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Le Roman d'Alexandre le Grand

Le Roman d'Alexandre le Grand

Titel: Le Roman d'Alexandre le Grand Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Valerio Manfredi
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satrape en souriant.
    — En quoi… en quoi puis-je
t’être utile ? » balbutia l’informateur sans parvenir à détourner le
regard de la pointe du pal.
    Ariobarzanès regagna son lit et fit
signe à Eumolpos de l’imiter. Celui-ci soupira en espérant que le pire était
passé.
    « Quelle réponse attendait le
petit yauna ? demanda le satrape, indiquant par ce surnom péjoratif
l’envahisseur qui avait déjà conquis l’Anatolie.
    — Le roi Alexandre… euh, le
petit yauna, corrigea Eumolpos, voulait savoir où le Grand Roi l’attendait pour
engager le combat.
    — Très bien ! Tu vas donc
envoyer ton courrier – pas celui-ci, qui me paraît hors d’usage – dire au petit
yauna que le Grand Roi l’attendra au pied des Portes syriennes avec la moitié
de son armée, après avoir placé l’autre moitié sur le gué de Thapsaque. Cela le
poussera à attaquer.
    — Oh ! oui, bien sûr,
s’empressa d’acquiescer l’espion. Ce prétentieux, cet imbécile, qui, je te prie
de me croire, m’a toujours été antipathique, se jettera la tête la première
dans le boyau qui sépare le mont Amanus de la mer, tandis que vous…
    — Nous, rien, l’interrompit
Ariobarzanès. Fais ce que je t’ai dit, aujourd’hui même. Tu convoqueras ton
homme dans la salle d’à côté, où nous pourrons te voir et t’entendre, et tu
l’enverras tout droit au petit yauna. Nous déciderons de ton sort après notre
victoire. Si tu y contribuais d’une manière décisive, le pal que tu as aperçu
dans la cour serait destiné à un tout autre usage. Mais si les choses devaient
mal tourner… tac ! »
    Il joignit le pouce et l’index de sa
main gauche et glissa dans cette boucle l’index de son autre main.
    Eumolpos s’exécuta, un peu plus
tard, tandis que des oreilles et des yeux l’écoutaient et l’observaient par des
orifices sans doute bien cachés dans les murs ornés de fresques.
    Il exposa à son nouveau courrier la
mission qui l’attendait : « Tu diras que ton collègue est malade, et
que je t’ai envoyé à sa place. Et quand on te demandera le mot de passe, tu diras…
(il toussota)… « cervelle de mouton »
    — « Cervelle de
mouton », mon seigneur ? demanda le courrier d’un air étonné.
    — Oui, oui, « cervelle de
mouton ». Pourquoi, quelque chose ne va pas ?
    — Non, tout va bien. Alors je
pars sans tarder.
    — Oui, très bien, pars. »
    Eumolpos de Soles sortit ensuite par
une petite porte, située à l’autre extrémité de la pièce. Ariobarzanès
l’attendait.
    « Puis-je m’en aller ?
demanda l’espion.
    — Oui, répondit le satrape.
Pour le moment. »
    Après avoir quitté Gordion, Alexandre
traversa la grande Phrygie jusqu’à la ville d’Ancyre, un bourg niché dans les
collines au fond d’une cuvette embrumée. Il confirma dans ses fonctions le
satrape perse qui y résidait, tout en plaçant des officiers macédoniens à la
tête de la garnison. Puis il reprit sa marche vers l’ouest et atteignit la rive
du Lys, le grand fleuve qui se jetait dans la mer Noire et qui constituait
depuis plusieurs siècles la frontière entre le monde gréco-anatolien et l’Asie
intérieure, l’ultime frontière que les Grecs, estimait-on, n’auraient jamais pu
franchir. L’armée le longea jusqu’à son anse méridionale et poursuivit sa route
sur la rive de deux grands lacs salés, entourés de vastes étendues blanchâtres.
    Alexandre confirma également dans
ses fonctions le satrape perse de Cappadoce, qui lui jura fidélité, puis il se
dirigea vers le sud. Ne rencontrant aucune résistance, il pénétra sur le haut
plateau que dominait la masse du mont Argée, un volcan endormi et toujours
enneigé qui surgissait comme un fantôme des brumes de l’aube. La campagne était
souvent couverte de gelée blanche durant les premières heures de la
journée ; elle prenait ensuite une couleur rougeâtre au fur et à mesure
que le soleil s’éloignait de l’horizon.
    Il y avait de nombreux champs
labourés et semés, mais on entrevoyait, là où la charrue n’était pas passée,
des chaumes donnés en pâture aux brebis et aux chèvres. Au bout de deux jours
de marche, les soldats aperçurent l’imposante chaîne du Taurus, dont les cimes
immaculées étincelaient au soleil et se teintaient de rouge au couchant.
    Ils furent étonnés de constater que
ce territoire immense s’ouvrait presque spontanément à eux et que de nombreux
villages, tribus et

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