Le scandaleux Héliogabale : Empereur, prêtre et pornocrate
torches allumées à sa gloire dans le camp de Raphanae, de leur victoire dans la plaine d’Immae, tous les rappels de ces triomphes s’évanouirent devant la brutalité de la réalité.
Elle ferma les yeux et exhala un long soupir tourmenté. Varius avait osé enlever une vestale, mais le pire, elle en était certaine, était encore à venir.
* * *
Pendant que sa grand-mère cherchait désespérément un repos qui ne venait pas, l’empereur, en peignoir de soie, lavé et parfumé, entrait dans les appartements de sa jeune épouse.
Après une cérémonie discrète et rapide, à laquelle Maesa avait refusé d’assister, Aquilia Severa avait été conduite dans la chambre nuptiale afin que ses suivantes la préparent pour sa nuit de noces.
Mais lorsque Varius se présenta à l’entrée de la pièce, celle-ci se tenait immobile près du lit, longue et droite dans son long manteau aux plis raides. Manifestement, elle avait refusé de se déshabiller.
L’adolescent n’osa tout d’abord pas franchir le seuil qui le séparait de cette divine entité et marqua une hésitation puérile. La respiration lui manquait, l’audace lui faisait soudainement défaut devant cette beauté si proche de la perfection. À présent qu’il se trouvait seul avec sa jeune épouse, il commençait à éprouver une certaine nervosité.
Dans ses rêveries amoureuses, il ne s’était jamais imaginé sa vestale comme une femme et n’avait jamais ressenti ces pulsions du désir qui troublent les sens des amants. Il avait pensé à elle comme à une pure abstraction, une image, une étoile, une déesse, sans se représenter d’une manière nette tous les détails de leur nuit de noces, ni les actes ni les scènes familières de l’intimité conjugale.
— Aquilia Severa, dit-il en s’approchant d’elle, mais en s’arrêtant à une distance respectueuse, tu dois ôter tes vêtements.
Un silence glacial accueillit sa proposition.
— Ce soir, déclara l’empereur avec un sourire gauche et emprunté, nous allons engendrer un enfant divin. Tu ne peux pas rester habillée.
La jeune fille secoua légèrement la tête, en signe de refus. Une onde magnifique secoua alors les spirales blondes de ses longs cheveux. Varius en fut ébloui.
— Je peux t’aider, si tu le souhaites, proposa-t-il en tendant vers la sublime jeune fille une main hésitante.
Aquilia Severa l’accabla d’un regard de dédain et, d’une simple inflexion de ses sourcils pâles lui fit aussitôt baisser sa main, comme s’il venait de transgresser le plus terrible des interdits.
— Je… je suis désolé, bafouilla-t-il. Je ne voulais pas t’offenser.
La jeune fille se tourna, hautaine, dure, lointaine et désespérément muette, n’offrant au regard de l’empereur que son profil d’une régularité parfaite.
— Ta chambre te plaît-elle ? demanda Varius pour détendre l’atmosphère.
La vestale lui lança de nouveau un coup d’œil glacial et mit ses bras en croix sur ses seins, dans une attitude parfaitement virginale et pleine de sombre majesté.
— Cette chambre sera mon tombeau, répondit-elle d’une voix où ne perçaient ni colère ni peur, mais d’un timbre lugubre, si grave qu’il avait des accents d’outre-tombe. Je n’en sortirai plus et je ne veux recevoir aucune visite.
Cette proposition, loin de déplaire à l’empereur, lui parut charmante.
— Il sera fait selon ta volonté, répliqua-t-il. Je serai le seul à te tenir compagnie et je garderai ainsi pour moi seul le privilège de t’admirer.
Peu lui importait que le monde entier ne pût s’extasier devant cette merveille, du moment qu’il pouvait, lui, au gré de son désir et de son plaisir, se plonger dans la contemplation de sa beauté. Et la pensée qu’il était enfin l’époux de cette créature idéale, qu’il allait la posséder corps et âme et être le gardien d’un si splendide trésor lui donna un léger vertige.
La vestale se tourna, darda sur lui ses iris bleus.
— Qu’on ne m’apporte ni aliment ni boisson, dit-elle. Je ne veux rien. Rien qu’une lampe. Une lampe dont la mèche s’éteindra lorsque les dieux m’auront pris mon dernier souffle de vie. C’est ainsi que meurent les vestales qui ont failli à leur vœu de chasteté.
— Je suis l’empereur, Aquilia. Et je suis également grand pontife et grand prêtre d’Élagabal. Je t’ai relevée de tes obligations.
— Personne ne peut soustraire une vestale à son
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