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Le sang de grâce

Le sang de grâce

Titel: Le sang de grâce Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Andrea H. Japp
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anges, il se
lança :
    — Je vous aime, madame.
Terriblement, immensément, définitivement. Sont-ce là les trois mots que vous
attendiez ? Car je puis les décliner à l’infini : Je vous espère. Je
me désespère. Je vous attends. Je vous désire. Pour la vie. Sur mon âme. De
grâce, aimez-moi. De grâce, épousez-moi. Ah… mon Dieu, des phrases de quatre
mots !
    Elle se tourna enfin pour lui offrir
le plus joli sourire qu’il eut jamais contemplé, et plaisanta :
    — Vous moqueriez-vous ?
    Étrangement, il n’eut pas envie d’un
moment de légèreté. Grave, presque sombre, il exigea à son tour :
    — Madame… j’ai mis mon âme à nu
pour vous. J’attends la réciproque… ou un congé, rapide et digne.
    Elle le fixa comme s’il avait perdu
la raison et s’exclama :
    — Un congé ? Êtes-vous
bien fol ?
    S’emportant soudain, elle
tempêta :
    — Ah, mon Dieu… Ainsi ce n’est
pas une légende ! Que les hommes en amour sont donc sourds, aveugles… et
même muets pour faire bonne mesure ! Ne voyez-vous rien ? N’avez-vous
rien compris ? C’est extraordinaire ! Une dame aime infiniment un
monsieur qui l’aime infiniment. Fichtre… Serait-ce la première fois que cela se
rencontre ?
    — À mon tour de craindre que
vous vous moquiez. Peu importe. Vous n’avez toujours pas prononcé ces fameux
trois mots, madame. J’attends.
    — Les trois mots ? Oh,
mais ils ne me font pas peur. Je les sens en dedans de moi depuis trop
longtemps, monsieur. Voulez-vous que je les crie, que je les chante, que je les
chuchote, peut-être que je les écrive ? Je vous aime, infiniment et pour
toujours, mon doux seigneur.
    Il se précipita vers ses mains
tendues et elle recula d’un pas en murmurant :
    — Je suis si… bouleversée, un
peu effrayée aussi. Votre pardon… je n’ai guère l’habitude de… À la vérité… je
suis confuse de me sentir pucelle après enfant. Vous aviez raison, bien que
m’ayant vexée sur le moment. J’ai été si peu mariée que j’ignore presque tout
du mariage. Je suis, bien sûr, au fait des… obligations conjugales, mais…
    Il baisa ses mains et planta son
regard sombre dans les immenses yeux gris bleu qui le dévisageaient.
    — Madame, ma mie, j’ai
l’extrême arrogance de croire que je ne vous imposerai aucune obligation,
qu’elle soit conjugale ou autre. J’ai… l’impertinence de penser que nous nous
rejoindrons en amants, en compagnons et en époux, jamais en bail. J’ai attendu
ce moment toute ma vie.
    Il lâcha ses mains pour la saisir
sans délicatesse aux épaules et elle frissonna.
    — Comprenez-vous ? Je ne
suis plus jeune. Je sais ce que j’ai vécu, je sais ce dont je ne veux plus.
Mieux, je sais ce que je veux. Vous. (Il ferma les yeux et elle regretta le
poids de son regard dans le sien). Ah, madame, je suis fou de joie… Je ne suis
pas homme de distraction. Mon grand bailli, que vous connaissez, me trouve bien
pesant. Tout le monde. Je manque de légèreté, d’humour sans doute. Savez-vous
que j’ai ri grâce à vous, pour la première fois depuis mon enfance, lorsque
vous m’avez conté votre mésaventure avec les abeilles. Dès ce moment-là,
j’aurais dû me douter que vous veniez de vaincre sur mon cœur, à jamais.
Madame, la vie me vient. De vous. Je la sens qui dévale dans mes veines. Ça
pique, ça brûle et ça enivre. Quand ? Quand puis-je vous présenter mes
cygnes arrogants, mes tendres daims albinos et mes paons difficiles afin de
leur expliquer que vous devenez leur maîtresse ?
    Les événements se précipitaient
trop. La peur commençait d’envahir Agnès. Tout était si nouveau, si différent.
Et pourtant, elle tenait à cet homme. Étrange sensation, qu’elle découvrait,
n’ayant jamais éprouvé d’intenses sentiments pour autre que ses filles et
madame Clémence. Toutefois, Artus était un homme, indiscutablement, et elle
n’en avait auparavant jamais aimé de la sorte.
    — Mais Souarcy, mes gens… je ne
puis les abandonner.
    — Nous nommerons un intendant.
Quant à vos gens, notamment ce futé Clément, ceux que vous choisirez vous
suivront et seront les bienvenus en notre comté.
    Elle ferma à son tour les yeux et
murmura contre lui :
    — Je vous aime… je vous aime,
je vous aime… Ah… que j’aime prononcer « je vous aime » que j’ai
réservé jusque-là à… des enfants.
    Elle sentit ses lèvres sur les
siennes. Il lui sembla que le baiser de gorge

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