourquoi les Aquilae avaient-ils été occis alors que Gaveston, jusqu’à présent, n’avait pas même été égratigné ? Était-ce lui le meurtrier ? Mais pourquoi ? Je regagnai la chapelle et enjambai le seuil délabré. J’examinai la clé, fis le tour de la nef, pénétrai dans le chœur et la sacristie – rien. Je ressortis, montai sur les remparts et contemplai avec envie la contrée environnante. Une brume de chaleur flottait sur le bourg en contrebas, voilant l’horizon lointain. L’écho des trompettes,

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