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Le sang des Dalton

Le sang des Dalton

Titel: Le sang des Dalton Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ron Hansen
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Ils séjournèrent à l’hôtel Eldridge House dans la suite rose et virent l’opérette Trial by Jury de Gilbert et Sullivan au music-hall, de l’autre côté de la rue. Bill présenta son épouse à Charles Ball, de la banque C. M. Condon and Company et ils sollicitèrent un prêt pour l’achat d’une maison d’un étage assez grande pour accueillir une famille de huit personnes, à Havana, au Kansas. Mon frère proposa en guise de garantie sa ferme céréalière en Californie, que gérait son beau-père. Mais en cette année 1892, il régnait à Wall Street et à Washington une panique financière presque équivalente à la Grande Dépression dont nous commençons tout juste à nous rétablir et c’était une mauvaise période pour avoir besoin d’argent. Ball leur remit un formulaire de demande de crédit, procédure alors peu commune, et Bill déchira l’imprimé avant de le jeter à la poubelle et de sortir du bureau du banquier comme une tornade. Il traversa la place en briques jusqu’à l’établissement plus modeste de la First National Bank, qui ressemblait à une quincaillerie et où il parlementa un moment avec Tom Ayres, le caissier principal. Sa requête fut à nouveau rejetée. « Je n’essaye pas de me défiler, Bill, exposa Ayres, mais je ne peux tout simplement pas. Cette banque ne saurait traiter avec les Dalton. Tes frères te privent de cette possibilité. »
    Bill, son épouse et ses enfants s’étaient attardés à Bartlesville encore une semaine, puis mon frère avait débarqué à l’abri en gazon avec deux gâteaux des anges, son violon et, ce soir-là, nous avons fait la noce  – la bande des Dalton plus trois prostituées grassouillettes qui paradaient en gaine et porte-jarretelles et deux aspirants hors-la-loi scrofuleux qui avaient à peu près trois ans de moins que moi et que Bob avait invités à manger, à condition qu’ensuite ils déguerpissent.
    Ce genre de visite était devenu de plus en plus habituel à mesure que nous gagnions en notoriété. Laboureurs, tanneurs, poseurs de voies, chapardeurs et autres fermiers mennonites descendaient de cheval à deux ou trois kilomètres de l’abri, puis ils s’avançaient péniblement dans l’herbe ondoyante, manteau boutonné en dépit de la chaleur, souriant à deux cents mètres de distance afin d’établir leur confraternité et leurs bonnes intentions. Tout ce qu’ils souhaitaient, c’était nous voir de près, serrer la pince à l’un d’entre nous et nous assurer que quand il était question des Dalton dans les journaux, ils lisaient jusqu’au dernier mot en désapprouvant tout du long le parti pris de la plupart des éditeurs. Selon eux, nous étions de grands lions des plaines, des légendes vivantes, des saints, nous avions déjà surpassé la bande des frères James et nos noms figureraient en gros caractères dans les annales de l’histoire. À la tombée de la nuit, un soir, une gamine de treize ans avait retroussé sa robe devant Bob et lui avait déclaré : « Je veux porter ton enfant. » Mon frère s’était contenté de répliquer qu’il était en plein milieu de l’ Almanach du fermier et qu’il avait envie de voir comment ça se terminait. Je ne fus guère surpris quand, plus tard, j’appris que Chris Madsen tenait l’abri sous surveillance et qu’une photographie des lieux figurait dans notre dossier de plus en plus volumineux, si bien que trois bracelets élastiques étaient nécessaires pour le fermer.
    Le jour où nous est parvenue la nouvelle que le lâche Robert Ford qui avait abattu Jesse James, avait à son tour été assassiné dans le Colorado, mon frère Bill s’est ramené pour fêter ça avec deux autres gâteaux des anges. Il m’a suggéré d’aller au bord de la rivière et d’amorcer quelques hameçons avec des boules de mélasse et de maïs soufflé pour tâcher d’attraper quelques poissons-chats et comme je n’avais pas d’objection, nous avons paressé dans l’herbe avec des lignes attachées aux orteils, comme dans quelque vignette d’un passé américain plus heureux tirée d’un calendrier.
    « J’ai un nouveau coup en projet », m’a annoncé Bill.
    J’ai craché quelques coquilles de graines de tournesol.
    « Ce serait en terrain familier, à Pryor Creek. Le train qui relie Kansas City, dans le Missouri, à Denison au Texas. Ça devrait être parfait pour nous.
    — Il est trop tôt pour dévaliser un autre train, Bill.
    — C’est ce que

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