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Le scandaleux Héliogabale : Empereur, prêtre et pornocrate

Le scandaleux Héliogabale : Empereur, prêtre et pornocrate

Titel: Le scandaleux Héliogabale : Empereur, prêtre et pornocrate Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Emma Locatelli
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repaissait de ce spectacle, regardait en souriant les couteaux qui tuaient sans relâche, les bêtes qui tordaient leur cou en un dernier élan, la gueule toute grande ouverte, les yeux exorbités par la peur et l’odeur de la mort.
    Il regardait, avec une jubilation incontrôlable, ses courtisans exécuter leurs danses trépidantes et impudiques, il écoutait avec un ravissement proche de la pâmoison le rythme enragé des cymbales et des sistres.
    Sur les banquettes, les sénateurs, et pas seulement ceux de la vieille garde, qui en avaient assez vu et entendu, laissèrent éclater leur indignation à mi-voix :
    — Ridicule !
    — Scandaleux !
    — Quelle honte !
    Silvius Messala se leva pour quitter son siège, mais aussitôt un garde sortit son glaive de son fourreau, l’enjoignant par ce geste à reprendre sa place.
    — Obligera-t-on encore longtemps les honnêtes gens à supporter ces débordements infâmes ? s’écria le clarissime en jetant autour de lui un regard affolé et outré.
    Pomponius l’attrapa par la manche de sa toge, l’obligeant à se rasseoir et surtout à se taire.
    — Ce n’est ni le lieu ni le moment, lui conseilla-t-il calmement. Antonin a des yeux et des oreilles sur ces gradins, aussi méfie-toi. Ton emportement pourrait causer ta perte.
    Ignorant tout du sentiment de colère que le spectacle des liturgies élagabaliennes avait provoqué dans les rangs de l’aristocratie, Varius, tout à son bonheur, s’était mis lui aussi à la danse.
    Le cœur gonflé, le cerveau troublé, dévoré par une fièvre ardente, il évoluait à présent sur l’esplanade en faisant tantôt des gesticulations grotesques, tantôt des mouvements pleins de grâce féminine, un moment secoué par des spasmes frénétiques, l’instant d’après virevoltant comme un papillon, ondulant comme une couleuvre, s’élançant à droite, à gauche, s’abandonnant dans des postures affectées, redressant la tête avec un mouvement ondoyant de paon qui se rengorge, toujours léger, aérien, comme si ses membres étaient sans pesanteur et délivrés du poids de sa robe surchargée d’amulettes et de pierres.
    De temps à autre, il interrompait son audacieuse chorégraphie et demeurait parfaitement immobile, face à son dieu. Il levait alors sa haute tiare entre ses mains, la faisait tourner lentement au-dessus de sa tête, puis s’accroupissait subitement en la dissimulant dans son dos, selon le rituel des grands prêtres, imitant ainsi ce que tous pensaient être la révolution quotidienne du soleil et sa disparition nocturne dans un néant mystérieux, un abîme obscur et vertigineux.
    Puis, aussitôt après, il reprenait ses trémoussements et ses déhanchés indécents.
    — Décidément, chuchota le sénateur Pomponius à son impétueux voisin, ce fou n’épargne ni sa pudeur ni la nôtre.
    — Là, il dépasse les bornes ! s’exclama Silvius Messala.
    — Chut ! conseilla Pomponius. On pourrait t’entendre.
    — Mais je n’ai pas l’intention de me taire !
    — Passe chez moi, lui proposa Pomponius, nous pourrons parler plus tranquillement.
    — Ce soir ?
    — Viens me retrouver lorsque la petite fête du Syrien sera finie.
    — Je viendrai, sois-en sûr ! répondit Messala, sans quitter des yeux et empli de dégoût, la silhouette de Varius qui continuait de virevolter et de frétiller devant l’autel monumental.

CHAPITRE XIX
    La nuit était largement entamée lorsque Silvius Messala frappa à la lourde porte en bois ornée de clous qui fermait la maison de Pomponius.
    Une esclave l’introduisit dans le vestibule et l’invita à le suivre jusqu’à son maître. Ils traversèrent l’atrium en silence, puis le vaste péristyle planté de lauriers-roses et de plantes grasses. Sous la lumière pâle de la lune, les petites statues des faunes et des nymphes semblaient animées et projetaient leurs ombres espiègles sur les murs de clôture peints de paysages bucoliques.
    Messala entra dans une petite salle sans fenêtre où le sénateur l’attendait, attablé devant ses dossiers et ses livres de comptes.
    — Je suis content que tu sois venu, dit Pomponius en l’accueillant chaleureusement. J’ai cru que tu avais changé d’avis. Les rues de Rome sont pleines de danger, la nuit tombée.
    — Si tu me connaissais mieux, tu saurais que je ne m’effraie pas facilement, fit Messala en lui rendant son sourire.
    Pomponius lui désigna un siège à accoudoirs et alla

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