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Le Roman d'Alexandre le Grand

Le Roman d'Alexandre le Grand

Titel: Le Roman d'Alexandre le Grand Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Valerio Manfredi
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contre la seule
cible restante : Philippe. Et il l’assassine. »
    Aristote laissa tomber sa main
gauche sur sa liasse de feuilles avec un bruit sourd, comme pour accompagner le
sens de sa conclusion.
    Callisthène examina ses petits yeux
gris qui brillaient d’une expression indéfinissable, hésitant entre la
complicité et l’ironie.
    « Je me demande si tu y crois,
ou si tu fais semblant de croire.
    — Il ne faut pas sous-évaluer
l’impulsion passionnelle, qui a toujours représenté une forte motivation dans
le comportement humain, en particulier dans le cas d’un individu privé
d’équilibre tel que peut l’être un assassin. En outre, cette histoire est si
complexe qu’elle pourrait être vraie.
    — Elle pourrait…
    — Oui. De nombreux éléments ne
cadrent pas avec le reste. En premier lieu, beaucoup de rumeurs circulent à
propos des amours masculines de Philippe, mais personne n’a jamais rien
rapporté de sûr à ce sujet, en dehors de faits totalement épisodiques. Pas même
dans le cas présent. Quoi qu’il en soit, peux-tu imaginer qu’un homme de son
envergure accueillera dans sa garde d’honneur un hystérique doublé d’un
déséquilibré ?
    « Deuxièmement, si les choses
s’étaient réellement passées ainsi, pourquoi l’offensé aurait-il tant attendu
avant d’exécuter sa vengeance, et pourquoi l’aurait-il fait d’une façon aussi
dangereuse ? Troisièmement, qui est le témoin fondamental de toute cette
affaire ? Attale. Or, le hasard veut qu’il soit mort. Assassiné.
    — Donc ?
    — Donc, l’instigateur de ce
crime a probablement inventé une histoire compliquée et relativement plausible,
en rejetant la responsabilité sur un homme qui, étant mort, ne peut ni
approuver ni démentir.
    — Bref, on reste dans le noir.
    — Peut-être. Mais on commence à
entrevoir quelques éléments plus significatifs.
    — Lesquels ?
    — La personnalité de
l’instigateur, et le type de milieu qui peut avoir produit une histoire de ce
genre. Maintenant, prends ces notes, j’en ai une copie dans mon sac de voyage,
et fais-en bon usage. Je continuerai mon enquête d’un autre observatoire.
    — Le fait est, répliqua
Callisthène, que je risque de ne plus avoir le temps de mener à bien ces
recherches. Désormais Alexandre est totalement absorbé par son expédition en
Asie, et il m’a demandé de le suivre. J’écrirai l’histoire de cette
entreprise. »
    Aristote hocha la tête et ferma les
yeux à demi. « Cela signifie qu’il a tourné le dos au passé et à tout ce
qu’il représente pour lui, afin de mieux courir vers l’avenir, à savoir vers
l’inconnu. »
    Il prit sa sacoche, jeta son manteau
sur ses épaules et sortit. Le soleil commençait à se lever sur l’horizon,
sculptant les cimes lointaines du mont Chyssos au pied duquel s’étendait la
vaste plaine de Macédoine, avec sa capitale et sa retraite solitaire de Miéza.
    « C’est étrange, observa-t-il
en s’approchant du char qui allait l’emmener au port. Nous n’avons plus eu le
loisir de nous revoir.
    — Mais il parle sans cesse de
toi et il viendra peut-être te rendre visite avant de partir pour l’Asie.
    — Je ne crois pas, affirma le
philosophe comme s’il pensait à voix haute. Il est attiré à présent par sa soif
d’aventure comme une phalène par la flamme d’une lanterne. Quand il éprouvera
vraiment le désir de me voir, il sera trop tard pour revenir en arrière. De
toute façon, je te ferai savoir mon adresse à Athènes. Tu pourras ainsi
m’écrire quand tu le souhaiteras. Je pense qu’Alexandre s’efforcera
d’entretenir de bons contacts avec cette cité. Adieu, Callisthène, prends soin
de toi. »
    Callisthène l’embrassa. Avant que
son oncle ne grimpe sur le char, il eut l’impression de voir pour la première
fois une lueur d’émotion dans ses petits yeux gris.
     

46
    Dans la pénombre du soir, on distinguait à peine le vieux sanctuaire
situé au sommet de la colline, à l’orée du bois. À la lumière des lanternes,
les colonnes de bois peint exhibaient les signes du temps et des intempéries
auxquelles elles étaient exposées depuis des siècles.
    Les décorations du linteau et du
fronton, en terre cuite colorée, représentaient les aventures du dieu Dionysos,
et le reflet changeant de la lumière des torches et des lampes semblait les
mettre en mouvement, les rappeler presque à la vie.
    Par la porte ouverte, on

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