Le Secret de l'enclos du Temple
des mortels ne voit qu'obscurité…
— Il est vrai, monseigneur, que je décèle parfois des solutions au milieu des embrouillaminis.
Le prince sourit, avant d'ajouter :
— Donc c'est M. de Rabutin qui vous envoie ici…
Louis ne parlait jamais de ceux qui lui demandaient son aide, mais Armand de Bourbon était prince de sang. Ne pouvant facilement lui mentir, il éluda :
— M. le comte ignore ma venue aujourd'hui, monseigneur, mais comme je vous l'ai dit, il m'a parlé du Temple, et je souhaitais en savoir plus.
— Bien sûr ! sourit le prince avec chaleur, sans dissimuler son incrédulité. Savez-vous, M. Fronsac, que les templiers auraient fait disparaître leur trésor juste avant leur arrestation ?
Cette fois, Louis accusa le coup. Il ne pouvait plus douter. Conti se trouvait ici pour le trésor. Mais qui lui en avait parlé ? Le comte de Rabutin ?
Brusquement, la lumière se fit dans son esprit. C'était forcément le grand prieur, puisqu'il était là ! Rabutin lui avait dit avoir parlé du document de Molay à son oncle et celui-ci avait dû tout répéter à Conti !
— On le prétend, monseigneur, mais ce n'est qu'une légende.
Le prince hocha de la tête sans laisser paraître ce qu'il pensait et fit demi-tour pour revenir vers le prieur. Louis le suivit.
— Sachez, monsieur, que vos recherches m'intéressent fort. Nous aurons sans doute l'occasion d'en reparler, déclara finalement Conti. Je vais prochainement monter ma maison, et j'aimerais vraiment avoir un gentilhomme de votre talent auprès de moi.
— J'en serais flatté, monseigneur.
— Je puis être un meilleur maître que mon frère, un plus fidèle soutien que Mgr Mazarin et un meilleur ami que M. de Rabutin. Je sais récompenser la fidélité, et je n'oublie jamais mes amis… ni les autres.
Sur cette demi-menace, le prince le salua avant de proposer au grand prieur de rentrer.
*
Louis demeura seul. Songeur et inquiet. Ce n'est qu'au bout d'un long moment de réflexion qu'il entreprit le tour des gisants de la salle. Il avait presque terminé quand revint le Suisse accompagné d'un officier, lequel se présenta comme le gouverneur de la tour. Il devait fermer la salle et souhaitait que le marquis de Vivonne s'en aille. Avant de partir, Louis l'interrogea.
— Ces gisants étaient à l'extérieur, lui expliqua l'officier. Et je crois que plus personne ne sait où se trouvaient les tombes. Sous cette salle, il n'y a qu'une cave à laquelle on accède par un escalier construit dans le mur.
— Qu'y a-t-il dedans ?
— Rien, ou plutôt de l'eau. Elle est inondée.
73 Les porcelaines les plus recherchées de Paris, à cette époque.
74 Le lecteur des Mémoires du cardinal de Retz retrouvera ici une partie des arguments que Paul de Gondi a développé, avec ses propres mots.
75 Voir Le Mystère de la chambre bleue , éditions du Masque.
76 Voir La Conjuration des Importants, éditions du Masque.
77 Voir La Conjecture de Fermat , éditions J.-C. Lattès .
78 Voir L es Ferrets de la reine , éditions J.-C. Lattès.
79 Jean-François-Paul de Gondi, La Conjuration du comte de Fiesque .
80 La Lettre volée , dans L'Homme aux rubans noirs , éditions J.-C. Lattès.
81 La Conjuration des Importants , éditions du Masque.
82 La Conjuration des Importants , éditions du Masque.
83 Jean du Bouchet, marquis de Sourches, prévôt de l'Hôtel du roi.
84 Le mariage avait eu lieu le lundi 24 février.
21
L e lendemain de la visite de son ami, Gaston se rendit à cheval chez la sœur de Madeleine Dufresne. Veuve, elle vivait dans une pièce glaciale au deuxième étage d'une maison en encorbellement à demi affaissée de la rue du Pont-aux-Biches, un cul-de-sac infâme situé entre les Madelonnettes et les talus de l'enceinte bastionnée.
Comme la dernière fois, Gaston laissa sa monture dans une écurie de la rue de Notre-Dame-de-Nazareth et fit le chemin à pied jusqu'au logis. Il y trouva les deux sœurs, ainsi qu'une petite fille, en train de ravauder des vêtements à la lumière du jour, une lumière fort parcimonieuse, car la pièce large et longue de douze pieds à peine ne bénéficiait que d'une petite fenêtre aux carreaux dépolis. Elles étaient assises sur la paillasse de l'unique lit de planches qu'elles partageaient la nuit. L'endroit et les trois femmes sentaient mauvais. Des poux couraient sur la courtepointe, des cafards et des punaises sur le sol. Il n'y avait ni cheminée ni
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