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Le scandaleux Héliogabale : Empereur, prêtre et pornocrate

Le scandaleux Héliogabale : Empereur, prêtre et pornocrate

Titel: Le scandaleux Héliogabale : Empereur, prêtre et pornocrate Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Emma Locatelli
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l’âme humaine, l’adolescent ne faisait plus guère de distinction entre le plaisir et ses aberrations.
    Et son imagination tarie, qui ne parvenait plus à s’épanouir que dans l’excès, l’outrance et la démesure, était désormais contrainte, pour retrouver quelques lueurs de volupté, d’inventer des distractions toujours plus originales, des jouissances toujours plus inédites. Aussi l’adolescent devait-il aller toujours plus loin dans les fantaisies exorbitantes, les gaspillages effrénés, les innovations scandaleuses : il lui fallait maintenant donner des naumachies dans des gigantesques bassins creusés à main d’homme et remplis de vin, organiser des courses d’éléphants dans les rues de la ville, couler des navires chargés de marchandises dans le port d’Ostie, ouvrir dans son palais des bains publics, des cabarets, des lupanars.
    Tout lui semblait permis, tout lui semblait normal, puisqu’il était l’empereur. Il pouvait circuler sur des chars en or, attelés à des femmes nues ou à des fauves, se baigner avec son amant, lui épiler le corps et s’accoupler avec lui sous le regard amusé de ses courtisans, se livrer sans retenue à toutes les turpitudes inimaginables en compagnie de ses parasites, passer de robe en robe, de bijou en bijou, de farce en farce, d’orgie en orgie.
    Et puisqu’il était né pour jouir, puisqu’il était prédestiné à choquer ce vieux monde latin rigide et poussiéreux, il préférait voir grand dans la provocation plutôt que de languir dans des plaisirs ordinaires qui, tout en suscitant les mêmes reproches, en l’avilissant également, lui apportaient nettement moins de satisfaction.
    — La simplicité me fait horreur, se plaisait-il à déclarer. Il n’y a de grandeur que dans le luxe et le gâchis ! La sagesse et la pudeur ? Voilà deux mots qui me font vomir !
    Que pouvait-il y avoir de plus « impérial » que d’inventer une morale de la débauche et de la perversion, de faire de l’obscénité une habitude, du vice une vertu, de l’extravagant une norme, de la folie un art de vivre ?
    Libre et obstiné, il courait ainsi, jour après jour, après son rêve insensé d’un ordre nouveau et poursuivait, avec un acharnement proche de l’obsession, son entreprise de destruction de toutes les valeurs et de tous les principes chers aux Romains.
    C’est dans cet état d’esprit qu’il convoqua, la veille des ides de septembre, une dizaine de consulaires (143) , afin de faire savoir aux représentants de la Curie que Rome n’avait pas d’autre maître et le Sénat pas d’autre bourreau que lui.
    * * *
    — Est-ce bien nécessaire ? avait demandé Soemias, effrayée à l’idée que cette nouvelle initiative ne soit la goutte d’eau qui fasse déborder le vase.
    — Je me suis juré de leur faire ravaler leur morgue, avait répondu l’empereur fermement. Je ne trouverai pas le repos tant que je n’aurai pas réduit ces esclaves en toge à l’état de légumes !
    Chez Varius, en effet, les idées fixes avaient la ténacité des maladies incurables. Elles le pénétraient, le domptaient, ne lui laissaient ni le répit ni le loisir de penser à autre chose.
    Le jour de la confrontation, afin de pousser jusqu’à l’absurde sa logique de subversion et obéissant à son goût immodéré du paradoxe, il se vêtit d’une robe de femme parfaitement indécente, se maquilla outrageusement et posa, sur son échafaudage de tresses postiches… la couronne de laurier !
    Ce fut dans cet accoutrement grotesque, muni de son sceptre et accroché au bras de Hiéroclès comme une maîtresse amoureuse, qu’il fit son apparition dans la grande salle d’audience. Toute sa petite cour de cochers et de gitons lui emboîtait le pas, Claudius en tête, suivi de Gordius, de Protogène, d’Euboulos et de Myrismus.
    Une fois installé sur le trône, l’adolescent fit signe aux dix Pères conscrits de s’approcher et leur désigna le pan de son vêtement.
    Le sénateur Appicus, qui savait qu’Antonin avait institué la règle de l’ adoratio au palais, s’avança le premier et fit la génuflexion exigée. Agenouillé devant l’empereur comme devant un dieu, il baisa alors, non pas sa main, mais le bas de sa robe. Scandalisés, les autres sénateurs n’en suivirent pas moins son exemple et tous, les uns après les autres, vinrent s’abaisser devant Varius et se résignèrent à ce rite oriental qui les répugnait.
    — Je vous ai

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