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Le sang des Borgia

Le sang des Borgia

Titel: Le sang des Borgia Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mario Puzo
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politiques ne l’intéressaient nullement – à dire vrai, elles l’ennuyaient à mourir. Tuer un tel pour un quelconque objectif militaire, et donc risquer la damnation éternelle, n’avait tout simplement aucun sens. Pour s’y risquer, il fallait que la raison en soit bien plus grave et personnelle.
    César, lui aussi, était troublé. Le souvenir de sa conversation avec Lucrèce lui pesait ; il ne pouvait fermer l’œil. Le pape, avait-il appris, s’était déjà retiré dans ses appartements. Il fallait pourtant qu’il lui parle.
    Alexandre était à son bureau, signant des papiers présentés par deux secrétaires, qu’il congédia en voyant entrer son fils. Un feu de bois brûlait dans l’énorme cheminée.
    Le pape avait déjà revêtu une chemise de nuit de laine, recouverte d’une tunique de soie ornée de fourrure ; il était coiffé d’une barrette rouge vif très simple. Alexandre disait souvent que, si le pape doit toujours exhiber en public les richesses de l’Église, il doit dormir aussi simplement qu’un paysan.
    — Qu’a donc confié ma fille à son frère préféré ? demanda-t-il. Elle s’est plainte de son époux ?
    Le ton était ironique ; César fut surpris de la sagacité de son père.
    — Elle est malheureuse avec lui, répondit-il.
    Alexandre prit un air pensif :
    — Je dois bien reconnaître que ce mariage me déçoit ; il n’a pas donné les résultats politiques escomptés. Le neveu du More ne nous a pas été d’une grande utilité ; je ne l’ai jamais vraiment aimé, et c’est un soldat des plus médiocres. Le Maure lui-même a perdu de sa valeur : il est trop changeant, on ne peut lui faire confiance. Nous avons évidemment besoin de lui pour la sainte ligue, mais c’est quelqu’un d’imprévisible. Et pourtant, il nous faut bien tenir compte des sentiments de ta sœur, ne crois-tu pas ?
    César comprit à demi-mot. Lucrèce serait ravie, il passerait pour un héros à ses yeux.
    — Comment faire ? demanda-t-il.
    — Le roi Ferdinand m’a demandé de nouer amitié avec le royaume de Naples. Le mariage de Geoffroi avec Sancia répondait déjà à cette exigence, mais cela ne suffira pas, il se pourrait même que cela nous ait fait du tort.
    Alexandre sourit et reprit :
    — Une nouvelle alliance pourrait réparer les dégâts.
    — Je ne te comprends pas, père, dit César en fronçant les sourcils.
    Il y avait dans les yeux du pape une lueur espiègle :
    — Alfonso, le frère de Sancia ! Ce serait un époux bien plus digne de Lucrèce ! Il est toujours un peu risqué d’offenser les Sforza, mais cela vaut la peine d’y réfléchir. Dis à ta sœur que j’y penserai.
    Se levant, Alexandre alla remuer le feu à l’aide d’un des tisonniers posés sur le sol de pierre.
    — César, tu comprends bien qu’il nous faut reprendre le contrôle des États pontificaux. Ils sont aux mains de nobles qui se font la guerre, oppressent le peuple et défient l’autorité de l’Église Il faut les mettre à la raison.
    — Et tu as un projet en ce sens.
    — Les rois de France et d’Espagne soumettent chacun leur royaume à leur autorité. Il nous faut faire de même, c’est indispensable pour la papauté comme pour le peuple – et aussi pour notre famille. Si les Borgia ne dominent pas l’État, pour contraindre les aristocrates locaux à reconnaître l’autorité du pape et de Rome, nous serons tous en grand péril.
    — Il nous faut des forteresses bien défendues, dit César d’un ton résolu. Cela permettra d’empêcher les soulèvements locaux, et aussi toute invasion étrangère visant à s’emparer des États pontificaux.
    Alexandre semblait perdu dans ses pensées et ne répondit rien.
    — Je suis à ton service, père, dit César en s’inclinant : je suis cardinal de l’Église.
    Le pape se rassit :
    — Inutile de te dire à quel point vous serez menacés si je meurs et si un cardinal aussi hostile que Della Rovere est élu. Je préfère ne pas penser à ce qui arriverait à ta sœur ; elle connaîtrait un enfer encore pire que celui de Dante.
    — Père, pourquoi me dis-tu tout ceci ? Nous n’avons nul besoin de trembler ; tu n’as pas encore entamé les bonnes œuvres que tu dois accomplir pour l’Église, et je suis certain que tu vivras encore bien des années.
    Alexandre baissa la voix :
    — Quels que soient les périls, il n’y a au Vatican que deux personnes à qui tu puisses faire entièrement confiance. L’une est

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