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Le Roman d'Alexandre le Grand

Le Roman d'Alexandre le Grand

Titel: Le Roman d'Alexandre le Grand Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Valerio Manfredi
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membres de
ma famille comme jamais aucun vainqueur ne l’a fait. Toi aussi, mon garçon, tu
t’es gagné une place dans mon cœur. Voilà pourquoi je ne pourrai que souffrir,
voilà pourquoi je n’aurai pas le réconfort de prier d’un cœur serein
Ahura-Mazda afin qu’il apporte la victoire à mes soldats. Va, Alexandre, et
puisses-tu voir sans dommage le couchant de demain. C’est la seule bénédiction
que je sois en mesure de te donner. »
    Le roi s’inclina et sortit. Il
marcha jusqu’à sa tente. À l’heure qui précédait le repos, le camp était en
pleine activité : rassemblés en cercle et assis par terre, les soldats
consommaient leur dernier dîner et s’encourageaient mutuellement dans
l’imminence de l’affrontement mortel. Ils se racontaient des bravades,
buvaient, jouaient aux dés l’argent qu’Eumène leur versait généreusement
désormais, s’amusaient du spectacle de la danse des prostituées qui suivaient
l’armée avec des moyens de fortune. D’autres passaient cette soirée dans le
camp des marchands, où ils avaient à présent une compagne fixe et parfois des
petits enfants auxquels ils s’attachaient de plus en plus au fil des jours.
    En cette heure cruciale, l’existence
de sentiments profonds était à la fois une source de réconfort et d’inquiétude
pour eux, du fait de l’incertitude de l’affrontement qui se préparait, de
l’imminence de la bataille qui pouvait les combler de gloire ou d’argent mais
aussi les conduire à la mort, ou pis encore, à une humiliante servitude pour le
restant de leurs jours.
    Alexandre regagna sa tente après
avoir traversé le camp d’un bout à l’autre. Sur le seuil, il trouva Leptine qui
lui baisa les mains. « Mon seigneur, tu as reçu une étrange visite. Un
homme est venu, il a apporté un plat pour ton dîner. Je ne l’avais jamais vu,
mais à ta place je me méfierais : ce mets pourrait être empoisonné.
    — L’as-tu jeté ?
    — Non, mais…
    — Montre-le-moi. »
    Leptine l’accompagna dans les
quartiers destinés aux banquets et lui indiqua une assiette posée sur la table
royale. Alexandre sourit et secoua la tête. « Grive à la broche. »
Puis il la toucha. « Elle est encore chaude. Où est-il ?
    — Il est parti, mais il a
laissé ceci. »
    Elle lui tendit un minuscule rouleau
de papyrus. Alexandre le parcourut rapidement, puis il sortit en toute hâte et
appela son écuyer : « Fais-moi préparer sans tarder mon bai de
Sarmatie. »
    L’écuyer se précipita vers les
enclos et revint rapidement avec le cheval harnaché. Le roi sauta sur son dos
et s’élança au galop sans que sa garde ait le temps de comprendre ce qui se
passait. Quand les soldats furent prêts à lui emboîter le pas, Alexandre avait
déjà disparu dans le désert.
     

12
    Alexandre atteignit un petit village composé de quelques maisons de
briques crues et de bitume, situé à mi-chemin entre son camp et le fleuve que
son armée avait traversé ce jour-là. Il se dirigea vers un puits, à proximité de
quelques palmiers, mit pied à terre et attendit.
    Quelques instants plus tard, la lune
apparut derrière un groupe de modestes hauteurs qui bordaient la plaine vers
l’est. Elle diffusa sa clarté sur l’étendue de chaumes qui entourait le
village, pareille à un anneau doré, et sur le désert qui s’étendait au-delà de
ce petit espace cultivé. Alexandre laissa son cheval brouter les quelques
touffes d’herbe qui poussaient entre les palmiers et attendit. Enfin, il
aperçut une silhouette ondoyante se détacher sur une piste un peu plus large
qu’un sentier, en provenance du sud : Eumolpos de Soles arrivait à dos de
chameau.
    « Tu peux descendre en toute
tranquillité, lui dit Alexandre en remarquant son air méfiant. Péritas est
resté au camp.
    — Salut, ô grand roi et seigneur
de l’Asie », commença l’informateur.
    Mais Alexandre, qui disposait de peu
de temps, l’interrompit : « Es-tu parvenu à en savoir plus, depuis
que tu m’as écrit ton message ?
    — Je dois te dire la vérité. Je
savais que Mazéos était très abattu et qu’il jugeait l’empire de Cyrus le Grand
sur le déclin, et j’avais demandé à Héphestion de le persuader de passer dans
notre camp lorsqu’il aurait atteint le gué de l’Euphrate à Thapsaque. Mais en
vain : Héphestion estime sans doute que pousser un adversaire à la
désertion est une entreprise déshonorante.
    — Je suis de son

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