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Le scandaleux Héliogabale : Empereur, prêtre et pornocrate

Le scandaleux Héliogabale : Empereur, prêtre et pornocrate

Titel: Le scandaleux Héliogabale : Empereur, prêtre et pornocrate Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Emma Locatelli
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longtemps…
    Mais l’aurige dédaigna les doigts qui l’invitaient à de coupables distractions. Ses yeux quittèrent le visage de l’empereur pour se perdre dans d’inavouables songes, lesquels, Varius en fut certain, lui rappelaient son jeune amant.
    — Manifestement, ton Hiéroclès de malheur occupe toutes tes pensées ! protesta Varius en baissant sa main et se renfrognant. Mais tu pourrais au moins te montrer flatté de l’intérêt que te porte le maître de Rome !
    — César, tu n’es pas sérieux ! s’exclama Gordius avec une franchise qui déconcerta l’adolescent. Je suis trop vieux et bien trop rustre pour le divin jeune homme que tu es !
    — Tu ne peux deviner ce qui me plaît ou me déplaît, dit l’empereur d’un ton bougon.
    — Je sais que tu te lasserais vite de partager ta couche avec un ours affreux tel que moi, aux mains calleuses et à la peau dure. Pourquoi me proposes-tu tes faveurs ? As-tu peur de ne pas séduire ? Veux-tu rivaliser avec Hiéroclès ? Tu es si jeune et si beau, tu seras toujours aimé et tu seras toujours désiré !
    — Peut-être, répliqua Varius avec une mélancolie un peu théâtrale. Mais comment saurai-je si c’est l’homme ou l’empereur que l’on aime ?
    Ses paupières s’affaissèrent doucement et il devint tout à coup extrêmement pensif. Il devait se l’avouer, ce Gordius l’intéressait et la perspective de passer la nuit entre ses bras avait, dès le début du repas, allumé en lui un brûlant désir. Et pourtant, le refus du beau cocher ne parvenait pas à provoquer sa colère ni même sa contrariété. Quant à l’adoration de Gordius pour son mystérieux Hiéroclès, si surprenant que cela pût lui paraître, elle n’éveillait en lui aucune jalousie. Il admirait cet homme. Sa sincérité et son aplomb lui plaisaient et le changeaient agréablement des plates flatteries auxquelles ses courtisans l’avaient habitué et dont il ne tirait aucune satisfaction. Bien au contraire, sa franchise le rassurait et lui donnait une force nouvelle qu’il n’avait jamais ressentie, un peu comme si le courage et la fougueuse inconscience de l’aurige insufflaient dans ses veines l’énergie vitale qui lui manquait.
    Il se redressa soudain sur le lit, un éclair brillant dans le regard.
    — Mes amis, déclara-t-il en proie à une gaieté subite, j’ai une bonne nouvelle à vous annoncer !
    Protogène, le premier, abandonnant les cuisses et les seins de Soemias, leva des yeux étonnés.
    — Désormais, lui lança Varius, tu ne courras plus dans l’arène. Te voilà promu conseiller et favori de l’empereur !
    Puis il se tourna vers Gordius, dont la mâchoire était tombée sous l’effet de la stupéfaction :
    — Quant à toi, mon cher ami, tu m’as fait voir ce soir des qualités qu’il est bien difficile de trouver par les temps qui courent. Aussi, je veux te remercier en te nommant préfet des vigiles !
    Les deux cochers, tout à coup dégrisés, le regardèrent avec des yeux incrédules, cherchant à deviner s’il ne se moquait pas d’eux.
    Le praefectus vigilum, chargé d’assurer l’ordre à Rome et de commander les sept cohortes qui composaient la milice urbaine, était toujours recruté dans l’ordre équestre. Une telle promotion, pour des esclaves, était donc impossible.
    Protogène et Gordius prirent d’abord cette annonce pour une blague inspirée par l’ivresse. Mais comme l’adolescent ne démentait pas ces propos et conservait une attitude d’une grande solennité, ils comprirent que la Fortune, ce soir, leur avait bel et bien souri.
    Sur son lit, Valerius Comazon avait blêmi. Assommé par cette nouvelle qui, il le savait mieux que quiconque, n’était pas une mauvaise plaisanterie, il plongea les yeux dans son assiette, sur les restes de son repas de fête, comme s’il contemplait, d’avance, les débris de sa précaire carrière de praefectus urbi.
    — Mais voilà que je t’oublie ! s’exclama l’empereur en s’adressant au mendiant qui somnolait, la panse remplie comme une outre. Qu’est-ce qui te ferait plaisir ? Parle et je satisferai toutes tes volontés, car je suis le bienfaiteur de tous les pauvres de Rome !
    Le miséreux, décontenancé par une telle question, cligna plusieurs fois son œil borgne, sans pouvoir prononcer un seul mot, ce qui déclencha l’hilarité de l’adolescent.
    — Eh bien, à toi, digne fils de Polyphème le Cyclope, je donne toutes les coupes et

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