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Le Roman d'Alexandre le Grand

Le Roman d'Alexandre le Grand

Titel: Le Roman d'Alexandre le Grand Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Valerio Manfredi
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but ni ne mangea de
toute la journée. Il avait l’impression d’avoir été personnellement vaincu, la
capacité de Memnon de rendre coup pour coup avec une force terrible l’humiliait
durement. Pour la première fois de son existence, il éprouvait un sentiment
d’impuissance, mêlé à une profonde solitude.
    Les triomphes qui avaient
jusqu’alors parsemé sa route lui semblaient lointains et presque oubliés :
Memnon de Rhodes était un roc qui entravait son avancée, un obstacle qui lui
paraissait de plus en plus insurmontable avec le temps.
    Il avait intimé à ses gardes l’ordre
de ne laisser entrer personne. Même Leptine n’avait pas osé l’approcher. Elle
était maintenant habituée à déchiffrer son regard, à distinguer les ombres et
les lumières qui obscurcissaient ou éclairaient ses yeux, comme s’il s’agissait
d’un ciel d’orage.
    Alexandre se préparait à rencontrer
son ennemi, un peu avant que le soleil ne se couche, quand le bruit d’une
altercation parvint à ses oreilles. Perdiccas fit bientôt irruption sous sa
tente en repoussant les gardes du corps.
    Sur un signe de leur souverain, les
hommes se retirèrent.
    « Je mérite la mort !
s’exclama Perdiccas bouleversé. J’ai causé celle de nombreux soldats, j’ai jeté
le déshonneur sur l’armée et je t’ai contraint à une négociation humiliante.
Tue-moi ! », cria-t-il en lui tendant son épée.
    Il avait l’air hagard, les yeux
rouges et enfoncés. Alexandre ne l’avait pas vu dans un tel état depuis le
siège de Thèbes. Il l’examina sans broncher, puis il lui montra une chaise.
« Assieds-toi. »
    Les doigts de Perdiccas tremblaient
autour de la poignée de son épée.
    « Je t’ai dit de
t’asseoir », ordonna de nouveau Alexandre d’une voix plus forte et plus
ferme.
    Perdiccas s’effondra sur la chaise
en laissant tomber son épée.
    « Pourquoi as-tu mené cette
attaque ? lui demanda Alexandre.
    — J’avais bu, ou plutôt nous
avions tous bu… Une telle entreprise me semblait possible, ou plutôt certaine.
    — Parce que tu étais soûl.
N’importe quel homme sain d’esprit aurait compris qu’il s’agissait d’un
suicide, en pleine nuit et sur ce terrain.
    — Il n’y avait personne sur les
remparts. Un silence total. Pas la moindre sentinelle.
    — Tu es tombé dans le piège.
Nous ne pouvions pas rencontrer d’adversaire plus coriace que Memnon. Tu as
compris ? Tu as compris ? », cria le roi.
    Perdiccas acquiesça.
    « Memnon n’est pas seulement un
combattant valeureux, c’est aussi un homme d’une habileté et d’une intelligence
extraordinaires, qui nous épie nuit et jour, guettant la moindre distraction de
notre part, le moindre faux pas, le moindre mouvement irréfléchi. Avant de
frapper avec une force dévastatrice.
    « Nous ne sommes pas ici sur un
champ de bataille où nous pouvons donner libre cours à la supériorité de notre
cavalerie et à la puissance de la phalange. Nous affrontons une ville riche et
puissante, une armée bien entraînée qui jouit de l’avantage de sa position et
ne subit aucune privation. Nous n’avons qu’une possibilité : nous ménager
un passage suffisamment large dans l’enceinte pour nous permettre de culbuter
les vétérans de Memnon. C’est un plan qu’on ne peut mettre en pratique que de
jour, en pleine lumière.
    « Le jeu auquel nous sommes
confrontés est le suivant : notre force contre la leur, notre intelligence
contre la leur, notre prudence contre la leur. Rien d’autre. Sais-tu ce que
nous allons faire ? Oter les débris du mur, déplacer les pierres qui
encombrent le terrain afin de libérer la brèche. Alors nous ferons avancer les
machines vers les remparts, et nous les abattrons. S’ils en élèvent d’autres,
nous recommencerons, jusqu’à ce qu’ils se retrouvent le dos à la mer. As-tu
compris, Perdiccas ?
    « En attendant, tu n’obéiras
qu’à mes ordres. La perte de tes soldats est une punition suffisante. Je vais
te ramener leurs corps. C’est toi, avec ton détachement, qui leur rendras les
honneurs funèbres, qui apaiseras leurs âmes courroucées en offrant des
sacrifices. Le jour viendra où tu pourras rembourser ta dette. Pour l’heure, je
t’ordonne de vivre. » Il ramassa l’épée et la tendit à son ami.
    Perdiccas la glissa dans son
fourreau et se leva. Il avait les yeux embués de larmes.
     

27
    L’homme qui lui faisait face avait le visage dissimulé par un

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