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Le sac du palais d'ete

Le sac du palais d'ete

Titel: Le sac du palais d'ete Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jose Frèches
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corps. Lin lui avait donné pour mission de satisfaire à toutes les exigences du journaliste du Weekly. C’est ainsi que les deux hommes avaient quitté Nankin à cheval, entourés par des milliers de fantassins qui s’étaient enroulé les pieds dans des bandes de feutre et avaient pour seule arme un vieux sabre rouillé passé dans leur ceinture. Seuls les officiers disposaient d’un arc et d’un carquois récupérés par les Taiping lorsqu’ils s’étaient emparés du dépôt de munitions central des troupes impériales. Malgré ces carences en matériel, ces soldats faméliques, vêtus de guenilles comme des mendiants et dont la plupart s’étaient battus comme des lions pour s’emparer de Nankin, partaient vers ces nouveaux combats avec un moral de vainqueur.
    Après avoir longé le Chang Jiang sur une distance d’environ cent kilomètres, les deux hommes avaient abandonné leurs montures pour embarquer à bord d’une des longues barges abandonnées par les impériaux quelques semaines plus tôt, lorsqu’ils avaient dû se replier en catastrophe face à l’armée des gueux. Halés depuis la rive par des convois de buffles, les navires, chargés au point que leurs ponts affleuraient à la surface des eaux, avaient lentement remonté le fleuve jusqu’au village de Zhongyong. C’était à l’ouest de cette bourgade située à deux jours de marche d’Anqing, la capitale de la province, que les troupes mandchoues avaient installé leurs premières lignes de défense. Mesure de l’Incomparable et John Bowles y avaient débarqué à la nuit tombante, sous un déluge de flèches tirées par les impériaux depuis un petit fortin construit au milieu du fleuve. Un capitaine dont l’haleine puait l’alcool de riz, quoique cette boisson fût, du moins en théorie, strictement interdite chez les Taiping, les avait emmenés dans ce grenier désaffecté où, après un dîner frugal, on leur avait attribué cet espace minuscule pour dormir.
    Le bout de la Tige de Jade de Mesure de l’Incomparable restait imprégné par les ineffables gâteries que Jasmin Éthéré lui avait offertes avant son départ pour l’Anhui.
    Comme d’habitude avant son départ au front, les deux amants qui partageaient le Heqi s’étaient unis avec fougue, chacun voulant donner à l’autre la ration de plaisir dont il serait privé pendant de longues semaines jusqu’au retour du guerrier. À l’instar de tous les officiers supérieurs de l’armée des gueux, Mesure de l’Incomparable n’avait droit à deux semaines de repos qu’au bout de trois bons mois de présence sur le champ de bataille… Sentant que s’il continuait à penser avec autant d’intensité à la contorsionniste, il risquait bel et bien d’avoir une éjaculation, il se redressa vivement. Il ne lui paraissait pas convenable qu’un adepte du Heqi prît du plaisir de façon solitaire sous prétexte que sa partenaire était absente. C’était une affaire de fidélité et d’honnêteté.
    —  Je suis très perturbé ! ajouta le Taiping, en mal de confidences.
    Il trouvait l’Anglais sympathique et avait décidé de jouer avec lui son va-tout.
    —  Tu as un problème   ? lui demanda John, quelque peu étonné par une entrée en matière aussi directe au pays où il était de bon ton de pratiquer la litote et l’allusion.
    —  Je pense à ma femme. Elle me manque énormément.
    —  Tu es marié   ?
    —  Pas encore… Les officiers de l’armée des gueux ne peuvent se marier qu’avec l’autorisation expresse du Tianwan !
    —  Pourquoi le Tianwan t’empêcherait-il d’épouser la femme que tu aimes   ?
    —  Hong n’accorde les autorisations de mariage qu’avec parcimonie ! Il y a tout un dossier à remplir et le couple doit se présenter personnellement devant le Céleste Souverain. Il arrive que Dieu ordonne à celui-ci de garder la femme pour lui. Dans ce cas, elle doit entrer au Céleste Harem ! Je n’ai aucune envie que pareille mésaventure arrive à la femme de ma vie !
    —  Je te comprends !
    Le sous-officier chargé de l’inspection des feux les fit taire et les deux hommes se recouchèrent. Un peu plus tard, alors que Bowles était sur le point de trouver le sommeil, son voisin le secoua doucement.
    —  Monsieur Bowles, j’ai un grand service à vous demander…
    —  Si je peux faire quelque chose pour toi, ce sera avec plaisir ! murmura le journaliste en se redressant.
    —  Monsieur Bowles, tout à

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