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Le secret de la femme en bleu

Le secret de la femme en bleu

Titel: Le secret de la femme en bleu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marc Paillet
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secrète. Après tout, le silence est préférable à une vérité travestie.
    — Ni silence ni mensonge, répliqua Lithaire. Je suis ici pour veiller sur toi et sur ton fils, au besoin pour vous protéger.
    Le visage d’Agnès exprima une vive inquiétude.
    — Me protéger ? Et de quoi ? Qu’ai-je donc à craindre entre ces murs ? Quel péril pressant me menace ?
    Elle jeta un regard sur le berceau où dormait son enfant.
    — Sais-tu, Lithaire, puisque tel est ton nom, que, loin de me rassurer, ta venue avive mes pires craintes, oui, les pires !
    Elle poussa un long soupir.
    — Qui t’a envoyée près de moi ? L’abbé Erwin, n’est-ce pas.
    — Lui-même, car sa sollicitude pour toi…
    — Me crois-tu aveugle, sourde et sotte de surcroît ? lança Agnès. N’est-ce pas précisément cette sollicitude qui renforce mes inquiétudes ?
    Elle fixa l’assistante du Saxon.
    — Un couvent comme celui-ci, au cœur d’une grande cité, n’a rien, Lithaire, d’un lieu où les bruits du monde ne pénètrent jamais. Tout au contraire ! Plus tardivement sans doute d’ailleurs, on finit par être au courant de tout. Oui, de tout, surtout quand on n’est pas vraiment cloîtrée. C’est ainsi que les rumeurs d’une tragédie qui aurait ensanglanté la résidence impériale aux calendes d’avril ( 36 ) sont parvenues jusqu’à moi. C’est ainsi que j’ai appris l’envoi en mission par Charlemagne du comte Childebrand et de l’abbé Erwin. Comment ne pas en déduire que l’affaire était d’une exceptionnelle gravité ? On m’a rapporté que les coups de main – on parle de trois ou quatre – avaient été exécutés par des bandits mystérieux, insaisissables, et que leurs actions avaient mis toute la cour en émoi. On a parlé d’Aquitains, oui, d’Aquitains…
    Elle s’arrêta et passa la main sur son front, comme pour en chasser une pensée douloureuse.
    — Et voici que tout récemment, reprit-elle, Véronique est venue me confier qu’un homme s’était présenté au portail et avait demandé à me rencontrer, qu’il avait insisté, et encore insisté. En vain, évidemment. Pourquoi ne m’en a-t-on rien dit ?
    Elle fit un pas vers le berceau où le nourrisson avait bougé, puis se retourna vers sa visiteuse.
    — Dans une cellule comme celle-ci, on a tout le loisir de méditer. Pourrais-tu imaginer que je n’aie tiré aucun enseignement, aucune conclusion de tout cela ? Et puis, à présent, te voici, sur ordre de l’abbé Erwin. Ah ! Dieu… J’ai peur, oui, peur, Lithaire, de comprendre quel rôle je joue malgré moi, même si je suis ici sans prendre part à rien parce que je suis prisonnière en dépit des apparences ! Et plus prisonnière encore depuis que tu es près de moi ! Ah ! comment supporter de ne pouvoir rien faire pour conjurer cette fatalité qui…
    Elle s’arrêta brusquement.
    — Mais je ne t’en dirai rien de plus. Que sais-je après tout de toi et de ta mission ? N’es-tu pas justement ici afin de recueillir les confidences que j’aurais la faiblesse de te livrer pour en faire part à tes maîtres ?
    — Si je ne savais pas que de telles paroles t’ont été dictées par Angoisse et Déraison, par la peur que ne se renouvellent de cruelles épreuves comme tu en as vécu en un passé récent, je t’aurais fait rentrer ces propos dans la gorge, lança Lithaire. Mais je sais, Agnès, ce que tu as souffert et ce qui te tourmente encore. L’abbé Erwin m’a confié quelle femme tu étais au pays des marais, de qui est ton fils, de quelle lignée il est le descendant, ce qu’il est advenu de tes compagnons, de celui que tu as aimé. Je sais que tu es fidèle, sans doute, à ce que tu fus.
    Des larmes vinrent aux yeux d’Agnès et elle murmura avec un visage crispé :
    — Ainsi, il m’a mise à nu devant toi ?
    — Non ! Il t’a rendu tes véritables habits. Pouvait-il, d’ailleurs, me confier la tâche qui est présentement la mienne sans me mettre au courant, sinon de tout, du moins de l’essentiel ?
    — A nu devant toi… dont moi, je ne sais rien, répéta Agnès d’un ton affligé.
    — Oh ! pas plus que toi je n’ai honte de ce que je fus et de ce que je suis, dit Lithaire avec un léger sourire. Vois-tu, je n’ai pas toujours été dame d’atour, et d’une princesse royale.
    — Voici donc la « novice » qui m’a été envoyée !
    — Je n’ai pas toujours servi des missi dominici…
    — Car tu les sers, depuis longtemps peut-être.
    — Oui,

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