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Le sac du palais d'ete

Le sac du palais d'ete

Titel: Le sac du palais d'ete Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jose Frèches
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les hommes, les femmes et les enfants présents se jetèrent d’un seul élan face contre terre en gémissant :
    —  Respect et obéissance à notre Céleste Roi !
    C’est alors que des hurlements déchirèrent cette atmosphère pieuse et concentrée, faisant tourner les têtes vers l’endroit d’où ils provenaient. Un peu à l’écart, un homme au visage noirci par la crasse se tenait à genoux et bras étendus. Il avait l’air en transe. Son corps agité de spasmes se raidissait à vue d’œil. Des borborygmes jaillissaient de sa bouche, en même temps que des flots de bave lui dégoulinaient sur la poitrine.
    Hong fit signe à Feng de se rendre auprès de l’intrus.
    —  Qui es-tu   ? Que fais-tu là, à semer le trouble dans une cérémonie divine   ? lui demanda l’acolyte du chef Taiping à plusieurs reprises, avant de le secouer comme un prunier, ayant constaté qu’il ne réagissait pas à ses propos.
    Au bout d’un moment, l’homme ouvrit les yeux et Feng réitéra sa question.
    —  Mon nom est Yang Xiuqing !
    —  Que fais-tu là, ô Yang Xiuqing   ?
    —  Je suis charbonnier {37} . Je travaille dans la forêt, juste derrière la colline. J’ai entendu parler de Hong par des Adorateurs de Dieu qui étaient venus nous voir, afin de nous porter leur divin message. Le Saint-Esprit est mon interlocuteur perpétuel. Pendant que tu me parlais, j’étais en conversation avec Lui ! lâcha l’homme d’un trait et sur un ton parfaitement naturel.
    —  Tu m’entendais   ?
    —  Oui, mais comme j’étais occupé avec l’Esprit saint, je ne pouvais pas te répondre ! fit l’inconnu, le plus naturellement du monde.
    —  Sais-tu qui est l’Esprit saint   ? lui demanda Feng, méfiant.
    —  L’Esprit saint est la troisième représentation de Dieu, la deuxième étant Notre-Seigneur Jésus-Christ ! répondit Yang, imperturbable.
    Hong, qui les avait rejoints, dit à son acolyte :
    —  Laisse-moi m’entretenir avec ce garçon.
    Puis il releva Yang et commença à le questionner.
    —  Combien de fois as-tu écouté les sermons des Adorateurs de Dieu   ?
    —  Trois fois. Tes disciples viennent souvent rendre visite aux charbonniers.
    —  Rares sont ceux qui, en trois fois, comprennent la Sainte Trinité. Tu es un garçon doué, Yang Xiuqing.
    L’intéressé, qui n’en attendait pas moins, planta ses yeux dans ceux de Hong et lui déclara d’une voix vibrante :
    —  J’aimerais beaucoup travailler pour la noble cause que tu sers…
    —  À partir de ce jour, je te déclare citoyen du Royaume de la Grande Paix ! lui répondit le Souverain Céleste en lui imposant les mains.
    Puis il se rendit auprès de Laura, et lui confia, euphorique :
    —  Si vous saviez comme je suis content du travail que vous avez accompli ! Sans vous, Laura, nous n’y serions jamais arrivés !
    La jeune femme, qui se languissait sur son tabouret, incapable de bouger fût-ce un orteil, tellement son ventre endolori était contracté, se contenta de lui sourire.
    —  Vous n’avez pas l’air bien   ? s’enquit Hong en constatant la pâleur de son visage sur lequel perlaient des milliers de gouttes de sueur.
    —  L’accouchement est sûrement très proche… fît-elle d’une voix mourante.
    —  Le mieux serait d’aller vous allonger ! insista le chef Taiping.
    —  Hong, je ne vous remercierai jamais assez de m’avoir permis de mener cette grossesse tranquillement jusqu’à son terme. Cet enfant qui va naître vous devra la vie, lâcha la jeune femme, épuisée.
    Le chef Taiping avait fait en sorte qu’elle ne manquât de rien, ne posant aucune question au sujet de l’identité du père de son bébé. Si, à Jintiancun, sa grossesse n’avait jamais suscité le moindre sarcasme, chacun la considérant comme voulue par le Dieu tout- puissant, c’était grâce à Hong qui avait à cet égard des idées fort larges.
    Tandis que l’enfant gigotait de plus belle dans les entrailles désormais à demi ouvertes de Laura, Jasmin Éthéré, après l’avoir aidée à se lever, passa la tête sous son aisselle pour lui faire regagner sa maison. La pluie avait recommencé à tomber dru, transformant en un torrent de boue la rue principale du village. La contorsionniste, toute à sa hâte de déposer son amie sur son lit avant qu’elle ne fût trempée jusqu’aux os, accéléra le pas. C’est alors que son pied glissa sur une pierre mouillée, provoquant la chute des deux

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