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Le Sang d’Aphrodite

Le Sang d’Aphrodite

Titel: Le Sang d’Aphrodite Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Elena Arseneva
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sa Chronique . Obéissant à une soudaine inspiration, Artem pénétra dans la bibliothèque et gravit les marches du vaste escalier. La porte grinça en s’ouvrant et le vieil érudit leva la tête, plissant ses yeux de myope.
    — Ne te dérange pas, vénérable Pimène, ce n’est que moi, Artem fils de Norrvan, le rassura le boyard.
    Il s’approcha du lutrin et s’enquit poliment de l’avancement du travail du chroniqueur. Puis il posa l’aryballe devant lui et lui demanda si elle lui évoquait quelque chose. Pimène la considéra de ses yeux pâles avant de secouer la tête.
    — Jolie fiole, mais je n’en ai jamais vu de semblables.
    — Pense à l’époque où l’un de tes scribes t’a parlé des meurtres de jouvencelles. N’a-t-il pas mentionné un flacon vide découvert sur les lieux de ces crimes ?
    Le chroniqueur soupira et fit un nouveau geste de dénégation.
    — Ou encore, ton scribe a peut-être fait allusion à un parfum capiteux, un aphrodisiaque utilisé par l’assassin ? insista Artem.
    Un sourire condescendant apparut sur les lèvres minces de Pimène. Il agita la main pour empêcher le droujinnik de poursuivre.
    — Comment veux-tu que je m’en souvienne, boyard ? Nous autres chroniqueurs ne distinguons point ce genre de détails, je te l’ai déjà expliqué. Nous voyons le monde d’en haut et ne discernons que les événements porteurs d’un sens profond. Toi, droujinnik, tu veilles au bien-être de chacun des sujets du prince, mais ma tâche à moi est bien plus vaste : je m’occupe du sort de notre peuple tout entier, de sa place dans l’Histoire.
    Artem se sentit soudain à bout de patience. Il déclara d’un ton dur :
    — On ne peut pas s’intéresser au peuple en général si on se désintéresse de chaque individu en particulier. On ne peut pas aimer le genre humain, on ne peut aimer que les gens ! Si tu oublies l’importance de chaque destin personnel, alors, tous tes nobles discours sont vains. En prêtant plus d’attention à ce qui se passe autour de toi, tu pourrais sauver quelques vies humaines. Songes-y, Pimène !
    Sur ces mots, il empocha le flacon, pivota sur lui-même et sortit d’un pas furieux, se retenant de claquer la porte derrière lui. Dehors, il se mit à respirer l’air frais à grandes goulées. Il contempla quelques instants la lune qui versait une pâle lumière sur les tourelles du palais avant de quitter discrètement la résidence. Il se mit à marcher au hasard, déambulant au gré des rues et des ruelles. Enfin, il s’arrêta devant un modeste jardin entouré d’une palissade à claire-voie. C’est alors seulement qu’il réalisa qu’il se trouvait devant la maison de Klim. Il poussa le portillon qui s’ouvrit sans bruit. Artem pénétra dans le jardin, avisa un banc adossé à la clôture et alla s’y installer, se promettant qu’il ne resterait que quelques minutes. Il regarda vers la maison dont le toit à deux pentes se découpait sur le fond du ciel et aperçut une lumière diffuse dans la fenêtre de l’officine. Artem se leva, s’apprêtant à partir. Mais à cet instant, la porte d’entrée s’ouvrit et une silhouette de femme surgit sur le seuil. C’était Vesna.
    Artem se figea pendant que la jeune femme se dirigeait vers lui. Elle vint si près qu’il distinguait les perles de rivière qui ornaient sa robe. Leur éclat mat faisait ressortir celui de ses yeux qui brillaient comme deux diamants noirs.
    — N’ordonne pas de me châtier, dame Vesna ! articula Artem en guise de salutation. Je me sens comme un criminel pris en flagrant délit.
    La jeune femme pouffa de rire.
    — Je te crois sans peine. J’étais certaine qu’un voleur s’était introduit dans notre jardin.
    — J’ignore ce qui m’a pris, je voulais juste me reposer un moment et réfléchir.
    — Pourquoi ici ?
    Artem inspira profondément avant de répondre :
    — Te savoir à proximité m’aide mieux qu’une potion magique ! C’est comme si mon âme se désaltérait à une source vivifiante. Il y a en toi, dame Vesna, une fontaine toujours jaillissante de grâce et d’inspiration.
    — Moi aussi, je te trouve de bonne compagnie, boyard, répliqua Vesna en souriant. Asseyons-nous et bavardons un petit moment.
    Grisé par un sentiment d’euphorie, le droujinnik prit place à côté de la jeune femme. Il pouvait sentir la chaleur de son corps et deviner ses courbes harmonieuses. La tête lui tournait un peu et son

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