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Le règne du chaos

Le règne du chaos

Titel: Le règne du chaos Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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retrouvé le cadavre de John Rosselin – que Dieu ait son âme ! –, écuyer de Lord Gaveston, devant la tour de la Reine. Nous traversâmes la baille et contournâmes le donjon jusqu’au plan incliné rocheux qui se trouvait à sa base. Rosselin gisait de tout son long, couvert de blessures et baignant dans son sang, sur les pavés inégaux. D’affreuses contusions marquaient son visage. Le côté droit de son crâne était entièrement défoncé, tel le bois d’un coffre éventré. Il portait une chemise, des hauts-de-chausses et des bottes sales. Ses membres étaient tordus d’une manière grotesque. À son ceinturon, le fourreau de son poignard était vide : l’arme était profondément fichée dans son flanc gauche, sous les côtes. Le gouverneur et Ap Ythel me laissèrent approcher. Je retournai le corps, scrutai le masque ensanglanté du visage, puis tâtai les mains et le cou.
    — Il est mort depuis quelque temps, annonçai-je.
    Suivant la direction que m’indiquait Warde, je regardai la fenêtre, bien haut au-dessus de nous, et ouïs alors un bruit sourd venant du donjon.
    — Il a chu de la fenêtre de sa chambre ; c’est ce qui a dû arriver, murmura le gouverneur.
    — Mes hommes essaient d’enfoncer la porte, expliqua Ap Ythel.
    Dunheved demanda à Bertrand de s’occuper de la dépouille pendant que nous entrions dans le donjon. Nous parvînmes au palier devant la chambre de Rosselin au moment où l’huis, fermé de l’intérieur, gauchissait et se fendait. Les soldats qui manipulaient le bélier improvisé en usèrent jusqu’à ce que la serrure et les gonds cassent et que la porte s’effondre dans la pièce. Nous l’enjambâmes pour y pénétrer. Les volets de la large fenêtre, au fond de son embrasure, n’étaient pas clos. L’endroit était désolé, désordonné, l’humeur triste de Rosselin y flottait encore. La table était encombrée de gobelets et de plats sales. Des morceaux de parchemin étaient dispersés sur le lit, aux draps de lin trempés de sueur et entortillés. Une chape gisait sur le sol. Sur une sellette, près de la couche, se trouvaient la clé, deux perles, une broche et deux bracelets de force en cuir.
    — Je vais tout ramasser, déclara Dunheved à voix basse.
    Il prit un panier d’osier et se dirigea vers le lit.
    Je regardai le plâtre crasseux, le recoin menant aux latrines, les meurtrières percées dans le mur. Je m’approchai de l’embrasure de la fenêtre et vis le sang, sec et poisseux, sur l’appui de pierre sombre. J’en suivis la trace sur le plancher jusqu’au milieu de la salle, là où se trouvait la chape. Seuls le bruit que faisait le dominicain en remplissant son panier et le souffle lourd de ceux qui avaient forcé l’huis troublaient le silence. Un frisson de peur me glaça l’échine. Le gouverneur et Ap Ythel, qui nous avaient rejoints, réfléchissaient à ce que Dunheved chuchotait. L’ange de la mort, avec tous ses laquais de la géhenne, était venu dans cette chambre. Rosselin avait sans le moindre doute été assassiné, puis on avait jeté son corps par la fenêtre. Mais pourquoi, par qui et comment ? Ap Ythel sortit sur le palier pour parler à un compagnon dans la langue chantante de leur pays. Le gouverneur vérifia la porte et sa serrure brisée. Il était vain de penser à une entrée secrète ou à quelqu’un escaladant la façade escarpée de ce donjon et se frayant un passage par la fenêtre.
    — Il y a là quelque chose de diabolique, constata Warde. Quelque sort jeté à Rosselin.
    Il alla s’asseoir sur le lit. Un profond désarroi se lisait sur ses traits. Warde avait blanchi sous le harnois et je compris ce que voulait dire sa mine : c’était celle d’un homme qui faisait toujours son devoir mais qui connaissait aussi ses limites.
    — Notre force a été sapée de l’intérieur, ajouta-t-il. Que s’est-il passé céans ? Gaveston…
    Il se reprit.
    — … Mgr Gaveston voudra le savoir.
    — Le tocsin, répondis-je. Le véritable but de l’assassin consistait à le déclencher, mais n’y avait-il pas un garde ici ?…
    — Goronwy Ap Rees, précisa le capitaine des archers en entrant dans la pièce, un de mes meilleurs hommes. Il était de faction dans le corridor hier soir. Il reconnaît avoir somnolé. L’alerte l’a réveillé, ainsi que Rosselin, qui a ouvert le judas. Ap Rees n’a pas su quoi faire jusqu’à ce qu’une voix, en bas de l’escalier, crie que, l’armée

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