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Le sac du palais d'ete

Le sac du palais d'ete

Titel: Le sac du palais d'ete Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jose Frèches
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produise…
    Bowles était surpris par la façon naturelle avec laquelle Hong parlait de ses visions, comme si ces faits étaient anodins et allaient de soi. Chez les Taiping, il n’existait pas de frontière entre la réalité et le surnaturel… ou plutôt entre le rêve et la réalité, auraient corrigé certains esprits moins bien intentionnés ou plus sceptiques. En attendant, il lui fallait profiter de ce tête-à-tête avec Hong pour lui soutirer le maximum d’informations.
    —  Le Céleste Souverain serait-il disposé à répondre à quelques questions sur la façon dont vous avez organisé le Céleste Royaume   ?
    —  Vous avez le droit de m’interroger comme bon vous semble. Par quoi voulez-vous commencer   ?
    —  Il se dit à Shanghai que si vous prenez le pouvoir, vous instituerez une vaste réforme agraire. Pourriez-vous m’en dire plus à ce sujet   ?
    —  Le Prince du Septentrion a consigné mes pensées agricoles dans ce cahier ! répondit Hong en désignant à John un livre posé sur son bureau.
    Il le tendit au journaliste qui se mit à le feuilleter. Le livre était intitulé Le Régime agraire de la Dynastie Céleste.
    —  Vous savez, les mesures que je prône sont réellement révolutionnaires. Lorsque la Nouvelle Dynastie régnera sur la Chine, le temps des paysans pauvres sera définitivement révolu… J’en prends l’engagement sur la tête de mon fils : chaque famille disposera de ce dont elle a besoin pour vivre ! précisa le Tianwan.
    —  Quelle sera votre méthode   ?
    —  Tous les champs cultivables seront divisés en parcelles de taille strictement identique que le Céleste Royaume confiera à tout citoyen âgé de plus de quinze ans, qu’il soit homme ou femme.
    —  Si je comprends bien, vous avez donc pour objectif de développer une classe de micro-propriétaires   ?
    —  Jamais de la vie. La propriété, c’est le vol ! L’unique propriétaire des champs, des rivières, des étangs, des canaux, des chemins, des maisons et des granges, c’est Dieu tout-puissant puisqu’il les a créés. En tant que dépositaire de la volonté divine, il revient au Céleste Royaume d’en assurer la gestion ! Chacun disposera de ce dont il a besoin. Plus une famille sera nombreuse, et plus les champs qu’elle se verra confier pour les cultiver seront vastes.
    —  Quels furent vos inspirateurs, très honoré Hong   ?
    —  Les plus grands sages de la Chine ancienne !
    Bowles prenait furieusement des notes. Le chef Taiping était encore plus utopiste que ce qu’il pensait. Hong croyait visiblement dur comme fer à l’avènement d’une nouvelle Chine, dans la tradition de celle de son premier empereur Qin ShiHuangdi.
    —  Pourriez-vous me citer quelques noms   ?
    —  Mencius {44} , par exemple, qui a écrit : «  Donnez à chaque famille cinq arpents de mûriers, et aucun de ses membres ne manquera jamais de soie. Donnez-lui des poules, des chiens et des porcs à élever, et aucun vieillard ne manquera jamais de nourriture. Donnez-lui cent arpents de terre et aucune famille de plus de huit personnes ne connaîtra jamais la famine ! » Mon objectif est simple : que chaque citoyen du Céleste Royaume puisse manger à sa faim… Chacune de nos familles devra posséder un minimum de cinq poules et de deux truies.
    —  Je suis en admiration… dit John, afin de le faire parler le plus possible.
    Hong ouvrit le tiroir de son bureau et en sortit un rouleau qu’il lança à l’Anglais, tel un os à ronger à son chien.
    —  Tenez ! fit-il en se rengorgeant, ceci est le texte de mon dernier édit par lequel j’ordonne qu’on plante des mûriers au pied de tous les remparts de nos villes. Ainsi, toutes nos femmes pourront élever des vers à soie. Afin que nul ne l’ignore, cette ordonnance a été affichée aux principaux carrefours du Céleste Royaume.
    Paradoxalement, le Tianwan prônait ainsi l’institution d’une bureaucratie chargée de faire appliquer ses lois, alors même qu’il reprochait à l’administration chinoise de se noyer dans la paperasse et de ne brasser que du vent. Il n’était pas de mois où il ne fît promulguer des édits sur les sujets les plus divers. Le Tianwan entendait régenter jusqu’au moindre détail la vie de ses ouailles. Tout à l’édification de son système pyramidal et totalitaire, il avait même projeté d’encadrer la population chinoise selon un système calqué sur celui en vigueur dans ses

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