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Le talisman de la Villette

Le talisman de la Villette

Titel: Le talisman de la Villette Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Claude Izner
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belle sirène de Landemer. Dans quel but ?
    Dissimulé à l’abri d’un quotidien largement déployé, une jambe croisée par-dessus l’autre au creux d’un fauteuil près du Lion de Bartholdi, Corentin Jourdan vit le type foncer vers l’une des cabines téléphoniques.
     
    — A ffublée de voiles diaprés, Carmella virevoltait sur la scène à l’instar d’une libellule en folie…
    Tic toc tic tic toc dring ! rythmaient les touches de
    la machine à écrire.
    —  Elle s’apprêtait à attaquer un fandango sensuel…
    — Tu dictes trop vite, se plaignit Iris.
    Elle s’arrêta de taper tandis que Joseph arpentait le salon.
    — Il y a un problème, ma chérie ?
    — Affublée… C’est incorrect, parée serait plus adéquat.
    — C’est tout ?
    — Non. Une libellule en folie, c’est académique ! Je suggère : une impétueuse libellule.
    Joseph stationna sous un portrait en pied de sa femme par Tasha.
    — Tu es logique, comme toujours.
    — Et puis que fabrique un fandango dans un vaudeville dont l’action est censée se dérouler en Italie à l’époque de la Renaissance ?
    — Oh ! Qu’importe ! Le terme me plaît, et les « andalouseries » sont à la mode, d’où le prénom de mon héroïne.
    — Il serait plus judicieux de l’entraîner dans un branle, ou une gaillarde, ta Carmella, ou alors change de siècle.
    — Je t’accorde la gaillarde. Elle s’apprêtait à attaquer une gaillarde… Zut ! Le bigophone.
    Joseph dégringola au rez-de-chaussée.
     
    Corentin Jourdan surveillait le type aux prises avec le téléphone. Il avait malmené le bouton à trois reprises et fini par joindre le poste central, maintenant il se languissait de sa communication en pianotant sur la vitre de la cabine. Ah ! Lire sur ces lèvres qui formaient des mots inaudibles, prendre l’exacte mesure du personnage et des dangers soulevés par sa présence !
    Le type raccrocha, s’éloigna vers la réception, paya. Lui emboîter le pas ? Corentin s’était promis de ne pas faillir à sa garde. Il resta rivé à son fauteuil.
     
    En catimini, Iris s’était approchée de l’escalier, elle n’avait perçu de la conversation de Joseph que des syllabes étouffées. Lorsqu’il réapparut, elle occupait de nouveau la chauffeuse près de la table basse où trônait la Remington. Soulagé que le Dr Reynaud l’eût auscultée, Joseph déplora de devoir s’absenter.
    — Victor insiste, un collectionneur de reliures anciennes de Grolier et de Thouvenin, évidemment c’est en banlieue, à Bourg-la-Reine…
    — Donc cela prendra la journée. Bizarre, j’étais persuadée que mon frère et Tasha étaient jaloux de leur intimité dominicale.
    — Moi aussi, ma chérie ! C’est inhabituel, un client qui s’est débrouillé pour le débusquer rue Fontaine, décréta Joseph d’une intonation tellement ingénue qu’il parvint à se convaincre lui-même de la véracité de son assertion.
    — En ce cas, vas-y sans barguigner.
    — Quelle déveine, justement le jour de congé de Zulma, et ton père qui s’est esbigné… Et si j’allais chercher maman ?
    — Surtout pas ! Sois tranquille. Je vais revoir le début du Bouquet du Diable , grignoter la chicorée à la crème et le gâteau aux noix qu’Euphrosine a préparés ce matin, m’allonger…
    — Tu as raison, ma chérie, repose-toi, dors.
    Il l’embrassa un peu plus longuement qu’il n’en avait l’intention, si bien que ses mains se fourvoyèrent un moment sous le kimono de soie noire.
    — Tu vas être en retard, murmura-t-elle.
    — Oui, mais…
    Elle le repoussa gentiment. Il lui envoya un baiser et s’empressa de quitter la chambre.
    Enfin seule ! Elle se leva et s’étira, ravie d’être maîtresse de l’appartement. Dans quelles frasques policières Victor s’était-il précipité ? Fallait-il avertir Tasha ? La sécurité de Joseph était-elle menacée ? Et Kenji, courir la prétentaine, à son âge ! Finalement, pourquoi s’en serait-il privé ? L’amour était une si douce invention ! « La liberté également. Laissons les uns enquêter, l’autre séduire. Cette journée de solitude est un cadeau du ciel. »
    Elle déroula de sa corbeille à ouvrage le chemin de table destiné à sa belle-mère qui allait prochainement fêter ses quarante-deux ans. Elle pouffa à la pensée qu’elle était née l’année du dragon. Cet animal convenait autant à son caractère dominateur que celui de

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