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Le salut du corbeau

Le salut du corbeau

Titel: Le salut du corbeau Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie Bourassa
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il sut tout de suite que ce n’était pas un rêve. Il tourna la tête délicatement et prêta l’oreille. Jehanne dormait paisiblement à ses côtés. Une forte pluie tambourinait sur le toit. Mais ce ne pouvait être cela. Il se tourna sur le côté et entendit. C’était un tout petit bruit. Il repoussa sans rudesse les couvertures pour ne pas réveiller Jehanne et prit le bougeoir éteint avec l’intention de le rallumer aux braises qui devaient subsister dans l’âtre de la grande pièce. Ce qu’il fit prudemment, une fois la porte de la chambre refermée.
    Une petite silhouette recroquevillée, vêtue d’une tunique froissée, remua dans son grand fauteuil qui avait été déplacé près d’une fenêtre dont les battants étaient ouverts. C’était Adam. Il sanglotait.
    — Qu’est-ce qui ne va pas ? demanda Louis en s’approchant et en posant son bougeoir sur le rebord humide d’une autre fenêtre.
    Il mit une de ses grandes mains sur le bras du fauteuil. Adam ne bougea pas. La flamme de la chandelle fuma en grésillant. Le garçonnet dit :
    — Demain, est-ce qu’on pourra faire une balade juste tous les deux sur Tonnerre, comme on avait fait une fois ? Parce que je ne les aime plus, les autres enfants. Ils sont méchants.
    — Comment cela ?
    — Ils n’arrêtent pas de me traiter de fils du diable.
    Louis ne sut dire pourquoi cela lui fit mal. Son regard s’enfuit par la fenêtre ouverte et se mit à errer parmi les arbres qui pleuraient à grosses gouttes.

Quatrième partie
1378-1391

Chapitre IX
Une sommation royale
    Alors qu’en 1374 il n’était plus resté à l’Angleterre que Calais, Bayonne et Bordeaux en France, deux ans plus tard, la situation s’était encore détériorée. Après avoir fait leurs comptes, les Anglais avaient bien été obligés de constater que rien ne leur restait plus du trésor qu’ils étaient venus chercher : ni Espagne, ni France, ni ce qu’ils avaient pu obtenir de la rançon du défunt roi Jean.
    Les aigreurs des nobles d’outre-Manche se retournèrent alors contre le vieux roi et son fils, Édouard de Woodstock, tous deux malades. La France pouvait enfin reprendre son souffle.
    Le 21 juin 1377, Édouard III d’Angleterre s’éteignit. Ce puissant monarque, dont l’ambition avait été de posséder deux royaumes, fut dépouillé jusque sur son lit de mort par une femme de chambre qui lui arracha ses anneaux des doigts. Après ce règne glorieux, le sort s’acharna sur la Grande Île* : le prince de Galles rendit l’âme à son tour l’année suivante.
    Tout cela obligea les Anglais à faire ce qu’ils eussent dû faire dès le départ, soit s’unir avec le roi de Navarre.
    De son côté, Charles de Navarre n’avait guère changé. Dès la mort d’Édouard III, il chercha à regagner la confiance de Charles V pour y trouver son profit. Il proposa au roi de France de marier l’une de ses filles au dauphin. Mais, comme les conditions qui eussent mené à la conclusion de cette alliance ne lui convenaient pas, il fit volte-face et donna la main de la princesse au nouveau roi d’Angleterre, Richard II, dont les libéralités lui étaient plus favorables. Alors même qu’il effectuait ces tractations, Charles de Navarre joua de finesse et, en mars 1377, il commit sa plus grave erreur : il chercha à tromper le Valois en confiant son aîné à la cour de France. Par ce geste, il visait à prouver une fois pour toutes que sa fidélité lui était acquise. Le jeune prince, Charles III dit le Noble, allait avec le temps s’avérer beaucoup plus qu’un simple otage.
    Charles V ordonna la saisie des biens du Mauvais. Commandement fut fait aux capitaines navarrais de remettre les places fortes placées sous leur dépendance aux gens du roi de France. Plusieurs châteaux furent rasés et des cités furent démantelées. Saint-Sauveur-le-Vicomte avait été repris aux Anglais en 1375, et une attention particulière fut portée aux possessions normandes qui étaient susceptibles de servir de base à un nouveau débarquement anglais. Charles de Navarre perdit donc tout dans le Nord, à l’exception de Cherbourg. Sans le secours de ses alliés, Charles le Mauvais eût même perdu la Navarre en plus de son fils aîné.
    *
    Hiscoutine, début de l’été 1378
    — Charles de Navarre est accusé de complot contre le roi de France, avait dit l’émissaire qui avait laissé tomber aux pieds de Louis une sommation frappée du sceau

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