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Le règne du chaos

Le règne du chaos

Titel: Le règne du chaos Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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massives tours de siège. Ces dernières se déplaçaient avec lenteur, glissant vers nous comme des crabes monstrueux venus du plus profond des abîmes. Quand elles parviendraient aux murailles de la place forte, le siège serait terminé.
    Les barons déployèrent leurs troupes en faisant porter leurs efforts sur les accès bas du château. Ils avaient installé des machines de guerre sur nos flancs. Des chariots les suivaient en cahotant, débordants de pierres, de frondes, de barils de poix prête à être enflammée. Lorsque le soir tomba nous étions encerclés. Nos guetteurs qui surveillaient la mer ajoutèrent aux mauvaises nouvelles : trois cogghes de guerre à la haute poupe, bien armées, pleines de soldats et arborant les pennons des principales guildes de Londres, s’étaient introduites dans le port qui devenait donc inaccessible, interdisant l’accès aux navires du roi et toute évasion. Le piège s’était refermé. Le nœud coulant se resserrait. Les barons avaient amené Gaveston sur la piste pour danser et il danserait. Je me souviens fort bien de cette nuit. Des ténèbres éclairées par des feux ardents. De l’air vicié par l’odeur écœurante de la poix brûlée, les assaillants se préparant pour de bon.
    Le lendemain matin, juste après l’aube, les barons envoyèrent leur défi. Un messager portant un rameau aux feuilles vertes, escorté d’un prêtre tenant une croix et d’un héraut avec une trompette et le drapeau de Pembroke, s’avança jusqu’au bord de l’étroite douve devant le corps de garde. La sonnerie stridente de la trompette nous fit accourir sur les murailles. La cérémonie qui s’ensuivit était futile et inutile. Les envoyés exigèrent la reddition immédiate de la forteresse et la soumission de Lord Gaveston au pouvoir de la « Communauté du Royaume ». Au nom du favori, le gouverneur rejeta ces prétentions et proclama qu’il gardait la forteresse pour le roi. Le messager jeta son rameau à terre, fit pivoter sa monture et repartit au galop avec son escorte. Deux heures plus tard, les barons attaquèrent. Conscients de nos difficultés, de notre incapacité de fortifier et de défendre deux endroits en même temps, ils concentrèrent leurs forces sur les parties basses de la citadelle, à droite et à gauche. La garnison fut divisée. Warde était contraint de garder encore plus d’hommes en réserve de crainte que ces assauts ne soient que pures feintes et que la charge principale ne se produise ailleurs.
    Les jours suivants furent des jours de terreur. Des pierres ou d’autres projectiles enduits de poix brûlante enflammaient le ciel. Le crissement des cordes, le grincement des roues, le claquement sec des engins de guerre lançant leur orage de feu déchiraient l’air. L’ennemi tentait de chasser nos archers des remparts pendant que les massives tours de siège, couvertes de cuir de bœuf, continuaient leur lente mais menaçante progression vers nous. La stratégie des barons était simple mais sans faille : attaquer et envahir les flancs inférieurs du château, puis nous repousser dans la cour intérieure et la lugubre forteresse du donjon. Tout le monde était sous les armes. Même moi, munie d’une arbalète et d’un carquois de carreaux, je dus m’accroupir, glacée de peur, sur les murailles. Dunheved m’y rejoignit, refusant de s’abriter derrière sa bure de dominicain. On le voyait souvent sur les remparts avec ce qu’il appelait sa « gourde miraculeuse » d’où il prodiguait un réconfort tant physique que spirituel. Nous nous habituâmes au sifflement de mauvais augure des projectiles, au grincement des cordages, à l’éclatement des pierres, aux fagots ardents lancés contre la muraille ou lâchés dans la baille. D’énormes nuages de fumée s’élevaient en panaches au-dessus du château, ondulaient en répandant des miasmes d’immonde puanteur. L’offensive se poursuivait tard dans la soirée, les machines de guerre célébrant à leur horrible façon des vêpres mortelles pour mettre un point final à la journée.
    Des hommes périrent, tête et corps fracassés. D’autres furent grièvement blessés ou brûlés. Je m’affairais à l’infirmerie, assez chanceuse pour être tenue éloignée du tumulte navrant de la bataille. La chaleur nous obligeait à enterrer les défunts sans délai – Rosselin et Middleton inclus – dans une longue tranchée béante creusée dans le joli jardin. C’était un large

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