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Le sang des Borgia

Le sang des Borgia

Titel: Le sang des Borgia Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mario Puzo
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n’était pas libre, au moins satisfaisait-il Alexandre. Contemplant le sanglier mort, il se dit aussi qu’il avait de la chance d’être à la hauteur de sa tâche.
    Au crépuscule, César et Lucrèce, main dans la main, se promenèrent le long des rives du lac. Frère et sœur formaient un beau couple : très brun, il contrastait avec la beauté blonde de la jeune femme, dont les yeux noisette brillaient d’intelligence. Ce soir-là, pourtant, elle était très agitée.
    — César, père a commis une erreur en me contraignant à épouser Giovanni. Il me parle à peine, et toujours sur un ton grossier. Je savais bien que c’était un mariage inspiré par des raisons politiques, mais je ne me doutais pas qu’il serait malheureux à ce point.
    — Lucrèce, dit son frère d’une voix douce, tu sais bien que le More est le maître de Milan. Épouser Giovanni était le moyen de cimenter notre alliance avec lui à une période où nous en avions bien besoin.
    — Je sais cela, soupira Lucrèce en acquiesçant de la tête. Je croyais que je pourrais faire face. Mais dès la cérémonie, alors que nous étions agenouillés sur ces tabourets d’or ridicules, j’ai senti que quelque chose n’allait pas. Je voyais les cardinaux en soutane pourpre, les témoins du marié en costumes turcs, et je ne savais s’il fallait rire ou pleurer. Ç’aurait dû être une fête et je me sentais malheureuse comme les pierres.
    — Rien ne t’a donc plu ? demanda-t-il en souriant.
    — Si, toi, vêtu de noir. Et les gondoles vénitiennes ornées de milliers de roses.
    — Lucrèce, c’était insupportable pour moi. Je ne pouvais endurer l’idée de te voir dans les bras d’un autre. Si seulement j’avais pu être ailleurs ! Mais père a tenu à ce que je sois là. Mon humeur était aussi noire que ma tenue…
    Elle l’embrassa tendrement sur la bouche.
    — Giovanni n’est qu’un bravache arrogant. Et un amant déplorable ! Je n’échappe à ses griffes qu’en pleurant à chaudes larmes. Même son odeur m’est intolérable.
    — Tu te plais moins avec lui qu’avec moi ! lança César en s’efforçant de ne pas sourire.
    Lucrèce gloussa :
    — Mon cher amour, pour moi il y a autant de différence entre vous qu’entre le paradis et l’enfer.
    Ils franchirent un petit pont et entrèrent dans la forêt.
    — Ton époux me fait penser à Juan, dit César.
    — Juan est jeune, protesta sa sœur, peut-être changera-t-il. Ma véritable bénédiction est de t’avoir comme frère.
    César resta silencieux quelques instants, puis dit d’un ton très grave :
    — À la vérité, je crois que Geoffroi, et non Juan, est la malédiction de la famille ! Je me suis fait à sa stupidité, mais la vie qu’il mène avec Sancia est franchement scandaleuse ! À eux deux, ils ont plus d’une centaine de serviteurs ! De la vaisselle en or, des gobelets ornés de joyaux, deux cents convives chaque fois qu’ils en ont envie ! Cela porte tort à notre réputation ; et de surcroît, c’est dangereux pour le fils du pape de vivre ainsi.
    — Je sais ! Père s’en inquiète aussi, même s’il ne veut pas le reconnaître. Mais il lui pardonne, parce qu’il connaît ses faiblesses, et que de toute façon il l’aime moins que nous.
    César s’arrêta pour contempler Lucrèce à la lueur de la lune. Sa peau de porcelaine semblait plus lumineuse que d’habitude. Il prit son visage entre ses mains et la regarda bien en face, mais il y avait tant de tristesse dans ses yeux qu’il préféra détourner la tête.
    — Veux-tu que je parle à père pour lui demander ton divorce d’avec Giovanni ? Père t’adore, il y serait sans doute disposé. Ton époux y consentirait-il ?
    Elle sourit :
    — Il pourrait très bien vivre sans moi. Mais ma dot lui manquerait ! C’est la seule chose qui l’intéresse.
    César sourit à son tour :
    — Alors, j’attendrai le bon moment pour en parler à père.
    Comme le soir tombait sur le Lac d’Argent, Juan entreprit de montrer à Sancia, sa belle-sœur, l’ancien pavillon de chasse de son père, un peu à l’abandon depuis que le nouveau, plus élégant, avait été achevé.
    Sancia avait le même âge que lui, bien qu’elle parût beaucoup moins mature. Une beauté à l’aragonaise, avec de grands yeux verts, de longs cils et des cheveux d’un noir de jais. Elle avait un air un peu espiègle, qui donnait l’impression d’un esprit vif et joueur, mais ce n’était jamais

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