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Le roi d'août

Le roi d'août

Titel: Le roi d'août Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Pagel
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de vingt mille marcs d'esterlins. Il reconnaissait la suzeraineté pleine et entière sur ses fiefs continentaux du roi de France, auquel il concédait en outre nombre de places en Normandie, dans le Vexin et dans le Berry. Pour finir, il s'engageait à ne plus soutenir Otton de Brunswick dans la course à la couronne impériale.
    Ce fut le lendemain qu'eut lieu en terre normande, où ne régnait pas l'Interdit, le mariage du prince Louis.
    Aliénor d'Aquitaine, fidèle au serment fait à un mourant, était allée chercher une héritière en Castille. À l'étonnement de tous, elle n'avait pas ramené Urraca mais sa cadette Blanca, sous prétexte que les Français ne se fussent jamais accoutumés au nom de la première. En réalité, comme elle le confia à l'archevêque Elie de Bordeaux qui l'attendait à l'abbaye de Fontevrault, elle avait passé suffisamment de temps avec les deux jeunes filles pour se rendre compte qu'Urraca n'avait pas plus d'esprit qu'une oiselle. En Blanca, elle retrouvait au contraire un peu de l'enfant qu'elle-même avait été : curieuse, intelligente, obstinée… La substitution ne rendrait peut-être pas service au jeune Louis mais elle rendrait service au royaume.
    Aliénor jubilait : sa petite-fille réussirait là où elle avait échoué avec un autre Louis – du moins si ce mari-là, une fois roi, ne se révélait pas étouffé par un père qu'on devinait encombrant, pesant, monumental.
    La vieille femme, cependant, ne devait pas assister à la cérémonie : épuisée du voyage, déprimée par la mort stupide, au cours d'une rixe, d'un Mercadier dont les talents feraient cruellement défaut à l'Angleterre, elle s'arrêta à Fontevrault et confia à l'archevêque le soin d'accompagner la petite fiancée en Normandie.
    Louis avait treize ans, Blanca douze. Lui n'était pas encore considéré comme nubile, si bien que la nuit de noces serait reportée. Le sachant tous les deux, sans doute éprouvèrent-ils moins d'appréhension à se rencontrer : leur premier contact fut excellent. Il n'y eut pas de coup de foudre, il n'y aurait jamais entre eux quoi que ce fût évoquant la passion, mais enfin ils se plurent et, très vite, leur entourage estima qu'ils s'entendaient à merveille.
    Philippe en fut ravi : n'ayant connu que des amours tumultueuses, il souhaitait à son fils une union paisible avec une jeune fille humble, soumise, détachée de la politique.
    Il lui faudrait quelques années pour comprendre qu'aucun de ces qualificatifs ne s'appliquait réellement à Blanche de Castille.
     
    L'Interdit devenait intolérable. De partout, montaient des suppliques vers le roi. Bien qu'il se mît en colère dès qu'on abordait le sujet, ses conseillers le pressaient de plus en plus fermement de se conformer aux ordres d'Innocent III. Le vieux Gautier, le jeune Gautier, Henri Clément, Guillaume de Garlande, Barthélémy de Roye, Guillaume des Barres, le frère Guérin, qui d'ordinaire trouvaient mille et une raisons de se contredire, individuellement ou par factions, s'accordaient en la matière avec une unanimité que Philippe jugeait irritante.
    Guillaume aux Blanches Mains, lui, ne disait rien, trop impliqué dans l'affaire. Son mauvais pressentiment se faisait de plus en plus insistant.
    Il était urgent de débloquer la situation. Agnès écrivit au pape, une lettre touchante de simplicité et de désespoir. Sa Sainteté, tout en se déclarant affligée de ses tourments, lui enjoignit de renoncer à une union illicite qui lui vaudrait de perdre son âme et l'encouragea à prier.
    Au roi, il se déclara prêt à étudier la validité de son mariage danois s'il rendait immédiatement à Isambour les honneurs dûs à une reine et éloignait sa concubine. Il insista sur le fait que la sentence de divorce prononcée près de sept ans plus tôt demeurait irrégulière jusqu'à plus ample informé.
    Philippe, lorsqu'il reçut cette missive, entra dans une colère noire mais dut se soumettre. Se séparer d'Agnès n'entrait pas dans ses intentions, cependant : il lui fallait juste gagner du temps, obtenir la levée de l'Interdit, fût-ce provisoirement – et pour cela, une victime était nécessaire. Puisqu'il ne pouvait se résoudre à sacrifier sa troisième épouse, il sacrifia un fidèle serviteur.
    — Est-il vrai, mon oncle, que mon divorce avec Isambour est illicite ? lança-t-il froidement durant un conseil.
    L'archevêque de Reims se troubla, sentant venir le coup.
    — Il

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