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Le scandaleux Héliogabale : Empereur, prêtre et pornocrate

Le scandaleux Héliogabale : Empereur, prêtre et pornocrate

Titel: Le scandaleux Héliogabale : Empereur, prêtre et pornocrate Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Emma Locatelli
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t’écoute, répéta l’empereur. Parle.
    — Je n’ai rien dit, répondit Ciconia.
    — J’ai pourtant vu tes lèvres bouger.
    — Tu te seras trompé, César. J’ai simplement toussé.
    Un instant décontenancé, l’adolescent reprit vite toute son assurance et sa suffisance.
    — Sans doute, dit-il. Mais j’aimerais t’entendre. Veux-tu t’exprimer ?
    Le ventripotent Ciconia esquissa un sourire ironique.
    — En de telles circonstances, je préfère me taire.
    Et il ajouta :
    — Si tu le permets.
    La formule de déférence arriva trop tard pour que Varius n’y vît pas une insolence voilée.
    Il tenta de contenir sa rage et fixa dans son esprit l’image du gros impertinent.
    — Comment t’appelles-tu ? demanda-t-il.
    — Didius Ciconia.
    — Je tâcherai de m’en souvenir.
    Puis il se leva dans un bruissement de soie froissée.
    — Si personne n’a rien à dire, déclara-t-il, alors je prends acte de votre assentiment et je décrète la séance levée !
    Comme personne ne bougeait, il s’emporta :
    — Êtes-vous sourds ? J’ai dit : rentrez chez vous !
    Les sénateurs quittèrent leur place, résignés, incapables de cacher sur leurs visages l’expression d’hébétement et de frayeur qui s’y exprimait.
    Ils défilèrent devant la tribune pour regagner la sortie, courbant la tête devant l’empereur qui les dévisageait maintenant avec un sourire narquois et écœuré.
    — Je les ai réduits au silence comme des enfants bavards ! dit-il en s’adressant au princeps senatus, également décomposé. Regarde-les prendre la fuite comme des moutons !
    Et, observant les clarissimes se presser entre les lourdes portes de la Curie, il les railla ouvertement d’un « Bêê… !! Bêê… ! » qui les fit tous pâlir de honte.
    * * *
    La malheureuse Paula Cornelia fut répudiée, dépouillée de son titre d’ Augusta et de tous les honneurs, mais ne retourna pas chez son père. Varius, dans un dernier accès de cruauté, exigea qu’elle se retire dans une chambre isolée de la Domus Augustana pour y passer le reste de sa vie.
    Quant à la jeune Aquilia Severa, elle fut arrachée de force à la maison des vestales, conduite sous bonne garde au palais et offerte sans autre forme de procès au caprice de l’empereur.
    Mais cette seconde union, contrairement à la première, ne donna pas lieu aux réjouissances traditionnelles et publiques. Cette fois, Rome ne fit pas la fête. Ce mariage prit plutôt l’allure d’un deuil général dans toute la ville. Les habitants de l’ Urbs manifestèrent clairement l’indignation que soulevait en eux cette union sacrilège. Le travail s’arrêta dans les ateliers et dans les champs, les affaires furent suspendues et un grand nombre de boutiques fermèrent pour la journée.
    Maesa était atterrée. Elle n’avait pu empêcher ce désastre et ne voyait pas comment en réparer les dégâts.
    Comme toujours, elle avait morigéné, tancé, menacé son petit-fils, mais encore une fois elle avait perdu. Et cette dernière défaite la laissait, elle, la femme de caractère, elle, la grand-mère énergique et d’ordinaire si pleine d’une volonté intransigeante, singulièrement abattue.
    Pour la première fois de sa vie elle se sentait impuissante, vieille et inutile. Pour la première fois depuis son retour à Rome, elle prenait vraiment conscience que Varius lui échappait. Oui, elle le reconnaissait aujourd’hui : cet enfant apathique et insignifiant, qu’elle avait cru pouvoir aisément soumettre à sa poigne, lui échappait comme une petite plume agile et vive, soulevée par les forces invisibles d’un vent furieux. Comment en était-elle arrivée là ? Comment avait-elle pu laisser s’envoler si loin cette chose sans consistance, cette poussière d’humanité qu’était Varius ?
    Masea se retourna plusieurs fois dans son lit, étendant ses jambes raides et son grand corps rompu par les épreuves des dernières heures, cherchant dans la détente de ses muscles et de ses nerfs un sommeil rapide.
    Une inquiétude douloureuse lui fit pousser un gémissement sourd. À quoi lui avaient servi ses sacrifices, ses efforts acharnés, cette patience, cette prudence avisée qui avaient guidé toute son existence ? « Quel désastre », pensa-t-elle.
    Le rêve, l’ambition, les promesses de toute une vie allaient être anéantis par la folie d’un seul être. Le souvenir de l’acclamation de son petit-fils, des milliers de

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