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Le sac du palais d'ete

Le sac du palais d'ete

Titel: Le sac du palais d'ete Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jose Frèches
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l’heure, je n’ai pas été assez précis avec vous, lui déclara Mesure de l’Incomparable dont le visage était figé par l’angoisse.
    —  Eh bien, vas-y, je t’écoute !
    —  Pourriez-vous nous aider, ma femme et moi, à quitter le Céleste Royaume   ?
    John, bouche bée, s’attendait à tout sauf à une telle requête, de la part de ce jeune et sympathique colonel de l’armée des gueux qu’il connaissait à peine. Il se redressa, tandis que le Chinois faisait de même.
    —  Vous n’y êtes pas heureux   ? bredouilla-t-il.
    —  Le Tianwan lorgne de plus en plus sur ma femme dont le corps est souple comme une liane. Pendant des années, elle fut contorsionniste dans des spectacles de cirque. Ses qualités physiques hors du commun en font la partenaire idéale pour un homme ! Le connaissant, je suis sûr que Hong souhaitera les tester lui-même. Rien ne saurait empêcher le Tianwan d’agir à sa guise… Or cette jeune personne est ce que j’ai de plus précieux au monde, monsieur Bowles !
    —  Je te remercie pour ta franchise… Cela étant, je ne vois pas en quoi je pourrais t’aider alors qu’il te suffirait de quitter discrètement Nankin avec ta femme ! répondit John, perplexe, et qui ne tenait pas à compromettre ses bonnes relations avec le Tianwan.
    —  Elle est réticente à l’idée de quitter la capitale des Taiping sans véritable point de chute. Elle a recueilli une fillette abandonnée qu’elle a peur de mettre en danger.
    —  Comment pourrais-je l’éviter   ?
    —  Vous n’y êtes pas, monsieur Bowles. En fait, pour en avoir maintes fois discuté avec elle, le seul endroit où ma femme partirait volontiers, c’est l’Angleterre.
    —  Comme c’est drôle ! Comment ta femme a-t-elle entendu parler de l’Angleterre   ? ne put s’empêcher de lâcher Bowles, amusé à l’idée que ce couple de Taiping rêvait d’aller refaire sa vie à Londres alors que lui-même se refusait à toute idée de retour au bercail.
    —  À Nankin, elle a une amie anglaise.
    —  Laura Clearstone   ?
    —  Vous la connaissez   ?
    John acquiesça.
    —  Les propos de Laura sur l’Angleterre font tellement rêver ma femme qu’elle souhaite à tout prix y aller… D’après elle, les Anglais vivent bien mieux que les Chinois !
    —  Tu es prêt à partir avec elle   ?
    —  Sans le moindre état d’âme, monsieur Bowles ! Ayant donné au Céleste Royaume plusieurs années de ma vie, je suis las de me battre dans la boue et de risquer ma peau pour des chefs qui n’ont pas de considération pour la piétaille… Et puis, j’aimerais fonder une famille et vivre tranquillement en paix afin d’assurer un meilleur avenir à mes enfants.
    Habitué à la langue de bois dont usaient généralement les Chinois lorsqu’ils parlaient aux étrangers, John, qui observait attentivement le colonel Taiping, était surpris par sa spontanéité.
    —  Pour prendre un bateau pour Londres, il faut de l’argent. En as-tu   ?
    —  Justement, monsieur Bowles, j’ai pensé que vous pourriez m’aider à trouver du travail à Shanghai.
    —  Je vais réfléchir à tout ça. Nous aurons tout le temps d’en reparler au cours des jours que nous allons passer ensemble…
    La quête du bonheur individuel étant antagoniste aux sacrifices et aux efforts nécessités par les causes collectives, John, songeur, se disait que si les officiers supérieurs de Hong Xiuquan en étaient là, il était probable que les offensives de l’armée des gueux finiraient par faire long feu.
    —  Je vous remercie infiniment pour votre compréhension ! fit Mesure de l’Incomparable en serrant avec effusion les mains de celui qu’il considérait déjà comme son sauveur.
    Juste avant de s’endormir, John, en repensant à sa dernière visite à Laura, eut des doutes et voulut en avoir le cœur net. Il se pencha vers son voisin et lui dit :
    —  J’ai croisé chez Laura Clearstone une jeune personne du nom de Jasmin Éthéré. Serait-ce ta femme   ?
    —  Comment l’avez-vous deviné   ?
    —  La description que tu m’en as faite était éloquente… murmura, soudain pensif, le journaliste, tout en se gardant bien de faire part à son guide de la bouffée de désir qu’il avait ressentie à la simple vue de la jeune femme.
    Le lendemain, après une nuit peuplée par les ronflements et les mauvaises odeurs de ses voisins, Bowles retrouva son accompagnateur devant le bol de soupe servi

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