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Le roi d'août

Le roi d'août

Titel: Le roi d'août Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Pagel
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Puisque tel était le cas, la restitution avait été exigée. En vain. Deuxième pomme de discorde : Adélaïde, toujours promise à Richard sans que le mariage se fît, et dont on murmurait de plus en plus fort que le vieil Henri avait fait sa maîtresse.
    Fort de ces réclamations légitimes, Philippe avait temporisé jusqu'à la résolution de ses difficultés intérieures. Ensuite, il avait élevé la voix. Comme l'Anglais continuait de ne pas l'entendre, il avait décidé une première expédition de représailles dans le Berry, La chance l'avait servi ; abandonné par les cotereaux, les mercenaires qui constituaient l'essentiel de ses forces, le Plantagenêt avait été contraint de négocier, cédant plusieurs places fortes pour dédommager son adversaire de ses frais.
    Mais il avait conservé Gisors et il avait conservé Adélaïde. S'était-il vraiment entiché de cette dernière au point d'être prêt à tout pour la garder auprès de lui, y compris à des erreurs diplomatiques ? Philippe, connaissant l'homme, estimait cela peu probable. Selon lui, Henri se défiait simplement de Richard et désirait en amenuiser le pouvoir. Comment, sinon, expliquer sa proposition de marier la jeune fille non à son fiancé de toujours mais à Jean sans Terre ? Jean qui se verrait alors investi des fiefs de son frère, lequel deviendrait quant à lui roi associé, comme l'avait été Henri le Jeune – un roi sans pouvoir, auquel on ne laisserait aucune initiative.
    Philippe avait fait mine de réfléchir à ces conditions – en ce qui le concernait, un Plantagenêt duc d'Aquitaine en valait un autre – et s'était empressé de les transmettre au principal intéressé qu'on avait négligé de consulter. Richard, furieux, avait rompu provisoirement toutes relations avec son père, lequel, privé d'une bonne partie de ses troupes et craignant une invasion française en Normandie, n'avait pas osé retourner en Angleterre.
    — Combien de temps encore croyez-vous que nous pourrons maîtriser nos hommes ? interrogea le roi.
    Raoul de Clermont eut une moue peu encourageante.
    — Une journée. Peut-être deux. Peut-être moins. Avec cette chaleur et sans une goutte d'eau, ils ne tarderont pas à devenir fous furieux.
    Philippe serra les poings, les yeux fixés sur le lit presque asséché. L'eau ! L'eau cesserait-elle jamais de lui causer des problèmes ? Brusquement, il la haïssait.
    Et l'appelait pourtant de ses vœux.
    À la fin de l'année précédente, un coup de théâtre était venu bouleverser les données du problème : le sultan Saladin s'était emparé de Jérusalem après que la Ville Sainte fut restée sous domination franque pendant près d'un siècle. Richard, avec son impétuosité coutumière, avait aussitôt fait vœu de prendre la croix pour aller délivrer des infidèles le tombeau du Christ. Philippe et Henri, pressés par les légats du pape, n'avaient pu que l'imiter et se donner le baiser de paix. Pourtant, ni l'un ni les autres n'avaient entamé de vrais préparatifs : les terres de celui qui partirait le premier seraient à la merci de ceux qui resteraient, ils en étaient conscients.
    La trêve n'avait pas duré six mois : les hostilités avaient repris en Aquitaine, où plusieurs barons tentaient de secouer le joug Plantagenêt, soutenus en cela par le comte Raymond de Toulouse. Richard, ayant calmé les ardeurs de ses vassaux par une série d'opérations vigoureuses et peu désireux de s'arrêter en si bon chemin, avait envahi le domaine de celui qu'il considérait comme l'instigateur de toute l'affaire, prenant ville sur ville. Raymond tenait son fief du roi de France : il lui avait lancé un appel à l'aide.
    L'occasion était trop belle : Philippe s'était tout d'abord plaint à Henri II – lequel avait désavoué son fils du bout des lèvres, sans tenter de mettre fin aux combats qui déchiraient Quercy et Languedoc – puis, en représailles, il s'était à nouveau jeté sur le Berry, à la tête d'une armée considérable. Châteauroux, Buzançais, Argenton étaient tombés sous les assauts de ses soldats et de ses machines de guerre – dont il faisait un usage aussi efficace que novateur.
    Finalement, il était venu mettre le siège devant Levroux, où sa remarquable progression avait été arrêtée net par un ennemi inattendu : l'été.
    — Que décidez-vous, sire ? interrogea le connétable. Je suis d'avis de lever le siège avant que les hommes ne deviennent

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