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Le Serpent de feu

Le Serpent de feu

Titel: Le Serpent de feu Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Fabrice Bourland
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composition : deux cuillères à thé de brandy, une de curaçao et une de laudanum. Vous m’en direz des nouvelles…
    — Sans façon.
    J’essayais de deviner ce qu’avait pu lui confier la jeune femme à l’oreille et, pendant quelques instants, je me perdis en supputations d’autant plus farfelues que Crowley, fermant les paupières, se délectait des câlineries que lui prodiguait de façon appuyée sa partenaire. Après avoir déboutonné davantage la chemise du mage, Eva s’attachait à présent à lui masser les épaules et la poitrine. La prédilection de Crowley pour les rites tantriques de « magie sexuelle » et d’« érotique sacrée », expressions bien obscures pour moi au demeurant, et qui avait été la source de nombreux scandales, en Angleterre comme aux États-Unis, m’était revenue brusquement à l’esprit.
    À cet instant, je notai que la pièce baignait dans un délicat et à peine perceptible parfum d’encens à la rose mousse des Indes.
    — La raison de ma visite est avant tout intellectuelle, déclarai-je un tantinet troublé par la tournure que prenaient les événements. J’ai beaucoup apprécié certains de vos ouvrages. Je pense en particulier à vos admirables récits mettant en scène le personnage de Simon Iff 2 …
    Crowley saisit aussitôt les poignets d’Eva pour lui faire cesser ses effleurements et il m’observa avec curiosité. Son front s’était plissé d’une multitude de petites rides, et la flamme de son regard, dont je devinais mieux la nature, s’était faite plus ardente. Entre l’alcool, le laudanum et le haschisch, je supputais que Crowley n’était plus tout à fait dans son état normal. Ou plutôt, il allait bientôt parvenir à celui dans lequel il se complaisait si souvent.
    Pour Eva, je ne la voyais pas goûter à la cuisine ni consommer une goutte de spiritueux.
    — Il me chaut que vous ayez lu ces textes, Mr Singleton. Ils ont pourtant paru il y a longtemps, et de manière très modeste, bien que ce fussent des œuvres ambitieuses où j’ai tenté de rapporter sous forme de fictions quelques-unes des expériences « surnaturalistes » qu’il m’était arrivé de vivre. Mais savez-vous que je suis aussi l’auteur de vers lumineux, parmi les plus beaux de la langue anglaise ?
    — Je l’ignorais.
    — Oui. C’est une étrange coïncidence qu’un comté aussi exigu que celui de Warwick ait donné à l’Angleterre ses deux plus brillants poètes – car on ne doit pas oublier William Shakespeare !
    Crowley s’esclaffa à sa propre boutade, sans se soucier de savoir si j’en mesurais la subtilité. Je jugeais qu’il était urgent de me placer sur le terrain de l’Aube dorée si j’espérais parvenir à des résultats. J’allais me lancer lorsque le mage dandy reprit la parole le premier d’un air satisfait.
    — Vous prisez donc ma prose ?
    — De même que j’estime d’une haute valeur les œuvres des écrivains qui ont fait partie comme vous de l’Aube dorée : Arthur Machen, Algernon Blackwood, Sax Rohmer… C’est en lisant certains de ces auteurs, enfin surtout Machen et William Butler Yeats, et aussi en liant connaissance avec Ashley Kirkby au hasard d’une rencontre, que j’ai eu vent de l’existence de cette société. Depuis, à mes heures perdues, j’essaie d’approfondir le sujet.
    — Hum ! Pour tous ceux que vous me citez là, ce sont d’honnêtes écrivaillons, sans plus. Ils ne peuvent prétendre atteindre à mon génie.
    — Cela va sans dire. Il y a cependant une chose que je me suis toujours demandé concernant l’Aube dorée.
    — Je vous écoute.
    — Quelle était la raison pour laquelle tant d’auteurs et d’artistes ont fait partie de cet ordre ? Qu’est-ce qu’ils venaient chercher au sein de la confrérie ? Quel enseignement particulier leur était-il délivré ?
    — Ho-ho ! Que de questions pressantes ! Mais pourquoi ne les posez-vous pas directement à votre supposée connaissance ? Ah, je vois ! Kirkby ne condescend pas à répondre à ce type d’interrogations. Quelle âme de sacristain ! Lui comme les autres, portés sur une mystique d’eunuque, ont toujours jugé ma façon de voir les choses avec morgue et rigidité.
    Il lâcha les poignets de la jeune femme, qui renouvela illico ses caresses, ses yeux couleur de charbon si intensément rivés sur ma personne que le pourpre me monta aux joues.
    — Sachez que la magie, la vraie, se définit comme

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