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Le Sang d’Aphrodite

Le Sang d’Aphrodite

Titel: Le Sang d’Aphrodite Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Elena Arseneva
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avança Artem. Elle sortait souvent et avait beaucoup d’amoureux, n’est-ce pas ?
    Boris rougit et s’agita sur son siège.
    — Ces amis étaient de jeunes gens fort honorables, précisa-t-il. Anna ne supportait pas de rester claquemurée dans sa chambre. Mais elle ne faisait rien qui puisse la compromettre ! J’y veillais personnellement.
    — Tu la surveillais ? s’enquit avec vivacité le droujinnik.
    — Jamais je ne me serais abaissé à de tels procédés ! s’indigna le jeune homme. Anna tenait à sa liberté. Jusqu’à un certain point, je lui faisais confiance. Elle avait un tempérament trop indépendant. C’est pour cela que je n’ai pas réussi à la protéger de certaines influences néfastes… influences qu’elle subissait sous notre propre toit !
    — Que veux-tu dire ?
    — Je parle de notre beau-père, Matveï, répondit Boris avec une grimace. Vois-tu, boyard, notre père a péri sur un champ de bataille un an après la naissance d’Anna. Notre mère a épousé en secondes noces un marchand anobli de Kiev. Hélas, elle est trépassée peu après son mariage, et Matveï est devenu notre tuteur officiel. Il avait pour tâche de s’occuper de notre éducation, ainsi que de la gestion de nos biens.
    Boris humecta ses lèvres sèches avant de poursuivre :
    — Je ne pouvais point m’opposer à cette décision à l’époque : je n’étais pas encore en âge de diriger le domaine familial. De plus, j’étais trop affecté par le décès de notre mère chérie. Matveï veillait à l’administration de la propriété, et il a fait prospérer nos affaires en commerçant avec Kiev et Tsar-Gorod. Pourtant, depuis le jour où cet homme s’était installé dans notre maison, je n’ai pas cessé de me méfier de lui. Mon intuition m’avertissait que, sous les apparences d’un honnête homme, il s’agissait d’un fourbe et d’un escroc ! Je suis certain qu’il a profité de sa situation pour bâtir une fortune personnelle au détriment de la nôtre.
    Le jeune boyard s’interrompit sous le regard perçant d’Artem. Il se raidit et prit une expression de défi.
    — Je n’ai pas de preuves pour appuyer mes dires. Sous prétexte de m’apprendre l’art de commercer, Matveï m’envoyait aux quatre coins de l’horizon afin de négocier différents contrats. En fait, ce vieux renard voulait seulement me tenir éloigné du domaine. Il se gardait bien de m’informer de ses faits et gestes ! Il a aussi profité de mes absences pour se rapprocher de ma sœur et affermir l’ascendant qu’il avait pris sur elle.
    Boris soupira et haussa les épaules.
    — Lui a-t-il inoculé la fièvre des passions que je sentais bouillir en lui ? Je l’ignore… Mais je sais qu’il a encouragé Anna dans ses penchants les plus dangereux, ses caprices les plus extravagants. C’est bien lui qui a formé ce caractère irrespectueux de tout ! Et moi, hélas, j’étais trop jeune, trop faible aussi pour lutter contre l’empire que ce démon exerçait sur cette âme tendre.
    Il se passa la main sur le front puis poursuivit d’une voix assourdie, comme s’il se parlait à lui-même :
    — Anna était l’innocence même… Et pourtant, il lui arrivait d’évoquer avec irrévérence les choses les plus sacrées. Elle prenait plaisir à s’amuser au mépris des convenances ! Et moi, qu’ai-je fait ? Rien ! Je me consolais en imaginant que bientôt, j’allais pouvoir me charger seul des affaires familiales et me débarrasser légalement de Matveï. Dès que cet être malfaisant aurait disparu de notre vie, pensais-je, ma petite Anna perdrait ses déplorables habitudes.
    Boris tourna son regard éteint vers Artem.
    — Dieu m’a puni d’avoir trop attendu. Il y a environ cinq lunes, j’étais enfin libre de me séparer de Matveï et je m’apprêtais à me servir du premier prétexte venu pour l’envoyer au diable. C’est alors que le sort m’a frappé : trois semaines plus tard, Anna périssait de malemort ! Certes, mon beau-père avait du chagrin, lui aussi… Mais je ne pouvais pas m’empêcher de lui en vouloir, comme s’il était à blâmer pour ce qui venait d’arriver à ma sœur. Je lui ai jeté à la figure des accusations terribles. Ce n’était point charitable de ma part, pourtant je ne souhaitais qu’une chose : qu’il quitte ma maison au plus vite.
    — Tu n’as pas besoin de justifier ta réaction, dit Artem avec douceur. Tu te faisais des reproches

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