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Le roi d'août

Le roi d'août

Titel: Le roi d'août Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Pagel
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à le suivre, une manœuvre de regroupement similaire ayant été lancée par l'ennemi.
    — La belle empoignade que voilà, monseigneur ! s'exclama Philippe de Beauvais, un des premiers à le rejoindre. Avez-vous vu comme nous les avons enfoncés ? Encore deux charges et ce sera la déroute, croyez m'en !
    Le heaume de Geoffroy masqua son scepticisme et son irritation. Tenir la victoire pour assurée avant l'heure était le meilleur moyen de la voir s'échapper.
    — Certes, nous l'emporterons, si nous ne nous relâchons point, répondit-il, avant de hausser le ton. Reformez les rangs ! Que chacun se tienne prêt !
    À demi aveuglé par la sueur qui coulait sur son front, il ouvrit un instant la visière de son heaume pour s'essuyer les yeux. Ces protections recouvrant la totalité de la tête – de conception si nouvelle que seuls les chevaliers les plus fortunés en étaient équipés, les autres se contentant du classique casque à nasal – épargnaient bien des mauvais coups mais n'en étaient pas moins un handicap à la vue et devenaient vite étouffants.
    Geoffroy constata avec satisfaction que ses troupes s'étaient parfaitement regroupées, de même que celles du comte de Blois et du comte de Hainaut. L'adversaire, en contrebas, ne leur cédait cependant en rien sur ce point, et le prochain assaut serait bien plus rude que le premier, puisque nul n'avait plus de lance et qu'on en viendrait directement à la mêlée. Non loin de là, la troupe flamande attendait toujours son heure, ce qui était exaspérant et rassurant à la fois : Philippe d'Alsace avait assez d'expérience et d'habileté pour intervenir au bon moment, quand l'apport de ses forces servirait au mieux son parti.
    Le jeune Plantagenêt referma sa visière et se prépara à ordonner la charge. Bien qu'il tentât de garder la tête froide, il sentait l'exaltation du combat l'envahir, le griser. Son seul regret était que l'enjeu ne fût pas plus important. Bientôt, toutefois, lorsqu'il envahirait la Normandie pour servir les buts de son ami Philippe et les siens propres, il aurait tout loisir d'exercer ses talents guerriers au service d'une cause primordiale. Son père, alors, comprendrait combien il avait eu tort de si mal le traiter.
     
    Un désastre, songeait Renaud de Dammartin. C'est un véritable désastre !
    On se battait depuis des heures. Dans les premiers temps, l'équilibre avait été préservé entre les deux partis, puis la troupe anglaise, la première, s'était effilochée, entraînant ses partenaires dans la déroute. Que s'était-il passé ? La faute, selon Renaud, revenait à un capitaine inexpérimenté qui n'avait pas su tenir ses hommes, qui ne s'était pas privé lui-même de capturer trop tôt quelques chevaliers adverses au riche équipement. De l'autre côté, en revanche, l'organisation et la cohésion avaient été presque parfaites, si bien que l'entrée en lice tardive des troupes flamandes avait sonné le début de la débâcle. Le jeune homme ne pouvait s'empêcher de penser que si Guillaume le Maréchal ou Richard Plantagenêt avaient été présents – ou si on l'avait fait, lui, capitaine –, les choses se fussent déroulées autrement.
    Regrets et hypothèses, toutefois, étaient vains. Si une victoire collective paraissait désormais hors de question, on pouvait encore s'en sortir individuellement avec les honneurs.
    Renaud, de combat singulier en combat singulier, avait franchi les premières buttes du champ, longé un étang, et était arrivé en vue du village déserté : une vingtaine de maisons et de granges, reliées par des rues étroites.
    S'étant débarrassé d'un adversaire particulièrement acharné, auquel il avait laissé en souvenir une épaule brisée, il profita de ce que nul ne l'attaquait plus pour jauger la situation.
    Les armées du début s'étaient morcelées en une myriade de petits groupes isolés. Dans les environs immédiats, quatre de ses partenaires, condamnés à succomber sous le nombre, affrontaient plus d'une dizaine de Français. Un coup d’œil en direction du village lui apprit que nul ne s'y battait encore. Peut-être était-ce là un facteur dont on pouvait tirer parti.
    Éperonnant sa monture, Renaud se porta au secours du chevalier anglais le plus proche, assailli par trois adversaires. Sur le casque d'un de ces derniers, il asséna par derrière un coup de masse magistral qui dut assommer net sa victime, car elle mordit la poussière dans

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