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Le sac du palais d'ete

Le sac du palais d'ete

Titel: Le sac du palais d'ete Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jose Frèches
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s’éloignait de l’ Hermès.
    —  À vous de jouer, monsieur Bowles ! Je suis sûr qu’à cet égard vous êtes plus doué que Meadows {40} … ajouta Bonham à l’adresse de l’intéressé, auquel il venait de tendre le pli.
    La réponse des Taiping, d’un style pompeux, faisait état de la création du monde, de la place que Dieu y avait, et de la mission divine qu’il avait confiée au Souverain Céleste, le Tianwan, de chasser du pouvoir les Mandchous démoniaques. Dans le droit fil de la posture adoptée par le Fils du Ciel vis-à-vis des puissances étrangères, Hong s’imaginait que les Anglais étaient prêts à faire allégeance au Céleste Royaume de la Grande Paix. Le message des insurgés s’achevait par ces mots stupéfiants :
    Etant donné que vous autres les Anglais reconnaissez notre Suzeraineté, le Père et le Frère Aîné Célestes ne manqueront pas d’admirer cette manifestation de votre fidélité et de votre soumission. C’est pourquoi nous vous autorisons à adopter la conduite que vous jugerez utile pour nous aider à exterminer nos diaboliques ennemis ou pour vous livrer à vos opérations commerciales habituelles. Nous espérons vivement que vous acquerrez avec nous le mérite de servir avec diligence notre Très Royal Maître.
    Lorsque Bowles eut achevé de traduire ce salmigondis, Bonham, hors de lui, s’écria :
    —  Pauvres imbéciles… S’ils pensent que je vais me prêter à leurs simagrées et que mon pays va leur faire allégeance !
    —  Hong Xiuquan est aussi aveugle et naïf que Xianfeng lorsqu’il s’imagine que le monde entier est à prêt à se jeter à ses pieds. Les dirigeants chinois ont toujours eu un malencontreux complexe de supériorité, monsieur le gouverneur. Ce n’est pas pour rien que Chine signifie en chinois « Centre du Monde ». Cela leur a d’ailleurs déjà coûté très cher… répondit Bowles, nullement étonné.
    —  En attendant, il est hors de question pour moi de traiter ce fou comme un roi ! S’il m’oblige à ployer l’échine et à procéder au ketou, je m’abstiendrai purement et simplement d’aller le voir. Jusqu’à preuve du contraire, il n’est tout de même pas empereur de Chine ! lâcha Bonham d’une voix aigre.
    —  Si vous voulez, avec M. Meadows, nous pourrions y aller en mission de reconnaissance…
    Un matelot qui nettoyait un des ponts inférieurs vint alors expliquer à sir George la cause de cette pestilence qui les prenait à la gorge. La présence de ces milliers de cadavres humains qui flottaient sur le fleuve Bleu jeta un léger froid.
    —  Peut-être y a-t-il une épidémie de choléra à Nankin   ? se demanda le gouverneur quelque peu chiffonné par cette éventualité.
    —  Le choléra se transmet par l’eau. Il suffit de se laver souvent les mains et de ne boire que de l’eau bouillie ! lâcha Bowles qui ne voulait à aucun prix être obligé de renoncer à son reportage.
    —  Je crains que vous ne péchiez par optimisme, mon cher ami. J’ai moi-même perdu l’un de mes meilleurs collaborateurs à cause de cette terrible maladie. Et ce garçon, je peux vous l’assurer, avait pris les mêmes précautions que vous…
    Le journaliste reprit le fil de la conversation que le choléra avait interrompue.
    —  Sir George, vous n’avez pas réagi lorsque je vous ai suggéré de m’envoyer avec M. Meadows en mission exploratoire…
    —  Je trouve que c’est une excellente idée, mon cher John. Promettez-moi, toutefois, d’être prudent !
    —  Vous parlez du choléra ou des Taiping, sir George   ? plaisanta le dessinateur reporter.
    —  Entre deux calamités, je refuserai toujours de choisir ! s’écria le gouverneur en souriant, avant d’ajouter, pince-sans-rire : Savez- vous que vous auriez fait un excellent diplomate   ?
    —  J’ai peut-être raté une belle carrière au sein du Foreign Office, fit Bowles, qui n’en pensait pas un mot.
    John, qui avait le journalisme dans la peau, n’avait jamais éprouvé beaucoup de considération pour le métier diplomatique qui lui paraissait une activité sans intérêt, creuse, fondée sur des gesticulations codées ainsi que sur des éléments de langage inaccessibles au vulgum pecus. D’ailleurs, la preuve la plus manifeste de l’inutilité des consuls et des ambassadeurs était qu’ils finissaient toujours par s’effacer devant les militaires lorsqu’il fallait passer – comme on disait dans les

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