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Le règne du chaos

Le règne du chaos

Titel: Le règne du chaos Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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pris cette échelle et s’est suicidé. La corde ?
    J’appelai le chapelain qui arriva en courant.
    — Oh, il y a des cordes dans le coffre de la chapelle, dans la sacristie, expliqua-t-il avec un geste d’impuissance. Madame, nous sommes dans un château ; il est facile d’y trouver une corde…
    Sa voix mourut.
    — Donc…
    Je désignai Middleton.
    — … il est venu ici au petit matin.
    Je haussai la voix, ce qui fit taire les clameurs pendant que les autres, y compris les Beaumont, faisaient cercle, comme s’ils assistaient à une pantomime.
    — Il a apporté ou trouvé une corde, continuai-je, fermé l’huis, enlevé la clé, pris cette échelle, grimpé pour attacher la corde, fait un nœud, se l’est passé autour du cou et s’est pendu.
    Je me tus.
    Bertrand, ignorant les objections que grommelait Rosselin, fouillait maintenant les habits du trépassé. Il enleva la botte droite et fit choir un morceau de parchemin. Il le déroula, le parcourut puis me le tendit. Les grandes lettres gribouillées annonçaient le message habituel : Aquilae Petri, ne volez pas si haut, superbes et fanfarons, car acheté et vendu est votre maître Gaveston.
    Je lus les mots à haute voix. Rosselin gémit tout bas, tel un enfant.
    — Ce n’est pas un suicide, mais un meurtre, marmotta Bertrand.
    — C’en est donc fini, genethig – ma petite, glissa Ap Ythel de sa voix chantante.
    Il s’accroupit près de moi.
    — Gaveston est à la fois acheté et vendu. Il est perdu.
    — C’est vrai, fy cyfaielin, mon ami, lui répondis-je. Mais quand et comment ?
    Je priai le chapelain de s’occuper du corps. Bertrand et Dunheved escortèrent Rosselin dans le jardin. Je m’agenouillai pour inspecter à nouveau le cadavre, ainsi que l’échelle et la corde. L’un des archers d’Ap Ythel était en train de la sectionner juste au-dessus du nœud coulant. Il la coupa et me la tendit. Je fis ensuite le tour du reste de la chapelle. Les fenêtres garnies de corne étaient étroites et solides. La porte de la sacristie menant au courtil était fort rouillée et semblait ne pas avoir été empruntée depuis des années. Le chapelain confirma qu’il n’existait ni crypte ni entrée secrète. Pour finir je m’intéressai à l’huis. On avait replacé la clé dans la serrure endommagée. Je l’examinai ainsi que les charnières arrachées avant de jeter un nouveau coup d’œil dans la nef : rien, aucune marque, aucun signe, n’indiquait de quelle manière Middleton avait été occis. Avait-il reçu ce message railleur sur les Aquilae et décidé de se suicider ? Pourtant un homme débordant de crainte et de scrupules religieux aurait-il commis le péché de Judas ? Par ailleurs, si lui, un jeune soldat, avait été assassiné, comment ?
    Je rejoignis mes compagnons dans le jardin. Nous nous assîmes sur une banquette d’herbe proche d’un treillis couvert de rosiers grimpants. Il faisait beau, l’air était frais ; l’agréable parfum des fleurs était réconfortant. Rien en ces lieux n’évoquait la mort, la malveillance cachée, dont nous venions d’être témoins. Rosselin était encore sous le coup de ce qui s’était passé. Je l’interrogeai scrupuleusement ; il ne put me dire grand-chose. Middleton, épouvanté, avait décidé, comme son ami, de se tenir éloigné de tout édifice élevé. Il s’était davantage encore tourné vers la religion, priant, dans sa chambre, devant un triptyque peignant la Passion du Christ, s’inquiétant de la moindre ombre. Rosselin était assis, le visage dans les mains. Il avoua que Middleton avait songé à abandonner Gaveston, mais où pourraient-ils aller ? Tout le monde était contre eux. Certes Rosselin était un écuyer, un combattant, néanmoins cette sournoise guerre menée contre lui et les autres avait sapé sa volonté et son courage. Il nous dit être obsédé par le meurtre le suivant à la trace tel un bailli attendant son heure pour bondir. Une foule d’ombres se tapissaient en haut de sombres escaliers ou, maléfiques, le guettaient de quelque point culminant. Je le pressais d’expliciter sa pensée. Il rétorqua que lui et Middleton avaient l’impression d’être poursuivis par les furies, par les spectres de leurs défunts camarades, par des esprits tourbillonnant dans un nuage noir autour d’eux. Je ne pus trancher : parlait-il en toute franchise ? Délirait-il sous l’emprise de la peur ? Il fit allusion à un grattement à

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